Lonely is so lonely alone

Chapitre 19 : Comment je sais tout ça ?

Putain c'est pas vrai !

Il a encore fait une faute stupide. Je ne sais pas pourquoi, le fait qu'il en fasse me met hors de moi. On dirait qu'il est distrait. Perdu dans ses pensées. Hors de notre monde. C'est horrible. Tout le temps la tête dans les nuages. Les profs ne l'interrogent même plus pour aller au tableau, puisque souvent il ne bouge pas de sa chaise et les regarde avec un air stupide. Pareil quand on fait l'appel. Michael, ce n'est pas lui. Il ne se reconnaît pas et parfois les profs le notent absent, ou laisse échapper un "le muet ?" pour savoir s'il est là ou pas. Je ne sais pas si c'est volontaire ou si c'est pour se faire bien voir des élèves mais ça fait bien rire la classe en tout cas.
J'essaie de lui prendre son stylo mais il le retient entre ses doigts. Agacé, je pose ma main sur la sienne dans le but de le faire écrire, et il sursaute à ce contact. Une grimace de dégoût déforme ses traits et un sentiment qui ressemble à de la colère s'empare de moi. Il a retiré sa main. Il se prend pour qui lui ?

- Fais attention, je lui chuchote, pas si bas que ça.

Il se remet à écrire, sa main sous la mienne, et je guide ses mouvements pour corriger ses fautes. Il grimace, mais cette fois, c'est de douleur. J'ai resserré ma prise pour lui faire comprendre que c'est pas lui qui décide. Mes lèvres s'étirent dans un léger sourire.

Il a décidé de se laisser faire.

Cette pensée me laisse pourtant un peu amer. Abandonner si facilement. C'est lâche.

[ ... ]

Je penche la tête sur le côté, en la regardant avec un sourire provocateur. Mes doigts s'avancent pour remettre en place une mèche blonde derrière son oreille. Elle est vraiment jolie.
Je n'écoute même pas ses bafouillements. Ça ne m'intéresse pas si elle parle d'un autre que moi. Et c'est le cas. Je baisse un peu la tête, jusqu'à poser mes lèvres sur les siennes. Elle ne bouge pas, n'essaie pas de se reculer. Au contraire. Elle approfondie le baiser. C'est assez bizarre : son corps sait qu'elle ne devrait pas, et il reste figé. Ce sont ses lèvres qui ne lui obéissent plus. Je me recule et elle reprend son air hautain. Quelle comédienne. Je sais bien qu'elle a aimé. Spencer, Spencer... N'essaie pas de cacher cette lueur d'envie que je vois dans tes yeux.

- Andy ! Attends !

J'étais parti en voyant son masque d'orgueil reprendre le dessus. Et comme prévu, Spencer m'a rattrapé. Cette fois, c'est elle qui m'embrasse.

Ses joues rouges n'auraient pu tromper personne de toute façon.

Encore une fois, c'est moi qui recule en premier. Une tignasse ébouriffée dépasse, là-bas, au coin du mur. Le muet. C'est pas vrai...

Bon, au moins il pourra pas balancer, je ricane dans ma tête. Mais on sait jamais.

Je fais un clin d'oeil discret au muet, histoire qu'il pense que je ne le vois pas comme une menace, et qu'il ne peut rien contre moi. Et je le pense vraiment. Dans tous les sens du terme, il ne peut rien contre moi.

[ ... ]

Tout le lycée a appris. Je m'en contrefous mais à un point ! La frustration m'envahit tandis que Mlle Spencer continue avec ses histoires de beau gosse. Me battre contre Justin, d'accord. Mais affronter un ennemi invisible, c'est plus difficile. Elle a accepté un rendez vous avec lui ! Non mais. Un rendez vous ! Alors que je l'avais embrassée dans la matinée. Qui peut être assez folle pour accepter un rendez-vous après ça ? Je sais que je suis ridicule.
Je suis pas jaloux, pas du tout. Mais la rage de ne pas être le préféré, d'être relégué au second plan comme d'habitude, me fait presque hurler. Je tourne les talons après avoir appris la nouvelle. Et me dirige droit vers le muet. Mon poing part sans que je ne puisse réfléchir.