HEY, RUDY

P R O L O G U E

I

À toi qui lis: Les images d'en-tête représenteront parfois des personnages, mais tout est très suggestif, je laisse libre cours à ton imagination ♡

☆ ☆ ☆

02:58 ~ Appartement

Les plissements des draps chuchotaient dans la pièce, le garçon se tournait, se retournait, se tortillait dans tous les sens. Mais rien n'y faisait, il avait beau plier, déplier ses membres dans tous les sens et jurer par Dieu, il ne dormait pas.
L'odeur de la ville endormie entrait par l'ouverture béante du balcon et il pouvait voir les fins rideaux blancs flotter dans l'air calme de la nuit.
New-York sentait le chamalo grillé, l'essence et la pluie.

Tout en fixant le plafond, il attendait que son réveil sonne trois heures.
Chaque nuit, depuis longtemps, il se réveillait pour prendre son traitement, si bien que son horloge biologique était réglée comme une pendule. Quand la machine sonna, il se redressa et tapa dessus pour la faire taire.
Il se pencha pour attraper une boite de gélules, et après les avoir ingurgitées, se recoucha. Il ne savait plus vraiment quand est ce que la maladie avait commencé à s'infiltrer en lui... peu importe. Il ne s'en plaignait pas. Elle ne l'empêchait pas de vivre.

Du fond de son lit, il resta trois heures à somnoler plus ou moins profondément en essayant d'imaginer sa future journée : la rentrée des classes. L'idée d'entrer dans un nouveau lycée le pétrifiait.
Mais entre lui et son ancienne vie parisienne il y avait désormais l'Atlantique qui, tout bien considéré, était une barrière naturelle non négligeable. Le retour en arrière, c'était next.

Son arrivée aux États-Unis avait été très calme, il s'était installé dans le vieil appartement de sa mère situé dans une banlieue calme et peu fréquentée en périphérie de New-York.
Un endroit autrefois coloré et aujourd'hui à l'abandon, un endroit tout petit. Trois pièces et un balcon. Au sommet d'un immeuble sale, parmi tant d'autres.
Il avait passé une semaine complète à faire le ménage, débarrasser les meubles inutiles, acheter à manger, déboucher les toilettes, demander avec courtoisie aux insectes de quitter les lieux, et enfin, redécorer cet appartement fané, pour en faire un endroit confortable et chaleureux de sorte que les araignées ne trouvent plus refuge dans le bric à brac d'une femme sans organisation.
Merci maman, t'aurais pas pu faire un peu de vide avant de me laisser tomber. Ben non évidement. Pensa le garçon à plusieurs reprises.
Beaucoup de fois il s'était demandé pourquoi il était revenu ici, dix-sept ans, "c'est pas un âge pour voyager" à ce qu'on lui avait dit. Mais peu importe, ce qu'il voulait c'était changer de vie, changer de routine, s'éloigner de son père. Merci à lui de l'avoir gardé mais il n'était plus le genre de personne avec qui il avait envie de passer sa vie. Sa logique le poussait à dire qu'un oiseau qui ne prend pas son envol n'est pas un oiseau. Or, il était un oiseau, un oiseau bleu. Un oiseau qui survole les autres oiseaux.

Ici, il était un peu plus loin de son père, et un peu plus près de sa mère.
Et bien qu'il la déteste du plus profond de son âme, il ne pouvait s'empêcher de sourire à l'idée d'être à New-York, cet endroit maudit qu'il pensait avoir rayé de sa vie.