2. Retrouvailles

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Après avoir pris un vol direction Paris, un TGV puis un ter,  nous arrivâmes à la petite gare qui était à 20 min en voiture de Thiercelieux.

Les taxis ne se déplacaient pas dans ces régions reculées, alors Félix était sensé nous ramener. Je le vis, adossé à sa voiture. Qu'est ce qu'il avait changé en 2 ans! Il avait beaucoup grandis et avait coupé ses cheveux blonds cendrés. Je courus vers lui, Félix était mon seul ami car les autres jeunes étaient inintéressant.

Après l'avoir pris dans mes bras et installé nos valises dans le coffre, nous montâmes dans sa voiture, c'était étrange de le voir conduire car la dernière fois que je l'ai vu c'était un ado juvénile. Aujourd'hui, il était musclé et avait une légère barbe.

Je ne pouvais décrire l'émotion qui m'habitât lorsque j'aperçus notre maison. C'était là où j'avais grandis, dans cette maison traditionnelle de style alsacien. J'avais hâte de retrouver ma chambre qui se nichait au dernier étage au milieu des colombages. Du haut de ma fenêtre, j'avais une vue sur toute la grande place de la ville, et je ne comptais plus le nombre d'heures où je suis restée, affalée sur mon lit, à observer les étranges habitants de Thiercelieux en rêvant de contrées lointaines.

Nos dernières affaire que nous avions amenées durant notre voyage avaient été déposée dans notre salon et c'est donc au milieu de tous ces cartons que ma mère et moi avons dîné la veille de la rentrée des classes.

Ce matin je me réveillais avec une boule au ventre, je n'avais pas hâte de retrouver ceux avec qui j'ai grandis et surtout de revivre l'existence morne et ennuyeuse de Thiercelieux. Heureusement que Félix était avec moi, nous n'étions qu'une dizaines d'ados pour toute la ville et j'étais la seule fille. A la maternelle et en primaire, j'aimais être la petite princesse mais dès le début du collège, les jeunes de Thiercelieux avaient adoptés les mauvaises manies de leurs aînés. Je subissait des moqueries en raison de mon statut de fille mais aussi à cause de ma personnalité intrépide de garçon manqué, chose assez banale après avoir grandis au milieu de garçons. Durant ces deux années à l'étranger, j'avais beaucoup changé physiquement, j'étais devenue vraiment jolie, en fait je m'aimais enfin après avoir vécu dans l'ombre, dans un milieu masculin. Mais, à l'intérieur, j'étais restée la même, la jeune fille rêveuse et nostalgique qui aimait se mettre en danger pour retrouver des sensations, et se sentir vivre. Depuis notre tout jeune âge, Félix et moi, on partait à l'aventure dans les forêts, dans des petits massifs montagneux. Je savais escalader à mains nues les falaises de petite taille et je connaissais comme ma poche les environs de Thiercelieux. Je n'avais jamais perdu cette soif de l'inconnu, et j'aimais, en Grèce, faire des randonnées seule, avec seulement la nature, bien différente qu'à Thiercelieux.

Enfin prête, je sors de chez moi et attrape mon vélo. Mon lycée est à 10 min, perdu au milieu des champs. C'est plutôt un complexe scolaire car il rassemble toutes les classes, de la maternelle au lycée. J'arrive devant la cour des lycéens et je range mon vélo dans le local, je rejoins Félix qui discute avec de jeunes collégiens. Les autres garçons de mon âge forment une bande, qu'on appelle ironiquement avec Félix la ''bande des génies'', la plupart sont les fils des familles fondatrices, les autres sont des fils de paysans; j'avais gardé un souvenir d'eux d'ados boutonneux et stupides mais lorsque je les aperçoit, à l'autre bout de la cour, je me rend compte qu'ils ont subit la même transformation que Félix. Ils étaient tous devenus grands, musclés, certains barbus et d'autres avec des capuches sur la tête. J'avais l'impression d'avoir en face de moi une équipe de rugby à qui, si je ne les connaissais pas depuis ma naissance, j'aurai eu plaisir d'admirer leurs talents et leurs abdos.

En observant cette bande, je vois qu'il y a un inconnu au milieu d'eux, en fait la ''bande des génies'' l'entoure. Ce garçon me fixe mais je n'arrive pas à détourner le regard, de loin, je ne vois qu'un grand brun en veste adidas et malgré la distance, je distingue ses yeux verts clairs, il demande alors quelque chose à ses potes en continuant de me fixer. Gênée, car il doit sûrement demander qui je suis, je demande également à Félix s'il le connaît. Il lui jette un coup d'œil sans trop lui prêter attention :

- Ouai, il est arrivé quelques mois après que tu soit partie, il s'apelle Samuel.

- Ah mais tu m'en a jamais parlé,

Je suis surprise car Félix me racontait un peu ce qui se passait à Thiercelieux pendant mon absence et jamais il aurait oublié de me parler d'un nouveau, chose rare quand même dans la région.

- Il n'y a pas grand chose à dire sur lui, c'est le fils de Benss. C'est un connard, comme son père.

Pendant que Félix parle, mes yeux dérivent vers lui, je me souvenais vaguement que le maire avait un fils mais j'avais oublié qu'il avait notre âge et surtout qu'il avait ce physique atypique. J'étais, quand même, surprise de la réaction aussi méprisante de Félix, en tout cas, il n'aimait pas ce Samuel et j'aurais compris pourquoi s'il n'était pas aussi beau. Il rigolait avec ses amis, ou je pourrais ses ''chiens'', et quand il replongea ses yeux dans les miens, il arborait un sourire arrogant.

Je détournais le regard, à contre cœur, lorsque Félix me proposa d'aller visiter la nouvelle bibliothèque. Au milieu des rayons, Félix prit enfin la parole, il était resté assez silencieux depuis que j'avais parlé de Samuel :

- Tu sais, depuis que tu es partie, y'a beaucoup de choses qui ont changée à Thiercelieux... Le maire et ses acolytes sont devenus très conservateurs après le départ de ta mère, en fait on est revenu au Moyen-Age, conclu-t-il.

Ça ne m'étonnait pas, le maire avait toujours hait ma mère, elle était cultivée, diplômée et ne se laissait pas faire face aux familles fondatrices traditionnelles.

La sonnerie retentit, et le temps de quitter la bibliothèque et d'arriver dans notre classe, la porte était déjà fermée. Lorsque je l'ouvrit, je vis notre prof principal, une prof toute jeune qui avait dû être muté ici par malchance.

- Bonjour, excusez-nous pour le retard, commençais-je...

La prof me fit un sourire timide, en disant que ce n'était pas grave, elle avait l'air rassurée de ne pas être la seule femme dans cette classe qui s'annonce difficile. Je commence à marcher vers une place de libre avec Félix sur mes talons, tous les garçons de ma classe me reconnaisse et j'entends quelques ''Putain c'est Rose'', ''Wesh Rose''. Au fond, je vois le Samuel, assis de manière relax avec un bras derrière sa chaise qui me regarde intensément avec un petit sourire en coin. Je le regarde de manière assez froide et va m'asseoir derrière lui avec Félix à la seule table de libre.

Les loups de ThiercelieuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant