Pour toi, Ferhan.
Merci d'être toujours là.-
battlefield - lea michele ♪
« J'ai besoin que tout s'arrête. Ces moqueries, ces insultes, cette haine envers moi que je ne pense pas mériter. C'est vrai, je ne leur ai rien fais. Pour la plupart, je ne les connais même pas, j'ignore complètement leur prénom. Mais ils me détestent. Parce que je suis grosse. Parce que je ne suis pas aussi jolies qu'elles, pas assez bien pour eux. J'aimerais avoir un ami. Quelqu'un qui me soutiendrait, qui m'aiderait et me défendrait face à tout ça. Mais je suis seule. Car les seules personnes qui m'ont un jour aimée, m'ont laissée. Elles m'ont abandonnée parce que ça craignait d'être mon amie. Elles ont préféré la popularité, ou du moins, une bonne réputation, à notre amitié solide. Ou plutôt, que je croyais, solide.
Je ne suis pas allée en cours depuis deux semaines. J'ai honte de moi, et j'ai peur d'eux. De leurs plaisanteries qui ne font rire que les idiots qu'ils sont. Je n'ai plus envie qu'on renverse mon plateau à la cantine en me disant que je suis assez grosse comme ça, je ne veux plus qu'on mette de colle ou de chewing-gum sur ma chaise. Je ne veux plus qu'on m'insulte. Je ne retournerai en cours, seulement quand j'aurai perdu tous ces kilos, toutes ces insultes accrochées à mon corps. »
- Calli ! On mange !
Ma mère m'appelle pour le repas, et je range lentement mon carnet. Je n'ai pas faim. Je n'ai plus faim, depuis quelques jours. Je veux absolument perdre tout ça, au risque de me détruire la santé. Je veux être heureuse.
Je descends quand même pour manger avec elle. Je me force, même si je dois tout vomir plus tard. Je m'en fiche. Je ne veux pas qu'elle sache ce que je fais. Je mange lentement et avec dégoût le repas qu'elle a préparé.
Je ne lui ressemble pas. Elle est mince, filiforme, et elle peut manger ce qu'elle veut sans prendre un gramme. Et moi, je prends quinze kilos simplement en regardant de la salade. Je suis la seule personne au monde qui peut grossir avec de la salade, je crois. Je suis obsédée par mon poids.
Ils m'ont détruite.
Après le repas, j'aide ma mère à débarrasser la table et je monte m'enfermer dans ma chambre. J'allume mon ordinateur et me connecte sur Facebook. Il est complètement privé et ne me sert qu'à vérifier qu'ils ne font pas de mauvaises blagues sur moi. Je ne les ai pas dans mes amis, mais je peux voir s'ils créent une page sur moi. Dans un film, des élèves l'avaient fait sur une fille grosse. Depuis, je suis complètement effrayée à l'idée qu'ils fassent la même chose avec moi.
Je ne trouve rien, et je m'apprête à éteindre l'ordinateur quand je reçois un message. Je l'ouvre, la peur au ventre.
C'est un des garçons de mon lycée. Il a l'air assez timide, en général, et je suis étonnée qu'il m'envoie un message. Que me veut-il ?
« Salut. »
Je réponds ? Je ne réponds pas ? Peut-être qu'il trouve simplement dégueulasse que tout le monde me critique sur mon poids et qu'il veut être mon ami. Peut-être que mon vœu est enfin sur le point d'être exaucé.
« Bonsoir. »
« Comment vas-tu ? »
« Bien, merci. Et toi ? »
« Eh bien... en fait, j'ai quelque chose à te dire... »
Là, je commence à avoir peur. Qu'ont-ils fait encore ? Que prévoient-ils de faire ? Ils ne peuvent pas simplement m'oublier ?