Un nom de fille, un nom de garçon.

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Sihem.

Comme un murmure dans ma tête.

Sihem.

C'est mon nom. Ou mon surnom. Ma manière d'être. Moi. Ma personnalité. Personne ne pourra me l'enlever. A ce moment précis, je ressens de la haine au plus profond de moi. Cette haine se transforme en migraine. Tellement forte que j'ai l'impression que je vais vomir. Tellement forte que j'en ai des hallucinations auditives. Un bruit sourd, répétitif, qui résonne dans mon crâne. Dans mes oreilles. Est-ce vraiment une hallucination ? Je n'en suis plus si sûre.

Sihem.

Un nom de fille, un nom de garçon. Un nom de fille ou un nom de garçon ? Je ne sais plus. Je me le répète à mi-voix, juste pour être sûre que je pourrais m'en souvenir.

- Sihem. Sihem. Si-hem.

J'ai si peur de l'oublier. Il ne me reste plus que ça. Mon nom.

Si-hem.

Le bruit continue entre mes oreilles. J'ai l'impression de ne plus avoir le contrôle de mon corps. Mes doigts me paraissent loin, si loin, tellement loin. Engourdis, je tente de les bouger, je ne sens rien. J'ai l'impression que je viens de me noyer. Mes pieds ? C'est la même chose. J'ai la vague impression d'être allongée. Mes yeux ne s'ouvrent pas, ils ont l'air scellés. Dans ma bouche, où mon prénom se meurt à petits feux, où ma voix se tait, j'ai un goût salé. Il me rappelle quelque chose. Quelque chose... Mais quoi ?

C'est à ce moment-là que je me souviens. Je me souviens que je ne me souviens de rien. Prise d'une soudaine panique, je commence à suffoquer. Mon souffle se fait de plus en plus fort, de plus en plus lourd. Ma poitrine se soulève, se baisse, se soulève. J'ai mal. J'ai tellement mal. Et encore mal. J'ai l'impression de saigner. De saigner du cœur, du corps. La peur me prend aux tripes. J'ai tellement peur. Pourquoi c'est vide comme ça dans ma tête ? Je veux me souvenir. Je dois me souvenir. Je ne comprends rien. Au bout de quelques minutes, ma respiration se calme. Je suis bien réveillée maintenant. Mes doigts engourdis bougent, mes pieds aussi. J'ouvre les yeux.

Autour de moi, c'est très sombre. Je ne distingue pas grand-chose. Des taches rouges qui bougent, qui dansent autour de ma tête. Je suis dans une sorte de cage. Une cage qui monte. Je passe ma main sur mon cœur, je ne saigne pas. Je passe ma main sur mes oreilles, je ne saigne pas. Je respire profondément et m'assoit doucement. Mon dos me fait souffrir. C'est affreusement flou, ici. Mais j'ai la sensation que c'est normal, ça ne me dérange pas plus que ça. Comme si j'étais habituée. Peut-être est-ce le cas ?

Ma main droite rejoint mon avant-bras gauche et commence à tapoter dessus à intervalle régulier. Le pouce sur le côté, les autres au dessus. L'index et l'annulaire. Deux syllabes. Sihem. Mon nom. Ça fait du bien de ressentir cette sensation sur mon bras. J'ai l'habitude.

Autour de moi, des caisses de bois, toutes fermées. Elles me font me souvenir. Elles me rappellent des sentiments, des voix. Quelque chose s'agite dans mon crâne, comme un souvenir qui veut s'échapper. Mais qui n'y parvient pas.

Tandis que la situation stagne, j'essaie de me lever. La cage est petite, je tiens à peine debout dedans ; je ne suis donc pas très grande. Tandis que je tourne sur moi-même pour observer les caisses, quelque chose flotte autour de moi, tombe devant mes yeux, pèse sur ma tête. Mes cheveux. Mes longs cheveux bruns. Ils me gênent, et quelque chose me dit, là tout de suite, que je dois m'en débarrasser, immédiatement ! Je sens la panique renaître en moi. Mes doigts fourmillent, comme d'impatience. Je m'approche de la caisse la plus proche et l'ouvre, non sans difficultés. Mes ongles, bien trop courts pour ce genre de tâches, ne me sont pas d'une grande aide. Une fois la caisse ouverte, je me penche à l'intérieur. J'en sors quelques boîtes de conserves. A grande évidence, elles ne me serviront à rien. Sans grand ménagement, je les laissent tomber sur le sol grillagé. Au fond, tout au fond, dans une mallette, plusieurs couteaux. J'en sors un et le regarde attentivement. La lame est parfaitement aiguisée. Doucement, tout doucement, je prends la première mèche de cheveux qui se présente à moi, et glisse le couteaux en dessous. Je n'ai presque pas besoin d'appuyer, que mes cheveux tombent au sol d'eux-même, traversent le grillage, et disparaissent dans l'obscurité. Au fur et à mesure que je me les coupe, je sens ma tête s'envoler, je sens mon cerveau plus libre. C'est une magnifique sensation.

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⏰ Dernière mise à jour : Mar 18, 2018 ⏰

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