Gris céramique

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C'est au moment où je rentre chez moi que je reçois le SMS de Curtis. Je ne salue même pas mes parents et je fonce vers ma chambre, où le téléphone est collé sur mon oreille et mon corps jeté sur le lit. J'ai les yeux vers le plafond quand je patiente derrière les tonalités.

— Désolé d'avoir mis du temps, annoncé-je immédiatement. Je me suis payé le monde dans les transports en commun et j'ai dû laisser passer deux bus devant mon nez. Je viens de rentrer.

— Ça ne fait rien. Comment vas-tu, et ton cousin ?

Je me glisse contre les couvertures, prêt à tomber. Je fonds comme du chocolat dans un micro-onde. Il est beaucoup trop mignon de s'inquiéter comme ça pour moi.

— Moi, pas de problème, mis à par que je suis crevé de la journée assez riche en événements. Et mon cousin, il a l'air de bien aller, mais j'ai l'impression qu'il va exploser s'il reste encore dans cet endroit. Il a besoin de sortir, on se ressemble assez sur ce point.

— Et du coup, tu t'es dit que tu pouvais faire quelque chose, n'est-ce pas ?

Je respire profondément. Je suis un livre ouvert pour lui.

— Exactement. Je l'ai invité à manger un bœuf bourguignon chez nous dimanche midi. Faut encore que j'en parle à mes parents et qu'on fasse tous les papiers pour sa permission et que son père ne s'en mêle pas, mais en tout cas, j'espère que ça va le faire. Et...

Soudainement, j'écarquille les yeux et place ma main devant ma bouche.

— Merde, j'avais complètement oublié qu'on devait se voir dimanche aprèm... je suis désolé, Curtis ! Tu veux venir ? J'ai parlé de toi à mes parents et je suis absolument certain que mon cousin sera ravi de faire ta connaissance. Il ne faut pas du tout avoir peur de lui.

— C'est bon, je vais te laisser avec ta famille. Et... penses-tu que nous pourrons nous voir samedi après-midi ?

— Pas de problème ! Chez toi ou chez moi ? Ou même en ville si tu en as envie.

Un blanc me répond et j'ai peur d'avoir fait une bêtise. Mes yeux se déplacent à toute vitesse dans la pièce pour trouver quelque chose à dire.

— On peut vraiment aller où tu veux. Je sais que tu as besoin de sécurité. Que tu n'es pas trop à l'aise chez toi parce que tu as toujours peur que quelqu'un entre dans ta chambre alors qu'on plus proches que deux amis devraient l'être. Mais sans te mentir, t'as aucune inquiétude à avoir vis-à-vis de moi ou de mes parents. Ils sont super sympas et moi, je ne te forcerais pas à faire quelque chose que tu ne veux pas. Et je suis vraiment désolé si j'ai dit quelque chose de mal, ce n'était pas mon intention du tout.

— Il n'y a aucun problème, je réfléchissais simplement. C'est très gentil ce que tu dis et aussi que tu te préoccupes de ce que je vis. Je sais que pour toi, tes parents ont bien pris que je sorte avec toi. Mais les miens sont plus fermés et me font presque perdre mes moyens. Alors, j'ai peur qu'ils comprennent ce qui se trame entre nous et qu'ils me demandent de ne plus te voir. Parce que... ça va être dur de ne plus le faire.

Je rougis et me cache la tête dans un coussin.

— T'es trop chou à dire ça. Toi aussi, tu fais attention à moi, alors c'est tout naturel de te rendre la pareille. Tu préfères chez moi donc ?

— Oui. Je me sentirais plus moi-même.

— Pas de problème. Je suis pressé de te voir. Ça me soule de ne pas être dans le même lycée que toi.

— Moi de même. Et je...

J'entends du bruit de l'autre côté et le combiné qui se retrouve contre les vêtements de mon interlocuteur. Quelqu'un a dû venir le déranger. J'attends patiemment qu'il revienne vers moi pour qu'on finisse notre conversation.

Ciel de couleursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant