Soirée

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Tranquillement, les feux de la nuit s'installent. La musique monte dans les crescendos en même temps que les heures passent, pour nous laisser en tête à tête avec le présent. Au début, la timidité prend sa place dans le creux des gens, elle fait balancer les yeux de droite à gauche puis laisse échapper des sourires nerveux. Ce long silence fini par s'éteindre lorsque les packs s'ouvrent et qu'on entend des « tching » dans la pièce.

Une nouvelle dimension soudain apparait dans un brouillard. Les voix s'amplifient et des rires francs sortent de la bouche des invités, commençant à danser sur le rythme entrainant. Le premier verre était dur et lourd, restait dans la gorge, mais un deuxième arrive bien vite, puis les mains frénétiquement se passent les bouteilles toutes souriante. La cohue prends la place qu'elle attendait tant, entre les pas des danseurs. Le sol tourne ou peut-être est-ce le ciel, la terre, la vie qui prend une pause.

On s'amuse comme les autres, les bras et la tête en l'air, le front commençant à transpirer et les joues rougissantes. On ne se connait pas, pourtant on se saute au cou, tombe les uns sur les autres, avant de lancer un éclat de rire toujours plus mélodieusement alcooliser. On sent notre corps perdre ses repères, tanguer entre la Vodka, le Rhum ou bien le Whisky. Tout de plus en plus lent ou de plus en plus rapide, on ne sait pas : on ne sait plus. Des émotions intenses traversent notre esprit, chaque pensée est dite, comme si rien n'avait plus d'importance, à par le rythme. Même lorsque nous tombons la douleur s'évapore, n'arrivant plus à nous atteindre. On se relève à l'aide de notre foie, le Macgyver de l'organisme, qui transforme l'alcool en éthanal puis en acide acétique.

La douce sensation ne s'arrête jamais, pourtant nous voulons toujours sentir plus, s'imbiber plus, pour oublier cette vie sans plus.

Dans certain cas les démons nous rattrapent, nous n'avons plus envie de rire mais de pleurer, de laisser s'échapper les émotions que nous avons toujours trop retenu. Alors on parle, on s'agrippe à la personne qu'on connait le mieux, sans gêne, dans la débauche la plus totale : on se laisse aller.

On sent le retour à l'enfance, même nos expressions sont enfantines, et on pleure pour des caprices. On se sent seul, abandonné alors que l'autre nous tient la main. Nous avons changé de dimension, encore une fois, mais pas pour les mêmes raisons, puisque nous virevoltons dans le passé et non dans l'instant présent. L'Alcool n'est plus notre ami, mais le sérum de vérité qui prend possession de nos veines. Nous ne sommes plus qui nous sommes, mais nous sommes ce que nous étions.

La bouteille, comme nous, a cessé de sourire, pourtant on se laisse entrainer à son goulot dégoulinant. Nous sommes imbibés de la tête aux pieds, prêt à être mangé, mais par qui ou par quoi ? De toute façon nôtre corps ne peut plus contrer, devenant dépendant, assisté dans ses commandes les plus primaires. Nous tombons sur le sol de la honte, le crâne fracassé, l'esprit vide, abandonné par l'existence, sous les rires eux aussi gorgés de liqueur amer. Ce n'est plus la joie de la fête, mais le délire de l'Homme sou qui nous prends comme une vague décuveuse.

Le foie ne nous relève plus, il pousse le bouton d'alerte provoquant une hémorragie buccale. La réalité devient alors rêve, la Vodka ne nous sauvera pas cette fois, ne nous chantera pas de berceuses.

L'Inconscience est maintenant notre seul remède.      

écume d'émotionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant