Embarquement

11 0 0
                                    

__________________________________________________

J'écris cette histoire sur un coup de tête, sans réelle structure à l'esprit, et je dois dire que je ne comptais pas spécialement la publier sous forme écrite. Mais si quelques personnes peuvent l'apprécier, et si je peux en profiter pour avoir quelques retours, eh bien pourquoi pas, voilà la première partie, et j'écrirai le reste... Un jour.

__________________________________________________

L'histoire d'aujourd'hui se passe par une froide soirée d'hiver. Le garçon dont il est question cette fois était étudiant, il prenait le train tous les jours pendant 1h30 pour aller suivre ses cours, et faisait le chemin inverse chaque soir, pour rentrer dans sa campagne profonde, sombre, brumeuse et perpétuellement silencieuse. Il n'y avait qu'une ligne de train allant jusque-là, et chaque soir, il était le seul à descendre au terminus. En fait, il avait le train pour lui tout seul pendant une bonne demie heure avant d'arriver chez lui, généralement. Pas que ça le dérangeait, ceci dit. Mais le fait de descendre d'un train vide, plongé dans le brouillard et avec pour seule lumière un petit lampadaire blafard au bout de l'unique quai d'une gare toute aussi vide que le train, aurait pu faire son petit effet auprès de personnes quelque peu impressionnables. Il en était conscient, c'était d'ailleurs son cas il y a encore quelques années, mais les humains ont fort heureusement la capacité de s'adapter, et s'habituer, à plus ou moins n'importe quelle situation. Ainsi il avait appris à apprécier cette obscurité glauque, cette odeur malsaine, ce froid presque surnaturel à l'intérieur de cette gare gothique inutilement grande pour son trafic. Il commençait même à y trouver une certaine forme de beauté, à vrai dire, une fascination pour cet endroit lugubre qui semblait figé dans le temps. Il en était venu à se dire que finalement, ce n'était pas plus mal que personne ne vienne jusqu'à cet endroit. Il aurait fini par perdre son atmosphère macabre pour une ambiance beaucoup plus quelconque, ce qui aurait été finalement assez dommage.

C'était donc un soir parmi tant d'autres, sur le chemin du retour : il montait dans un train presque plein, qui se viderait en l'espace de quelques arrêts, pour le ramener vers les ombres doucereuses abritant sa vieille maison collant parfaitement avec le paysage. Mais cette fois, alors que le train s'était presque totalement vidé de ses occupants depuis quelques minutes, il pila net, autant qu'un train puisse piler. Passé l'effet de surprise, le garçon ne s'inquiéta pas plus que ça.

Sans doute un animal sur les voies. Ou un Homme, d'ailleurs.

Il pensa qu'ils se remettraient en route d'ici quelques minutes, tout au plus. Et il avait raison : très exactement 4 minutes plus tard, le train se remit en marche, lentement, lourdement, avec tous les craquements et sifflements un peu inquiétants qu'on puisse imaginer pour une machine aussi vieille et massive. Après quelques instants, le train s'arrêta une nouvelle fois, beaucoup plus doucement.

- Décidément, on va finir par arriver en retard.

Après un moment, la voix du contrôleur finit par sortir du petit haut-parleur au-dessus de lui.

- Mesdames et messieurs, nous sommes arrivés en gare de *interférence*, les voyageurs ne sont pas autorisés à descendre des *interférence* voitures. Le personnel de bord vous souhaite encore une agréable soirée.

- Toujours aussi foireux, ces trucs.

C'est alors que le garçon se fit la réflexion qu'ils n'étaient pas du tout arrivés à une gare. Normalement, la seule gare restante sur le trajet était le terminus, et ils n'étaient pas censés y arriver avant une bonne vingtaine de minutes, au moins. En même temps que cette réflexion, il remarqua le froid ambiant, qui avait l'air de s'être accentué beaucoup plus vite qu'il ne l'aurait dû. Il nota alors qu'effectivement, le chauffage du train s'était coupé, et, plus que le chauffage, le moteur lui-même ne semblait plus tourner. C'était étrange. Il espéra que le train n'était pas subitement tombé en panne, et resta attentif à un autre message du contrôleur. Et il attendit. 10 minutes. 20 minutes. 30 minutes, qui lui semblèrent durer une éternité, passèrent, sans le moindre bruit à l'intérieur du train, sans le moindre mouvement, avec pour seule compagnie la morsure du froid nocturne qui envahissait peu à peu le monstre de métal.

Il décida alors de sortir son téléphone, et regarder sur Internet si le retard de son train était renseigné quelque part, dans l'espoir d'avoir un peu d'informations à se mettre sous la dent. Il ouvrit donc l'application dédiée aux chemins de fer, chercha dans la liste où était renseigné son trajet et... Rien. Aucun train vers sa destination n'avait été noté pour cette heure-là. Dans un soupir, il rangea son téléphone, remarquant au passage qu'il lui restait 54% de batterie, au cas où il devrait appeler quelqu'un. Ce qu'il n'aurait bien entendu pas besoin de faire. Bien entendu.

10 autres minutes passèrent. Puis 10 autres. Et toujours aucun message du contrôleur. Exaspéré, il décida de partir chercher les infos lui-même. Il se leva et commença à marcher vers l'arrière du train, dans l'espoir de croiser le contrôleur, le conducteur, ou toute autre personne susceptible de le renseigner. Il traversa 3 voitures, avant de se retrouver devant une porte fermée à clé, après quelques minutes de marche sans croiser âme qui vive. Il était arrivé au bout du train.

- Le contrôleur doit être à l'avant, je suppose.

Il fit donc demi-tour, pour refaire le chemin inverse, à travers des voitures toutes rigoureusement identiques. Le froid s'insinuait de plus en plus à travers ses vêtements. Après avoir traversé 5 ou 6 voitures, il trouva sur sa droite une fenêtre ouverte. Par acquis de conscience, il s'arrêta pour la fermer, et sentit alors une étrange sensation sur sa main devenue bleutée à cause du froid.

- De la chaleur ?

Malgré la nuit noire, la froideur ambiante faisait paraitre l'extérieur presque doux par rapport à l'intérieur du train. C'est là qu'il s'en rendit compte. Précisément, le froid semblait venir de l'intérieur du train.

Il était surpris, évidemment, mais il n'avait pas la tête à y réfléchir plus que ça. Il fallait qu'il trouve quelqu'un, dans ce train, qui serait capable de lui dire quand il pourrait rentrer chez lui. Il se remit donc en marche, traversant les voitures, poussant une porte après l'autre, et se disant que les chances de trouver le contrôleur dans la prochaine voiture augmentaient à chaque porte passée. Alors il marcha. Longtemps. Bien trop longtemps pour le nombre de voitures que semblait comporter le train. Il finit par s'arrêter, après une énième porte menant à une énième nouvelle voiture, rigoureusement identique à toutes les voitures avant elle. Commençant à s'inquiéter, il s'arrêta dans l'entrebâillement de la porte pendant quelques secondes. Son instinct lui disait de retourner sur ses pas.

- Juste pour être sûr.

Il se retourna donc, repassa cette même porte, marcha dans l'autre sens. Il eut rapidement la sensation d'être suivi, comme n'importe qui passant un peu trop de temps seul dans un endroit qu'il ne connait pas. Il hâta donc le pas, pour... Pourquoi, d'ailleurs ? Qu'essayait-il de trouver en revenant en arrière ? Il n'eut pas le temps de trouver une réponse, car à la 3ème voiture, qu'il retraversa, il se retrouva... Devant une porte fermée à clé. Il était arrivé à l'arrière du train. Encore.

En première classe pour un long voyageWhere stories live. Discover now