N*6-------Ma seule lumière? elle s'est éteinte...

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Avant-propos: je sais que je prends une éternité et j'en suis vraiment désolée pour ceux qui attendaient.

Ce jour là, il pleuvait.

Les gouttes de pluies s'abattaient violemment sur le sol, le rendant boueux. Les calèches avaient arrêtées de passer. J'étais désormais seule en compagnie de mon père, seule en compagnie de cette homme, qui aura fait de mon coeur la plus forte des constitutions. Mon père, je le cherissait plus que tout, il m'a appris dans un temps où les hommes étaient, et sont considérés au-dessus des femmes, toute la folie qu'il y avait dans cette "considération".

Mon père sur son lit de mort, m'avait répété ce que depuis ma naissance il me disait. Ses dernières paroles n'étaient adressées qu'à moi, sa fille unique. De sa voix tremblotante, il s'efforça d'articuler avec un sourire marqué par le temps:

"_N'oublie jamais qui tu es, d'où tu viens, et comment tu es ainsi devenue. Rappelle toi de moi, ton père certes aveugle à présent et tout autant faible, mais qui de toutes ses forces t'avait jadis protégé de ce monde de cruautés. Ne cède jamais ta liberté ni ta dignité car je veux que ma fille, ma seule, mon unique, reste la tête haute face au monde.

Ils ne te comprendront pas, ils ne t'épargneront aucune souffrance et ne cesseront de vouloir t'arracher à toi même, celle à laquelle je t'ai appris à être fidèle. Pendant qu'on pense qu'avoir une fille est signe d'une terrible malchance et un déshonneur sans précédent, je fus le plus heureux le jour où tu m'eusse été donnée. Reste fidèle à toi même. Ils te le diront clairement et hautement!... Ils te le répéteront!... qu'être fille n'est que faiblesse et infériorité. Moi je te dit, je te le répète, être fille n'est qu'un savoir empli de force, être femme c'est se dépasser des préjugés qui nous enveloppent. N'oublie jamais... sa voix se satura de larmes qui le faisaient souffrir, n'oublie jamais ton pauvre père qui a essayé d'être là toute sa vie, pour toi.

Mon coeur se déchire mon enfant, à l'idée de te laisser seule face au monde... il se déchire... Ils me le broient par leur sadisme. Je ne puis imaginer ce qu'ils te feront, alors je t'en prie mon bouton se rose, ma lumière, mon étoile... Je t'en prie, de ne pas trahir ce que tu as toujours été...."

Sa voix se coupa, il n'arrivait plus à parler à cause de ses larmes qui ne le laissaient rien faire. Je pleurais en silence devant cette figure plus forte que l'humanité entière à mes yeux. Ce bouclier dur et précieux comme le diamant. Je pris sa main et pressa son dos contre mes lèvres. Les larmes se mélangèrent à ce baiser qui sera sans doute le dernier. Il s'essuya les yeux de l'autre main puis me sourit plus que jamais.

"_Regarde moi sourire, souviens toi de moi ainsi, souriant, pas pleurant. Cesse de verser tes larmes, elles sont beaucoup trop chères...

_Celui qui est plus cher et précieux, c'est toi mon père! C'est toi que la vie m'enlève! Je ne faiblirai pas! Je ne baisserai jamais la tête et je marcherai plus fière! Mais par pitié... par pitié ne me laisse pas, si tu pars que deviendrai-je? Il est trop tôt! Beaucoup trop... et sans toi, ma lanterne éternelle, comment traverserai-je ce chemin obscur?! Comment saurai-je quelle route prendre?! Je suis perdue sans toi... mon père..."

Il prit un ton grave et me fixa. Sa main se détacha des miennes et vint effacer mes larmes.

"_Vas-tu cesser de déblatérer ces jérémiades? Je sais que cela est dur, je le sais. J'estime t'avoir dors et déjà tout appris. Tout ce que tu dois savoir, tu le sais. Ne pleure donc plus..."

Le médecin vint me demander de sortir pour qu'il puisse examiner mon père. Je restais dans ma propre pièce à regarder la pluie qui tombait. Mes yeux devinrent rouges, emprisonnants les larmes qui battaient contre leur prison invisible.

Mon père ne tardera pas à s'en aller, j'en ai pleinement conscience et ça me serre étroitement le cœur. J'ai peur de la solitude qui suivra son départ, peur du vide que cela créera, peur des gens sans lui à mes côtés.

Ô Dieu, vous qui entendez les prières, récompensez mon père, accueillez son âme dans votre vaste paradis, vous savez mieux que personne qu'il n'est qu'un coeur pur, qu'une personne et un père exceptionnel.

Je me réveilla le matin me sentant à peine assoupie. La pluie battait toujours à son plein, pleurait-elle mon géniteur elle aussi? Je l'observait pendant un long moment, prise dans de noires pensées, froides, m'enveloppant de leur manteau de solitude et vidant toute gaieté. Le médecin m'avait annoncé la veille la mort de mon père. Je voulais qu'on m'emporte avec lui, pour rester à jamais dans ses bras doux, chauds et rassurants. Je marchais le long des murs de notre maison, observant sa silhouette se dessiner à chaque mètre passé, je le voyais qui souriait. Je n'avais pas encore senti son départ, l'aura qu'il répandait depuis des années restera collée ici à jamais, me rappellant la douleur de la séparation. Tous les bruits, tous les sons, toutes les paroles me semblèrent lointaines pendant des jours et des jours.

J'arrivais peu à peu à me donner de la force afin de faire face à ce monde par moi même. Son sourire, sa voix, son ombre, tous me poussaient de leurs fins doigts à avancer dans une route nouvelle pour moi. Ses paroles, je ne pourrai jamais les oublier, je n'oserai pas.

"Si ta raison de vivre disparait, trouve t'en une autre ou vis sans, mais relève toi toujours et regarde droit devant, là où la lumière t'attend".

Mon père, tu es plus qu'un géniteur, y'a-t-il un piètre mot qui puisse te décrire? Une phrase, un texte, un livre, qui puisse montrer au monde qui tu étais et qui tu resteras pour moi?

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⏰ Dernière mise à jour : May 10, 2018 ⏰

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