Chapitre 2

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Fellpoint est une petite ville d'à peine trois milles habitants, dont moins de quatre cents adolescents. Nous avons tous grandis ensemble et nous nous connaissons tous, de près ou de loin.

Pourtant, le garçon qui se tient tout contre moi, les mains toujours posées sur mes épaules, est un parfait inconnu. C'est certain. Si je les avais déjà vus, je me serais souvenue de ces grands yeux couleur de miel, de cette mâchoire carrée couverte d'une barbe de trois jours ou de ces larges épaules qui pourraient m'envelopper toute entière.

Je ne le connais pas, mais je ne demande qu'à remédier au problème. Je pourrais d'ailleurs rester là, blottie contre lui toute la journée, jusqu'à ce qu'un de nous deux se décide à ouvrir la bouche et parler.

L'inconnu semble avoir décidé que le moment en question était venu car il m'écarte de lui, sans rompre le contact, et m'examine:

- Ça va, tu ne t'es pas fait mal ?

Bon sang. Sa voix rpofonde et légèrement éraillée me remue les entrailles, tant et si bien que j'oublie tout bonnement de lui répondre. Ce n'est que lorsqu'il se racle la gorge, probablement gêné par mon silence, que mes cordes vocales se souviennent de la manière dont on émet un son.

- Je... eum... Oui. Pardon, je courais. Je t'ai pas vu. Euh... Tu n'as rien ?

Le grand brun secoue la tête, relâche sa prise et étire ses lèvres charnues en un sourire mesquin. Comme si la simple idée que j'ai pu le blesser avec mon poids plume était risible. Je pourrais me vexer de la manière dont il se moque ouvertement de moi, mais la fossette qui est apparue sur sa joue droite en même temps que son petit sourire, en a décidé autrement. Je suis bien trop occupée à me liquéfier à ses pieds pour exprimer la moindre objection à la manière dont il me considère avec un certain amusement, et une pointe de curiosité.

- Je vais bien, ne t'en fais pas, finit-il par dire, en s'éloignant.

Je le regarde faire, sans pouvoir prononcer le moindre mot, captivée par la manière dont ses vêtements moulent son corps alors qu'il marche en direction du parking. Et malgré moi, je joins le geste à la pensée, puisque, sans vraiment comprendre comment, je me retrouve sur le parvis du lycée, le regard rivé sur l'inconnu qui tente de fendre la foule d'élèves qui se pressent pour entrer dans l'établissement. En silence, Luc se glisse à mes côtés et me donne un coup d'épaule pour passer devant moi et observer le responsable de ma catatonie passagère.

- C'était qui, ça ?

- Un ange tombé du ciel, murmuré-je.

Pour toute réponse, mon ami me colle une pichenette dans l'oreille.

- Non ! Interdiction de dire des choses aussi niaises !

- Mais... je... il...

Nouvelle pichenette, à laquelle je réponds cette fois par un coup de poing.

- Aïe, je souffre, se moque Luc en se frottant le bras.

- Oh crotte ! fais-je en tirant la langue.

- Quelle maturité, bravo...

La bouche ouverte, il s'interrompt quelques secondes, fronce les sourcils, puis reprend, l'air désolé.

- Désolé ma vieille, mais ta romance avec le bel inconnu vient de finir en eau de boudin avant même d'avoir commencée, lâche mon ami, en donnant un coup de tête en direction d'un groupe qui s'est réunit sur le trottoir.

En effet, ses fréquentations ne le rendent pas vraiment accessible. Sur les cinq qui l'entourent, quatre font partie de l'élite sportive de la ville.

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