1. La rupture

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« La Tour Eiffel a froid aux pieds... L'arc de Triomphe est ranimé... Et l'Obélisque est bien dressé... Entre la nuit et la journée... il est cinq heures... Paris s'éveille... Paris s'éveille... »

Comme dans la chanson de Jacques Dutronc, je traverse Paris, qui s'anime dés six heures. je n'ai qu'une hâte: celle de rentrer chez moi.

Depuis une heure que j'ai atterri, j'ai du mal à revenir à la réalité.  En plus, il faut que je me motive:  je reprends le travail ce soir. J'aime mon métier; j'adore ce que je fais: je suis barmaid au lounge bar, dans un palace parisien. Je ne travaille que le soir, j'aime cette clientèle par rapport à celle en journée qui est un peu plus pressée.

C'est un beau métier, mais où il est compliqué d'allier vie de famille et vie sociale. J'ai vingt-sept ans et, en neuf ans, j'ai dû avoir deux copains: Thomas, qui a duré deux ans, et Nicolas, cinq ans. Notre relation s'est terminée il y a deux semaines. Je n'ai pas encore tout à fait encaissé le choc d'être célibataire, mais je croyais en notre couple. Je le voyais comme l'homme avec qui je vieillirais, le père de mes enfants.

Le taxi défile à travers les rues encore endormies et je repense à notre rencontre.

C'était un vendredi. Il était en séminaire depuis une semaine à l'hôtel et, le dernier soir, ils l'avaient fêté au bar. Alors que je préparais des cocktail, il était venu passer la commande de la tablée directement au comptoir, où il est resté accoudé.

- Je m'appelle Nicolas et vous ?

- Lisa. Vous séjournez à l'hôtel ?

J'avais continué de mélanger les ingrédients.

-Non, nous étions en séminaire, je suis graphiste dans une boîte de pub.

Il m'avait montré tous ses collègues.

Il m'avait dévisagée et cela m'avait mise mal à l'aise. J'avais répondu un "ok" timide en disant:

- Vous savez, vous n'êtes pas obligé d'attendre: un serveur va vous apporter vos boissons.

- Je sais, mais je suis en meilleure compagnie, ici;  en plus, je préfère regarder les belles choses.

Il avait un regard pénétrant et malicieux, des yeux couleur noisette.

- Je crois que vous avez laissé vos lunettes en salle de conférence.

J'avais pris les glaçons et les avais mis dans le shaker.

- Je ne porte pas de lunettes et, aux dernières nouvelles, je n'en ai pas besoin, avait-il dit en rigolant.

- Alors vous devriez prendre rendez-vous chez l'ophtalmologue: il y a de plus belles femmes dans la salle qui, je pense, aimeraient être à votre bras.

Il s'était mis à rire en regardant autour de lui et  dit :

- Mouais. Elles ne sont pas aussi naturelles que vous. Dites-moi que j'ai une chance que l'on finisse la soirée ensemble, que vous êtes célibataire et que votre cœur est à prendre!

Il avait passé ses mains dans ses cheveux tout en souriant.

J'avais failli en lâcher mon shaker: il était plutôt direct.

- Je ne sors pas avec les clients et je couche encore moins avec eux!

Je n'avais eu que très peu d'expériences mais je ne cherchais pas forcément des relations amoureuses; toutefois, je dois admettre que me faire draguer avait eu un côté flatteur. Surtout, quand on n'a pas le corps d'un top model ou de miss France; cela dit,  je ne ressemble pas non plus à un sac à patate; je suis  une femme banale, comme tant d'autres.

Dans les yeux  [premier jet] ( corrigé et en auto-édition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant