Contes et Légendes Africaines

Le "Circoncis de Dieu" et le lionceau (1)

Partie racontée par Sofiane

Il y avait une fois, au cœur de la forêt, un vieux chasseur et son fils nommé Boïri. Tout près d'eux, vivaient une lionne et son lionceau. Mais les deux familles voisinaient sans le savoir.

Or, un jour que la lionne et le père de Boïri, chacun de son côté, étaient partis à la chasse, le lionceau rencontra l'enfant devant sa case.

- Bonjour, petit garçon, dit le lionceau.

- Bonjour, ami lionceau.

- Que fais-tu ainsi tout seul ?

- Je m'amuse, en attendant mon père qui est parti chasser.

- C'est là ta maison ?

- Oui ! J'y suis né. Ma mère est morte en me mettant au monde.

- C'est triste de ne pas avoir de mère, dit le lionceau.

- C'est triste oui ! Et je pleure souvent.

À partir de ce jour, le lionceau et l'enfant devinrent amis et ils profitaient de l'absence de leurs parents pour manger et s'amuser ensemble...

Un an plus tard, une sécheresse terrible ravagea le pays et tout le gibier descendit vers la côte. Ne trouvant plus rien à se mettre sous la dent, la lionne rencontra un jour le vieux chasseur. Affamée, elle se jeta sur lui et le dévora, n'emportant que la tête de l'homme à son petit. Celui-ci invita son ami à prendre part au festin. Mais Boïri reconnut aussitôt la tête de son père ; il fondit en sanglots et s'écroula.

- Qu'y a-t-il ? Demanda le lionceau.

- C'est la tête de mon père

- Je te vengerai ! Dit le lionceau.

Et, le soir, quand la lionne rentra, son fils l'abattit avec les flèches du vieux chasseur qu'il avait empruntées à Boïri. Puis, les deux amis partirent ensemble à la chasse. Ils vécurent ainsi pendant des années sans que jamais la moindre brouille vint interrompre ou même assombrir tant soit peu leur amitié.

Un jour, le lion, au retour d'une randonnée solitaire, trouva son ami en pleurs.

- Pourquoi es-tu triste ? Lui demanda-t-il.

- Parce que j'ai atteint l'âge d'être initié. Je suis en forêt et orphelin; comment parviendrai-je au centre de l'initiation et qui m'y présentera ?

- Ne te fais pas de souci sur ce point, dit le lion. Depuis plusieurs années, je te sers de père; c'est moi qui me chargerai de tout. Pars, tout de suite, au centre et présente-toi sous le titre de "Circoncis de Dieu". Personne ne verra d'objection à te recevoir. Pour ce qui est de la nourriture, n'aie pas d'inquiétude : je déposerai chaque matin deux buffles pour toi à l'entrée du camp.

Tout alla pour Boïri comme le lion l'avait prévu...

Lorsque le lion apprit que le stage d'initiation touchait à sa fin, il alla se camoufler derrière un taillis, sur la piste des marchands haoussa, colporteurs de pacotille et, quand la caravane déboucha au tournant, il se planta sur la route en rugissant de sa plus méchante voix. Effrayés, les colporteurs disparurent plus vite qu'ils n'étaient apparus, abandonnant là leur marchandise. Le lion choisit pour son ami les plus beaux costumes et le "Circoncis de Dieu" fut le mieux habillé de tous les initiés, comme il convenait à son titre. De loin, son ami assista au retour des nouveaux initiés ; il fut très fier des sa belle tenue qui lui valait louanges et considération.