J'essayai de respirer, en vain. Je n'arrivai pas à trouver de l'air, et ma tête commençait à tourner.
Quand Henri me lâcha enfin, je tombai à genoux et suffoquai. Je me mis à tousser violemment.
Il s'agenouilla à côté de moi, et m'attrapa le bras.
— Qui crois-tu duper ? répéta-t-il en me forçant à me relever.
Je ne lui répondis pas, et devant mon mutisme, il s'exclama, furieux :
— Tu crois vraiment que je n'ai pas vu tes manigances avec Adam ? Vos regards pendant les repas, vos escapades la nuit ? Est-ce que tu as vraiment pensé une seule seconde que j'avais cru que ta pauvre mère était celle qui était entrée par effraction dans ma chambre ? Tu es bien naïve, ma chère.
Il me plaqua à nouveau violemment contre le mur.
— Alors maintenant, tu vas m'écouter bien attentivement... Je ne veux plus te voir une seule fois croiser le regard d'Adam. Tu es à moi, tu m'as bien compris ?
Je ne répondis toujours pas. Des larmes coulaient sur mes joues, mais je les ignorais. Il me tordit le bras et pris mon visage dans sa main.
— Est-ce que tu m'as bien compris ? répéta-t-il.
— Vous ne me faites pas peur, articulai-je entre deux sanglots.
Il ne fut pas dupe de mon mensonge.
— Si je te vois encore croiser une seule fois le regard d'Adam, je lancerai une armée à la recherche de tes parents, et je les tuerai. Si je te revois croiser les yeux d'Adam, j'arracherai le cœur qui bat si fort pour toi devant tes yeux. C'est la dernière fois que je te le demande, est-ce que tu m'as bien compris ?
Un long silence s'installa avant que je ne réponde. Je pensais à mon frère, tué par le gouvernement. À Alicia, dont la mort était encore inexpliquée. À mon père et à ma mère, qui se battaient pour moi dehors. Si Henri lançait des gardes à leurs trousses, tout ce pour quoi ils se battaient depuis des années serait sans doute anéanti. C'était pour moi qu'ils le faisaient, et c'était à mon tour de leur rendre la pareille. Et je pensai à Adam. Je vis à la rage dans ses yeux qu'Henri n'aurait aucun scrupule à le tuer.
— Oui, finis-je par murmurer, j'ai compris.
Il me lâcha et sortit de la chambre en claquant la porte. Je m'écroulai au sol. Au milieu des larmes qui brouillaient mes yeux, je ne voyais plus qu'une chose : les yeux d'Adam.
***
Le lendemain, j'avais pris ma décision. Il fallait que je rompe avec Adam. Que nous abandonnions nos plans. Pour lui, pour moi, et pour ma famille. C'était la meilleure chose à faire. Sinon, je risquais de tout détruire, et ça, je ne me le pardonnerai jamais.
Le jour était à peine levé quand je toquai à la porte de sa chambre. Au moment où il m'ouvrit, j'oubliai quelques instants la véritable raison de ma venue. Les yeux bouffis, les cheveux en bataille, il portait un t-shirt et un pantalon en toile. C'était la première fois que je le voyais vêtu autrement qu'avec son éternel uniforme.
Il sourit en me voyant à sa porte, et m'invita à entrer.
— Quelle belle surprise de si bon matin, dit-il en me plaquant contre la porte qu'il venait de refermer.
Il fit mine de m'embrasser, mais je le repoussai.
— Je ne suis pas venue pour ça, Adam, dis-je d'une voix sèche qui me surpris moi-même.
Il me regarda, étonné, mais ne répondit pas. En voyant son regard perdu, tout le discours que je m'étais efforcée de préparer pendant ma nuit blanche s'évapora. Je me sentis soudain incapable de lui dire quoi que ce soit. Il haussa un sourcil, et dit d'une voix amusée :
— Tu ne serais pas somnambule, par hasard ?
Je me retins de rire avec lui. Je fermai les yeux, et après un nouveau long silence, je les rouvris et me lançai.
— Adam, il faut que ça s'arrête.
C'est tout ce que je parvins à dire.
Son sourire amusé disparut, et il fronça les sourcils.
— De quoi tu parles ?
— Je parle de nous deux, répondis-je en essayant de cacher le tremblement de ma voix.
Il ne répondit pas. Après un long silence, il se passa la main dans les cheveux, et s'avança vers moi. Je reculais, et il s'arrêta.
— Qu'est-ce que ça veut dire, Sky ? s'énerva-t-il. Qu'est-ce qu'il t'arrive ?
Sa colère attisa la mienne. Je serrai les poings, et me rappelai mes résolutions de cette nuit. Pour que ça se termine, il fallait que je sois dure avec lui, que je ne lui montre aucun sentiment.
— Il ne m'arrive rien, mais je me rends compte que tout ça, ça ne rime à rien. Dans quelques jours, j'épouserai Henri. Nous n'aurions jamais dû commencer tout ça, et il faut que ça s'arrête là, tant qu'on peut encore le faire.
— Comment ça, tant qu'on peut encore le faire ? dit-il d'une voix sèche.
— Et bien, tant qu'il n'y a pas de sentiments entre nous ! m'exclamai-je, de plus en plus énervée.
— C'est vraiment ce que tu penses ? dit-il en haussant un sourcil.
— Ne fais pas l'idiot, soupirai-je.
— Sky, je ne comprends pas. Pourquoi, alors qu'hier même tu voulais venir dormir avec moi, tu viens me dire que tu abandonnes ?
— Parce que c'est fini, Adam ! C'était stupide, et tu le sais !
— Non, je n'étais pas au courant jusqu'à aujourd'hui. À mes yeux, ça n'avait rien de stupide.
— Eh bien, aux miens, ça l'est ! Écoute, je suis désolée si je vais te blesser, mais il faut que tu saches que je pense que j'ai eu tort. Je me suis emportée dans un moment où j'étais seule, perdue, et désespérée, et je me suis imaginée des choses qui n'existaient pas et qui n'existeront jamais.
Je crus voir ses yeux briller en entendant mes paroles. Est-ce qu'il était sur le point de pleurer ? Il s'approcha de moi et prit mes bras dans ses mains.
— Sky, dit-il d'une voix désespérée, regarde-moi droit dans les yeux, et dis-moi que tout ça était réel, pour toi ? Dis-moi qu'au moins une seconde, une seule, tu as cru que ça pouvait marcher entre nous ?
Je baissai les yeux au sol, et inspirai. J'avais envie de me jeter dans ses bras, et de lui demander pardon. Mais je me rappelai les paroles d'Henri. Si je te revois croiser les yeux d'Adam, j'arracherai le cœur qui bat si fort pour toi devant tes yeux. Et j'étais convaincue qu'il n'hésiterait pas une seconde.
Je levai les yeux et les plongeai une dernière fois dans les siens.
— Non, murmurai-je d'une voix à peine audible.
Puis, je me dégageai de son étreinte, et sortis de sa chambre pour lui cacher les larmes qui dévalaient mes joues.
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Le Ciel dans tes Bras
Fiksi RemajaComment expliquer le ciel à quelqu'un qui ne l'a jamais vu ? Lève les yeux. Oui, toi, lève les yeux. Regarde par la fenêtre. Que vois-tu ? Un ciel bleu, gris, noir ? De la pluie ? Des étoiles ? De la neige ? Que se passerait-il si il n'existait plus...