Clément.
Le point de rendez-vous, non loin du parvis de l'église, est seulement à quelques minutes à pieds de notre appartement. Ma mère a donc décidé de ne pas utiliser la voiture, ce qui n'a fait qu'accentuer ma mauvaise humeur et mon refus de partir.
Sur le chemin, elle sourit à tout le monde, comme si c'était le plus beau jour de sa vie. Quelques mètres derrière, je traîne des pieds, le regard dans le vide, tenant à bout de bras ma grosse valise peinant à rouler correctement sur les pavés.
De temps à autre, ma mère se retourne vers moi avec un regard pétillant qui ne manque pas d'augmenter encore un peu plus mon exaspération. Si elle savait que je ne fais pas ça pour elle. Que je fais ça pour fuir. Fuir la douleur.
Si elle savait.
Deux jours plus tôt.
Ce repas fût un désastre. Je n'arrive pas à croire que j'en sois sorti vivant.
Durant tout le déjeuner, alors que j'avais simplement envie de dormir, Zoé n'arrêtait pas de me fixer de ses yeux de vipère. La seule idée de savoir qu'elle sait ce que je cache et qu'elle peut le révéler à tout moment me terrifiait. Je me forçais d'avoir l'air naturel mais j'étais incapable de soutenir son regard.
C'est donc avec soulagement que je regarde leur voiture s'éloigner tout en les saluant de la main. J'ai bien crû que je n'y survivrai pas.
- Tu t'es bien entendu avec la petite ? Ses parents ont raison, elle est absolument adorable ! s'exclame ma mère de sa voix enjouée habituelle.
- Bof.
- Normal, tu ne fais aucun effort, grogne mon père tout en l'aidant à débarrasser la grande table du salon.
C'est sûr que toi, tu en fais des efforts pour draguer la charmante mère de Zoé sans que Maman ne le remarque. Il m'exaspère. Leur petit jeu saute pourtant aux yeux mais ne semble déranger personne.
Exténué, je marmonne un « j'vais dormir » que je suis le seul à entendre et retourne dans ma chambre, mon havre de paix. Là, je m'écroule dans mon lit et fixe le plafond, pensif. Zoé sait-elle vraiment quelque chose sur mon passé ou testait-elle ma réaction ? Je ne peux pas laisser planer le doute et prendre le risque de laisser de telles informations dans la nature. Je décide donc de lui envoyer un message, profitant d'une poussée de courage que je sais éphémère.
Qu'est-ce que tu crois savoir à mon propos ?
A peine envoyé, les trois petits points apparaissent et une réponse ne tarde pas à arriver.
Tu le sais bien.
Arrête tes devinettes. Je pense que tu ne sais rien.
Alors tu as tort.
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Destination : Vie Parfaite
JugendliteraturE N P A U S E Un bus. Une carte. Un pays. Six adolescents. Six histoires. Six secrets. "Mesdemoiselles, messieurs, merci d'attacher vos ceintures. Les turbulences de la vie risqueront de secouer le navire durant quelques années mais, pas de paniqu...