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C'est donc ça souffrir?

Que chaque bouffée d'air, me brûle la gorge tel du papier de verre ? Que chaque aliment que je réussis à ingurgiter me retourne l'estomac, et finisse dans le lavabo ? Que mon reflet dans le miroir me fasse plus peur qu'un personnage d'horreur ?

Mes joues sont creuses, mes cernes violacés sont les témoins de mes terreurs nocturnes. Mes cheveux, avant uniformément couleur charbon, étaient parsemés de mèches blanches, résultat de mon anxiété.

S e u l . J e  s u i s   s e u l .

Enfin...pas d'après ma famille. Des gens bien. Je ne les mérite pas moi et ma morosité permanente. Je suis entouré. Je suis seul. Un jour un homme a dit « La vraie solitude n'est pas un état physique, c'est se sentir seul au milieu d'autres personnes »

J'ai compris cette phrase quand il est parti.

Inconsciemment ma main saisit la lame et trace de manière irrégulière son prénom sur mon torse cette fois, juste au-dessus du cœur. Il n'y a plus beaucoup d'espace a force. Je grimace ça fait mal.
N'allez pas croire que je fais cela pour l'attention ou la pitié. Je déteste faire ça.

Lentement. C'est le seul moyen. Ses traits s'effacent jours après jours.
Instable, ma mémoire me joue des tours...
Attribuant peu d'importance à Sa vie, elle détruit le son de sa voix, de son rire.
Mémoire maudite, pourquoi ne pas effacer ma peine avec ?

L i a m

Chaque jour depuis sa montée aux cieux je grave son nom dans ma peau. Le sang, la douleur, les cicatrices...Je ne l'oublierai jamais : Son nom. La seule chose que l'on pourra pas m'enlever. Soixante-dix-sept marques en comptant celle-ci. Soixante-dix-sept levers de soleil et autant de couchers de Lune.
Il n'est plus là mais le temps continue impitoyablement sa course, se fichant des âmes brisées qu'il laisse derrière ses pas meurtriers.
J'ai perdu un morceau de mon cœur, ma boussole, mon repère, mon monde. J'ai perdu mon Liam. J'aimerais pouvoir pleurer sa disparition, mon manque. Mais je ne peux pas, je ne peux plus, je n'y arrive plus. Aucune larme ne coule. C'est horrible, je ne peux extérioriser cette aura noire grandissante en moi.

Je suis une bombe à retardement qui ne demande qu'à exploser.

Dire que je me sens mal serait un euphémisme.

J e   s u i s   m o r t.

La vie m'a tuée de l'intérieur. Elle s'est servie de moi pour réaliser ses fantasmes les plus sadiques, m'a désarmé, ridiculisé, enfoncé...Elle me l'a pris.

Changement de décors, je suis à l'extérieur.

Je ne m'en étais pas rendu compte jusqu'à ce que ce scooter m'esquive de peu en klaxonnant. Mes jambes avancent de leur propre chef dans une direction probablement aléatoire. Je ne suis plus maître de mon corps. Je ne suis que spectateur, je ne vis plus, je subis un scenario improbable digne de Sophocle. Je ne suis qu'un esprit, déchiré, un pied dans la tombe, enfermé dans une enveloppe charnelle me retenant prisonnier de cet enfer.

Mon corps s'arrête quand je vois l'endroit où Il m'a autrefois traîné. Ce vieux pont de pierre, que la nature avait orné de lierre, me semble aspiré toutes mes forces. Le sol se rapproche vite, il me semble que je sois en train de tomber à genoux. Un hurlement sinistre retentit, je balaie les alentours du regard. Mais ce vieux pont caché dans la forêt n'était pas très fréquenté. Il n'y avait personne. Pourtant le cri s'intensifie, la voix se brise. Mes mains atteignent mes cheveux et les tirent avec acharnement.
Je laisse ma tête s'écraser contre le sol quand je comprends que je suis l'auteur de ces cris.

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⏰ Dernière mise à jour : Dec 31, 2017 ⏰

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