Évangeline était une de ces jeunes filles toujours joyeuses, épanouies et sans problèmes. Elle adorait ses parents et sa petite sœur avec qui elle vivait et la jeune fille avait un petit ami, Yuuto, qu'elle aimait par dessus tout.
Un jour de printemps, Évangeline devait retrouvé son petit ami près du fleuve. Tellement pressée, elle partit en oubliant son sac. Elle se précipita donc chez elle, jurant contre le temps qui passait trop vite à son goût. Seulement en arrivant, la scène qu'elle découvrit la figea d'effroi: devant elle, sa maison brûlait, et sa famille était sûrement encore à l'intérieur. Elle esquissa un geste, mais une main ferme la retenue. Des larmes coulèrent sur ses joues sans qu'elle s'en rende compte et elle resta debout, à quelques mètres des flammes, sans bouger, tout en s'insultant. Elle ne pouvait rien faire et cela la mettait en colère. L'odeur du feu lui donnait le tournis. Elle entendit vaguement une voix désolée lui dire que s'il y avait des personnes à l'intérieur, il y avait très peu de chance de les retrouver en vie. Elle sentit une main prendre la sienne. Une main douce. Si douce... Elle s'évanouit.
Évangeline se réveilla en sursaut et se cogna contre Yuuto, qui lui épongeait le front.
"Tu as de la fièvre. rallonge-toi, s'il te plait." murmura-t-il d'une voix qu'il aurait voulut moins tremblante.
La jeune fille secoua doucement la tête et demanda d'une voix rauque:
"Et mes parents? Et Kitty, ma petite sœur? Où sont-ils?"
Yuuto la pris dans ses bras. Elle avait peur. Il lui demanda de ne pas pleurer. Les larmes lui montèrent aux yeux. Il murmura que l'essentiel, c'est qu'elle ne soit pas morte avec eux. Elle fondit en larmes. Peu lui importait l'ordre que Yuuto lui avait donné. Peu importait qu'elle lui déchire sa chemise. Peu importait la force avec laquelle elle le serrait. Peu importait ces "Pourquoi?!" qui lui faisaient mal à la voix. Peu importait qu'elle soit dans un hôpital, ou bien ailleurs. Elle avait tout perdu. Tout.
Yuuto tenta une dernière fois de la rassurer, lui disant qu'il serait toujours là pour elle, pour l'aider, la supporter, la réconforter, l'aimer jusqu'à la fin de ses jours. Oui, Yuuto était là. Un vague sourire se dessina sur ses lèvres. Même si elle n'était pas seule, quelque chose clochait. Seulement elle n'arrivait pas à définir quoi.
Évangeline sortit de l'hôpital le lendemain. Elle partit vivre chez sa tante, qui n'était presque jamais chez elle. Cela lui convenait. De toute façon, elle n'attendait plus grand chose de la vie. Elle restait cloitrée dans ce qui était désormais "chez elle" et ne vint plus en cours. Tous les jours, Yuuto venait prendre ses nouvelles, lui apportant les cours manqués, dans l'espoir qu'elle revienne un jour. Il espérait sans vraiment espérer. Il savait qu'elle ne reviendrait pas. Il n'avait pas tord, mais pas tout à fait raison non plus. Évangeline cherchait. Elle cherchait ce qui l'avait tant dérangée. Et un jour elle comprit.
Ce jour-là, elle décida d'en parler d'abord à Yuuto. Après tout, c'était lui qui était le plus proche d'elle, et le plus attentionné. Elle lui en parla. C'était un meurtre. Elle ne savait pas qui ni pourquoi mais c'était un meurtre. Il ne pouvait pas en être autrement. Il le prit assez mal. Elle ne sut pas pourquoi, et ça l'affectait terriblement. La seule personne en qui elle avait encore confiance lui avait tourné le dos. C 'était comme ça qu'elle le prenait. Cela ne voulait dire qu'une seule chose. Une chose qu'elle avait repoussé, chassé, sortit de son esprit. Elle avait refusé cette chose qui maintenant s'imposait à elle comme une fatalité. Ou plutôt comme une triste vérité. Un mélange de tristesse et de colère emplit son cœur. Désormais, plus rien ne la retenait. La jeune fille envoya un simple message à Yuuto: "J'ai quelque chose à te montrer. Viens à la sortie des cours". Maintenant, il ne restait plus que la touche finale.
Yuuto reçu le message d'Évangeline en pleine après-midi. Il hésita à s'y rendre immédiatement, mais se résigna. Si elle lui avait demandé "après les cours", c'est que rien ne pressait. Il se rendit donc chez Évangeline à l'heure prévue. Il voulait s'excuser de son odieux comportement. La porte était ouverte. Il rentra sans se poser de question. Pendant dix bonnes minutes, il chercha la jeune fille partout, sans pour autant la trouver. Il hurlait son nom à s'en décrocher la mâchoire et ne parvint pas à ouvrir la porte de la salle de bain. C'était donc ça! Elle prenait une douche! Non, c'était illogique, elle n'irait pas prendre une douche juste au moment où elle lui demandait de venir. Inquiet, il poussa la porte. Elle ne bougea pas. Un filet de sueur coula sur son front. Il donna un grand coup d'épaule. La porte s'ouvrit en fracas. Il se massa le bras douloureux avant de se figer d'horreur sur la scène qu'il voyait: Évangeline était penchée sur une baignoire remplie d'eau. Il s'approcha. Il heurta un papier sur lequel était écrit "c'est une vengeance, mais aussi parce que c'est inutile pour moi de vivre. Pardonne-moi". Il savait qu'elle savait. Il toucha le corps inerte d'Évangeline et tressaillit au contact du corps gelé. Yuuto se pencha un peu plus. Le bras de la jeune fille était plongé dans l'eau, couvert de coupures au poignet, et le sang s'était peu à peu versé dans l'eau. Une larme tomba sur le cadavre de la jeune fille. Il la serra contre lui, pleurant comme il n'avait jamais pleuré. Sa stupidité, sa lâcheté et son crime l'avait fait perdre celle qui lui importait le plus, alors qu'il lui aurait suffit d'être un peu plus courageux et de relever la tête.
Yuuto reposa le corps d'Évangeline comme il l'avait trouvé. Il saisit le scalpel qui gisait à terre et répéta les mêmes mouvements qu'Évangeline avait effectué auparavant. Il plongea lui aussi son bras dans l'eau, jeta la lame au loin, se serra contre la jeune fille et murmura:
"Attends-moi... J'arrive...."
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Ne m'abandonne pas
Short StoryParce que la vie a décidé que son bonheur avait trop duré. Parce que la vie a décidé de tout lui arracher. Parce que sa vie est cruelle. Parce que celle des autres ne l'est pas. Parce qu'elle est condamnée. Parce que les autres ont décidé de ne pas...