L'esclavage n'est pas humain

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Marchant d'un pas alourdi par l'accumulation de la fatigue, par le long voyage dans les cales du bateau et par l'épaisseur du sable mouillé, des prisonniers, débarqués sur une île déserte, aperçoivent au loin, la mort.

Liés par des draps emmêlés, noués dans tous les sens, ils parcourent ensembles le chemin de leur destin, sans même vouloir l'affronter.

Derrière eux, le bateau les ayant largués sur ce territoire perdu au beau milieu de nulle part, commence à hisser les voiles pour repartir. Son équipage, refusant de faire preuve de pitié, ne laisse rien à ces pauvres hommes : ni de quoi se nourrir, ni même de quoi s'abreuver, ne serait-ce que pour s'humecter les lèvres dont le dessèchement laisse déjà apparaître de profondes crevasses.

Une centaine de mètres plus loin, le bateau ne forme plus qu'une ombre à l'horizon. Le sable, à présent sec, semble plus abondant et pénètre maintenant plus facilement dans les chaussures usées des prisonniers. Le premier tombe.

La tête enfouie dans le sol, le nez plongé dans le sable, l'obligeant à inspirer de minuscules grains, les jambes paralysées : son cœur s'arrête de battre. Il se fait traîner par les compagnons qui ne peuvent le détacher de ce nœud infernal, formé par un solide tissu.

Un poids supplémentaire à tracter pour des prisonniers qui peinaient déjà à se déplacer.

Le paysage change. L'eau qui jusqu'alors les entourait, disparaît, laissant place à un grand désert recouvert à certains endroits de branches mortes, de fragments de roches. La mort se rapproche. Elle fait une seconde victime. Essayant de se relever, l'homme se brise l'os du bras droit, fragilisé par le manque de calcium, la douleur étant insupportable, la mort l'emporte rapidement.

Au fur et à mesure de leur avancée vers l'intérieur de l'île, les prisonniers tombent un à un jusqu'à ce qu'il n'en reste plus qu'un seul en vie.

N'étant pas capable de progresser avec le poids des cadavres, il se résigne à s'asseoir. Il contemple le lieu dans lequel la mort va le rejoindre. Après un long moment de réflexion, il entasse les corps jonchés sur le sol, puis symboliquement, s'allonge sur eux.

- « Nous étions unis dans la misère, sur la même galère, nous le resterons dans la mort. »

Quelques minutes plus tard, il s'endort.

Les prisonniers du désertOù les histoires vivent. Découvrez maintenant