1-800-273-8255

259 8 4
                                    

Ça a commencé dès mon enfance. Déjà à huit ans, je me sentais différent. Tous les enfants jouaient ensemble, j'étais à côté, seul. Je les regardais s'amuser, rigoler. Personne ne voulait me parler, être mon ami ou même m'approcher. Pourtant j'étais comme eux, enfin c'est que je croyais. Deux jambes, deux bras, deux yeux, un nez, une bouche, je ne comprenais pas pourquoi on me rejetait. Mais comme je n'osais pas leur parler, sous peine de me faire rejeter pour la énième fois, je restais dans mon coin, avec mes craies et je dessinais. J'en parlais à Maman, mais elle n'arrêtait pas de me dire « Ne t'inquiète pas, Louis, tu te feras des amis. Il faut juste être patient. Tu trouveras la perle rare. » Maintenant que j'y repense, c'était sûrement les meilleures années de ma vie. Du moins, les plus calmes. J'étais seul, certes, mais tranquille. Personne ne m'embêtait.

Enfin, c'était avant de grandir et de rentrer dans la cour des grands. C'est pendant mes années au collège que j'ai commencé à me sentir différents. La puberté arrive, les hormones et tout ce qui va avec. C'est l'année de ma 4e que j'ai su. Su que j'étais définitivement différent. J'étais dans les vestiaires du gymnase du collège. Les garçons parlaient tous de filles et à quel point elles étaient « bonnes ». Je n'ai jamais apprécié qu'ils parlent des filles comme ça. Je trouvais (et trouve toujours) ça dégradant pour elles. Bref, j'avais arrêté de les écouter parce que parler de ça ne m'intéressait pas. Les filles ne m'intéressaient pas. Jusqu'à ce qu'on me demande mon avis.

« Et toi, Louis, tu la trouves comment Vanessa ? »

J'avais juste haussé les épaules, et heureusement pour moi, ils n'ont pas insisté. Ils ont continué leur discussion et c'est là que je me suis mis à réfléchir. J'entendais des « elle me fait bander » ; « quand je me branle je pense à elle » et tout autre atrocités, et je me suis demandé : Et moi ? Est-ce que les courbes des filles me font cet effet ? C'est vrai, je ne m'étais jamais masturbé en pensant à une fille, je ne m'étais jamais masturbé tout court, je n'en ressentais pas le besoin. J'avais déjà eu des érections, évidemment, mais je ne m'étais jamais touché comme eux. Alors j'avais décidé d'essayer.

En sortant des vestiaires, j'ai regardé les filles. Rien. Voilà ce que je ressentais en regardant leurs seins et leurs fesses. Rien. A part de la honte. Les joues rouges de honte, je suis rentré chez moi. Je me suis enfermé dans ma chambre et j'ai réfléchis. Est-ce que si je regardais un porno, ça me ferait plus d'effet ? Les filles au collège n'étaient peut-être pas à mon goût. C'était peut-être ça. J'ai pris mon ordinateur, et j'ai cherché des sites X. Je me sentais honteux, j'en tremblais. Ce n'était pas mon genre de faire des choses comme ça, mais je devais essayer. Je devais savoir si j'étais normal. J'ai mis mes écouteurs et j'ai regardé une vidéo au hasard.

Je n'ai pas tenu plus d'une minute avant d'être affreusement gêné au point d'avoir envie de vomir. C'était atroce, une expérience atroce. Pourtant, je m'en rappelle, je n'avais regardé qu'une femme faire une fellation à un homme. Mais c'était trop. Alors j'ai vite arrêté la vidéo. Je m'apprêtais à quitter le site quand un onglet a attiré mon regard.

GAY

J'ai hésité au moins cinq bonnes minutes avant de me lancer. J'étais curieux. J'ai cliqué sur une vidéo. Et je l'ai regardé. En entier cette fois. Je n'arrivais pas à l'arrêter, mon cerveau ne fonctionnait plus. A la fin, j'avais chaud. Atrocement chaud, j'en transpirais et mes mains tremblaient. J'ai baissé mon regard et c'est là que j'ai compris. J'ai eu le déclic. La bosse dans mon pantalon pouvait me le prouver maintenant. Si les filles au collège ne m'avait rien fait, ce n'était pas parce qu'elles ne me plaisaient pas. C'est parce qu'aucunes filles ne me plaisaient.

J'ai gardé mon homosexualité secrète aussi longtemps que je l'ai pu. Je me sentais honteux, différent. J'avais l'impression d'être un monstre, d'être une personne hors normes. J'aimais les garçons. Et ma descente aux enfers a commencé. L'entrée au lycée. Tout allait bien au début, personne ne se doutait de mon orientation sexuelle. Je faisais tout pour le cacher. J'étais, ce qu'on peut qualifier de « populaire », j'étais le capitaine de l'équipe de foot, j'avais des amis, des bonnes notes, mes parents étaient fières de moi, j'avais toutes les filles du lycée à mes pieds, on pourrait croire que j'avais tout pour être heureux. Mais je ne l'étais pas. Pas complètement. Comment je pouvais être heureux quand toutes les personnes qui m'étaient proches m'aimaient pour ce que je n'étais pas ? Ils n'aimaient pas le vrai Louis, non. Ils aimaient le Louis, hétéro, capitaine de l'équipe de foot et qui se tape des pompom girls quand il veut. En réalité, derrière toute cette façade, j'étais encore le petit garçon seul avec ses craies dans le coin de la cours de récréation. Personne ne me connaissait, personne ne me comprenait, j'étais seul avec moi-même.

1-800-273-8255 (OS) [L.S]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant