Cher Jules

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J'avais reçu ce matin une lettre d'un vieil ami d'enfance, glissée entre mes journaux. J'étais heureux d'avoir enfin des nouvelles de mon "meilleur copain" du collège. Je déchiquetais donc l'enveloppe avec impatience, comme un enfant ouvrant son cadeau.

"Mon cher Jules,

Cela fait longtemps que l'on ne s'est pas vu. Ayant repris contact avec Marc depuis quelques temps, il ne manque plus que toi et j'aurais revu toute ma bande d'amis du collège. Je t'invite donc à venir dans ma maison en Provence, tu trouveras l'adresse au dos de la lettre.

A bientôt je l'espère,

Christophe, ton ami"

Je posai la lettre sur la table et réfléchissais à mon programme du week-end en sa compagnie. Si il avait gardé les mêmes passions, on irait sûrement chasser les perdrix. je partais donc chercher quelques habits propres et commençais à faire mon sac.

La journée suivante passa très vite. Je filais directement en Provence à peine sorti du bureau. Quelques heures plus tard, j'arrivai à l'adresse indiquée. La maison était très ancienne et je me surpris à frissonner, malgré mon manteau épais, en me garant sur le côté. Je m'avançais et toquais à la porte. "Si je ne suis pas là, je laisserai la clé sous le paillasson" avait-il ajouté à côté de son adresse. Je soulevais donc le paillasson et ouvrait la porte. L'air était glacial, comme si la maison était inhabitée depuis longtemps. Je trouvais un mot sur la table de la cuisine:

"Mon cher Jules,

Je suis vraiment navré mais ma mère, qui vit en Espagne, a eu un accident. Ca ne devrait pas être trop grave, je serai de retour à midi demain. En attendant, fais comme chez toi."

Je n'étais pas du tout rassuré. La perspective de rester tout seul dans cette grande maison froide et inquiétante ne me réjouissait pas du tout. Je commençais par allumer les lumières du rez-de-chaussée et un feu dans la cheminée. Le silence était de plus en plus pesant. Malgré les flammes immenses, le froid régnait toujours dans la pièce. Je décidais de dîner devant la cheminée, unique source de chaleur et de réconfort. Je me demandais si Christophe faisait parfois le ménage, la maison était poussiéreuse et de nombreuses toiles d'araignée tombaient du plafond.

Je montais à l'étage. Le couloir paraissait sans fin, avec toutes ces portes alignées les unes à la suite des autres. J'avais un peu honte de me l'avouer, mais j'étais terrifié. Que renfermaient toutes ces portes ? Je pris une grande inspiration. Et si je trouvais un esprit ou pire, un cadavre ? Je secouais la tête. J'étais ridicule ! Christophe n'était pas un vampire, et encore moins un tueur en série. Il me semblait que les tableaux me regardaient. Je délirais totalement ! Il fallait que je dorme. J'ouvrai la première porte. Une chambre immense comportant un lit double , une bibliothèque ancienne contenant les plus grands classiques et une commode du XVIème très imposante. De peur de tomber sur autre chose, je décidais de rester dans cette pièce cette nuit. Je trouvais dans la commode quelques couvertures. Elles sentaient un peu le moisi mais j'avais tellement froid que j'aurai pu dormir avec un tapis en guise de couverture. Je me glissais donc dans le lit glacé après m'être changé et m'être brossé les dents. J'allais tomber dans les bras de Morphée lorsque la porte s'ouvrit en grinçant. Je me levais et la refermais. Je retournais me coucher. Quelques minutes plus tard, elle se rouvrit. Je me levais, inquiet, et allumais la lumière du couloir. Il était désert. Je refermais une nouvelle fois la porte. Au moment où je me détournais elle s'ouvrit et s'arrêta sur mon dos. Une bouffée d'angoisse m'étreignit. Je me tournais subitement, sautant presque. Pris de panique, je pris quelques livres dans la bibliothèque et les posai contre la porte fermée. Malgré mes précautions, il m'était impossible m'endormir. Tout à coup, j'entendis un choc sourd. Puis un autre quelques secondes plus tard. J'allumais la lumière et vis les livres posés contre la porte tomber un à un, mués par une force invisible. La porte s'ouvrit alors repoussant les livres éparpillés sur le sol. Je tremblais comme une feuille. Puis tout à coup plus rien. Je redoutais un autre phénomène, restant sur mes gardes. Mais rien ne se passa. J'attendis, attendis pendant ce qui me paraissait des heures et des heures.Un bâillement m'échappait. Je ne voulais surtout pas m'endormir, de peur de ne jamais me réveiller. Mes paupières devenaient de plus en plus lourdes. Je luttais contre le le sommeil, mais il finit par me vaincre. Malgré moi, je m'endormis.

Le lendemain je me réveillais en sursaut, espérant que tout ceci ne soit qu'un rêve. Je découvris malheureusement les livres toujours éparpillés par terre. Je descendais après m'être habillé et découvrait un nouveau mot sur la table de la cuisine, avec du pain frais.

"Mon cher Jules,

C'est plus grave que ce que je pensais. Je ne pourrais pas rentrer tout de suite. Reste autant de temps que tu veux."

Je ne resterais pas un instant de plus dans cette horrible maison. Je parti donc chercher mon sac à l'étage. Les livres étaient rangés, à leurs places, dans la bibliothèque. Avais-je rêvé ? Je descendis, pris le pain et démarrais la voiture.

Deux mois plus tard, n'ayant eu aucune nouvelles, ni de Christophe, ni de l'état de sa maman, je décidais d'aller trouver Marc. Je le trouvais à la sortie de son bureau. Je discutais un peu avec lui puis l'interrogeais sur Christophe. Il me regardait avec un air désolé.

"Tu n'es pas au courant ? Je suis navré mais Christophe est décédé il y a deux ans." 

Cher JulesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant