Le vent s'échouant sur ce bout de papier et nos respirations sont les seules bruits qui perturbent le silence qui nous enveloppe, et qui semble durer depuis une dizaine de minutes. Peut-être plus ou peut-être moins, je ne sais pas. Mais le temps qui ne m'importait plus depuis longtemps, m'est devenu primordial en cet instant. Comme une renaissance.
Car il est toujours là, debout face à moi, le bras tendu dans ma direction. Ces yeux indéfinissables ou presque me fixent toujours et m'encouragent à dire quelque chose. Mais mon esprit ne pense qu'à deux choses: ses premières paroles qui sont les premières de ma vie et ses yeux bleus et encore plus. Et que pourrais-je bien dire? Même si j'ai espéré ce moment, je ne l'avais en fin de compte jamais réellement attendu, étant devenu trop illusoire. Mais ce n'est que la réalité.
Je sors subitement de ma contemplation et réfléchis à toute vitesse à une réponse, ne voulant pas laisser échapper ce moment précieux. C'est la première fois que je vais avoir une discussion avec quelqu'un, du moins de matériel si je ne compte pas mon amie la nuit. Que suis-je censée répondre? "Comment as-tu trouvé ma lettre? Comment es tu arrivé ici? Comment tu t'appelles?" Ou est ce que je dois tout simplement lui dire "Bonsoir, comment ça va?". Ou peut être que je suis supposée ne rien dire? Pourtant il attend quelque chose!
- Est-ce que tu es un ange?
Cette question m'a échappé dans un murmure, comme si j'avais peur de le faire fuir. Ses yeux et ses mots tournant en rond encore et encore dans ma tête ne m'ont permis que de formuler cette question. "Ridicule" pensais-je au plus profond de moi même et en me frappant mentalement.
Je sursaute légèrement lorsqu'il se décide à bouger de nouveau, pour abaisser son bras et regarder le ciel, comme s'il recherchait quelque chose. Je reprend le contrôle de mes mouvements et m'avance prudemment à son côté, pour tenter de comprendre ce qu'il est en train de faire. Je garde tout de même un bon mètre d'écart entre nous, et je regarde à mon tour le ciel. Je ne vois que la Lune et les étoiles, rien d'autres...
Il relève de nouveau le bras et penche sa tête de mon côté, ce qui me provoque un petit mouvement de recul avant de revenir doucement à ma place.
- J'étais juste là, et tu m'as appelé, déclara-t-il.
Je tourne mon regard vers lui, perplexe.
- Donc en quelques sortes, je suis un ange si tu veux, continua-t-il sans voir mon incompréhension. Tu m'as appelé et elle m'a permis de descendre pour t'aider.
Il se retourne vers moi, et me sourit comme si tout cela était tout à fait normal.
- Tu... tu étais là, bégayais-je en regardant une nouvelle fois le ciel étoilée avant de revenir sur lui pour voir qu'il hochait la tête. Mais là où?
Il soupira en secouant la tête, mi-amusé, mi-agacé.
- T'est-il si impossible de croire que je viens du ciel, et que je tiens entre tes mains l'unique lettre que tu as écrite, dit-il en me montrant le bout de papier toujours présent dans sa main, pour t'aider?
- Mais... je ne comprends pas. C'est impossible, non?
- Aussi impossible et impensable qu'une jeune fille amnésique, invisible et inconnue de tous qui désespère de jour en jour de vivre?
Je le considérais un instant. Après tout, pourquoi je n'aurais pas le droit d'y croire? Je repris une grande inspiration en lâchant un petit rire nerveux.
- Mais je ne comprends pas... Qui t'a permis de descendre?
- La Lune évidemment, rigola-t-il avant de croiser mon regard perdu. Enfin, oui c'est la Lune. Tu sais, elle écoute tous les soirs, toutes les prières des personnes perdues, tristes ou abandonnées. Comme toi. Et elle a pensé que tu avais assez souffert, et quand tu as demandé son aide, elle m'a envoyé ici, pour toi.
- C'est, c'est vraiment... Attends... Cela veut dire que durant toutes ces années, je n'avais qu'à lever la tête et demander?
Il hocha la tête avant de me donner la lettre. Je la gardais entre les mains, et effectivement, il s'agissait bien de ma lettre. J'eu alors un déclic.
- J'ai compris. Tout ça n'est qu'un rêve! Je vais me réveiller sur ce banc, et je serais toujours aussi seule dans le vrai monde, c'est ça?
- S'il te plait de croire que c'est un rêve, d'accord. Mais un rêve reste réel, tu ne penses pas?
Je ne comprends pas où il veut en venir. Il se met dos à moi et commence à s'éloigner. Et avant de totalement disparaître dans l'obscurité, il se retourne vers moi et ses yeux me transpercent une nouvelle fois.
- Si je ne suis qu'un rêve, on ne se revoit pas demain à la même heure, au même endroit, rien que toi, moi et la Lune, n'est-ce pas? Dit-il en me faisant un clin d'œil malicieux.
Je reste quelques secondes figée dans ma position avant de fermer les yeux fortement. Est-ce que je viens de trop rêver? Je rouvre les yeux et m'allonge mollement sur le banc pour m'endormir sans plus réfléchir.
Je me réveille brusquement sur ce même banc alors que l'aurore commence tout juste. La lune est encore visible ainsi que quelques étoiles. Je sens dans la poche de ma veste un papier, et intérieurement, je sais que c'est ma lettre et que je n'ai pas rêvé.
Le début de ma vraie vie va finalement peut être commencé.
Et en regardant pour je ne sais la combientième fois le ciel, je souris vraiment depuis bien longtemps. L'étoile combattante est de nouveau à sa place. Mon étoile est là. Mon ange est là et descendra.
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Juste une petite histoire
Короткий рассказJe n'ai besoin que d'un peu de lumière dans mon obscurité. Je n'ai besoin que d'une lueur d'espérance dans mon monde. Je n'ai besoin que d'une toute petite étoile, aussi peu brillante soit-elle, pour que je comprenne que je n'ai besoin que d'une seu...