Ma mère venait de s'écrouler sur le sol, lourdement. Du sang sur les pavés, sur son gilet, un trou. Je crus halluciné un moment. Je m'étais brusquement arrêtée, laissant mon père en plan qui lui, suivait aveuglement les autres. Ne me voyant plus à côté, je le vis se stopper, faisant tomber un enfant dans son arrêt. Il fit rapidement demi-tour, s'aidant de sa canne pour tenir debout et venir jusqu'à l'endroit où était ma mère.
J'aurais du réagir plus vite en voyant la blessure mais je restais figée. Un état de stupeur, presque de choc. Je restais là, j'étais tétanisée. Par la peur ? Par la douleur ? Par la colère ? Par tout en même temps ?
« Maria ! Maria ! » se précipita l'homme, manquant de tomber lui aussi, en s'agenouillant devant sa femme mourante.
Il prit la main de sa femme, tremblant tout comme cette dernière, qui me regardait, les yeux emplis de larme. Je ne l'avais jamais vu pleuré. Toujours forte dans toutes les situations, même dans les plus dures. Et là, ce fut la première et la dernière fois. Maman me regardait toujours, un sourire se dessinant sur ses fines lèvres gercées par le temps. Elle toussa quelques secondes, un jet de sang se projeta sur mes boots. Le liquide violacé qui gela, sur le cuir, dans la fraction de seconde qui suivit.
« Je crois que l'on m'appelle là haut.. » s'épuisa à dire ma mère, dans un souffle, tournant la tête vers Joachim.
Mon père regarda alors l'arme accrochée à ma jambe avant de l'attraper avec sa main de libre puis de me la tendre. Je restais là, à la fixer. Il me fallut quelques minutes pour comprendre les paroles de ma mère. Je pris l'arme, timidement, tremblant du bras gauche. Je rechargeai l'arme, dans un bruit de métal qui fit sursauter mon père. Tendant le bras armé vers Maria, je posais l'index sur la gâchette et la balle partit directement dans la tête.
Joachim s'écroula en pleurs, sur le corps sans vie de son aimée. Entre des prières, des mots de yiddish, des insultes, il continuait de pleurer. Face à cela, je me mis à pleurer, je n'avais pas le choix, je devais, c'était mon cœur qui parlait. Tuer sa mère, celle qui vous à porter, briser les liens d'un coup, d'un trou, d'une seule et simple balle.
« Ma chérie.. ma chérie.. je ne veux pas la laisser seule. Peux-tu me la faire rejoindre ? » demanda, entre deux sanglots le vieillard, me regardant, rougit par la peine.
J'eu un mouvement de tête ainsi qu'un léger sourire. Je ne pourrais pas les joindre pour le moment, je ne pouvais pas, je devais rendre leurs morts utiles, je devais rendre la paix à toutes ses âmes brulés par les flammes antisémites. Avant que je ne tire, il se leva et me prit dans ses bras, pleurant avant de m'embrasser sur les deux joues. Il n'avait été jamais expressif, je savais qu'il m'aimait, il savait que c'était réciproque. Je l'avais serré avec toute la peine que je ressentais même aujourd'hui, la peine de tuer mes géniteurs pour leurs paix éternelles.
Un dernier coup, un dernier souffle.
« Merci. »
YOU ARE READING
Lonely Jew.
Historical FictionUne histoire dans la Pologne occupé par les forces allemands, l'histoire d'Aléna Wojceshowki à travers des rires et le plus souvent des lames, sera vous faire voyager à travers le temps.