La tempête se déclencha le lendemain, en début d'après-midi. Une histoire insignifiante à propos d'une torchère mal scellée qui eu le malheur de tomber aux pieds de la Dame du Fort. Mais ce fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase. Le malheureux esclave responsable de l'incident en pris pour son grade, après quoi ce fut les contremaîtres puis les soldats en train de jouer au dés, les officiers paresseux et le chef du convoi de ravitaillement trop lent. Même Oriane se vit chassée avec fracas des appartements seigneuriaux et dû se contenter de monter la garde au bout du couloir. Si le duc de Rimath était connu pour ses colères froides et sa rage polaire, celles de sa fille était bouillonnantes. En sa qualité de magicienne, celle-ci avait en plus la capacité de démolir murs et mobilier sur son passage.
Dans la soirée, le tumulte s'apaisa enfin et un silence inhabituel s'installa sur Fort Qualir. Chacun faisait le moins de bruit possible et filait doux.
Illiana avait eu la chance d'échapper à la tornade car elle remplissait les réserves de bois avec les bûches du nouveau convoi. Et sans qu'elle comprenne comment, elle se retrouva désignée pour apporter son dîner à la Dame du Fort. C'est donc avec une certaine appréhension qu'elle se dirige vers ses appartements. Arrivée à l'entrée du couloir, Oriane lui adresse une légère grimace d'encouragement, qui n'est pas pour la rassurer.
La porte est entrouverte et l'elfe la pousse avec précaution, le plateau dans une main. Elle a à peine le temps d'apercevoir le décor saccagé qu'un objet vole dans sa direction. Par réflexe, elle esquive le projectile qui s'écrase dans le couloir avec un bruit mat.
- Dehors ! hurle la magicienne sans se retourner.
- Maîtresse je ...
- J'ai dit, dehors !
Illiana sort précipitamment et se plaque contre le mur tandis qu'un vase traverse l'espace pour exploser contre le mur d'en face. En soupirant, l'elfe fait demi-tour. Au moins, elle aura essayé et s'en sera tirée indemne. Un bruit l'arrête. Quelque chose qui ressemble fortement à des pleurs. Elle fronce les sourcils et tend l'oreille. Il semblerait que son hypothèse se confirme. Elle revient sur ses pas, pose le plateau à une distance prudente de la porte et glisse sa tête dans l'ouverture. La jeune femme est assise au sol, au milieu du carnage, les genoux remontés contre la poitrine et sanglote.
Ce spectacle serre la gorge et le cœur de l'elfe, surtout quand elle se souvient de son rire d'hier. Lançant sa prudence aux oubliettes, elle contourne le canapé éventrée et la table basse fendue en deux pour s'agenouiller près d'elle et la prendre dans ses bras.
- Va-t'en, hoquète la magicienne en tentant de se dégager.
Illiana ne répond pas et se contente de la maintenir contre elle, ignorant la douleur sourde qui se manifeste dans sa tête.
- Laisse-moi, insiste la jeune noble, prisonnière de ses bras.
- Non, souffle l'elfe en resserrant son étreinte.
La punition ne se fait pas attendre et la souffrance broie son esprit sans pitié. Illiana serre les dents mais au bout de quelques instants, elle ne peut empêcher un gémissement de franchir ses lèvres. Dans la seconde qui suit, la douleur s'envole. La magicienne la regarde, un restant de colère dans ses yeux rougis.
- Pourquoi fais-tu ça ? l'attaque-t-elle.
- Parce que je préfère vous voir rire que pleurer, répond l'elfe instinctivement.
La jeune femme en reste coite. La différence de taille l'oblige à lever le menton pour la dévisager. Les yeux dans les yeux, Illiana voit clairement le moment où elle lâche prise à nouveau. Les larmes lui montent aux yeux et elle laisse échapper un nouveau sanglot avant de cacher son visage contre sa poitrine. L'elfe caresse son dos en silence, la laissant évacuer toute la tension et le chagrin qu'elle devine dans son cœur.
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Destinées
FantasíaElle est seule dans le noir, avec le bruit de ses sanglots et l'odeur de son propre sang. Elle est seule dans la lumière, avec le goût amer de son impuissance et le sol froid sous ses pieds. À l'heure où les épées et la magie écrivent une page de l'...