F*ck it List

Chapitre 7

Dans ma chambre je fais les cents pas, le coeur au bord des lèvres.

Mais qu'est-ce qui m'a pris ? C'était trop tôt, beaucoup trop tôt...

Je n'aurais jamais dû écouter Luc, lui et ses GRANDES idées... Ce n'est pas pour rien s'il est toujours célibataire. Les affaires de coeur et lui, ça fait deux. Rah ! Je l'entend encore me dire, tout à l'heure " Si tu ne fais rien, tu va te faire souffler la place par une de ces pimbêches qui lui tournent autour. Une qui n'aura pas peur, elle, de faire le premier pas." Sur le moment, ça m'a paru être un bon conseil, plutôt logique, et j'avais déjà mon idée de la manière de le mettre en pratique sans traumatiser l'asociale que je suis. Mais je dois bien admettre que, maintenant que c'est fait, je regrette. 

Parce que, tant que je n'avais pas agis, je pouvais toujours me persuader que l'attirance était réciproque. Et s'il me confirmait ce que je crains, au fond ? Que tous ses regards ne signifiaient rien. Comme son clin d'oeil, la première fois qu'on s'est croisés au diner. Et si, cette fois, c'était pareil ? 

Peut-être que j'ai fait fausse route, et que mon geste n'aura eu pour effet que de me confronter à la réalité plus tôt que prévu.  

Bon sang, je me demande pourquoi je me met dans un tel état. Ce n'est qu'une demande d'ami sur Facebook... Une simple formalité qui n'engage à rien. Tous les jours, des milliers de gens s'ajoutent sur la plateforme sans qu'ils se mettent dans le même état que moi. Pourquoi moi je n'arrive pas à me défaire de ce stress qui me colle à la peau depuis que j'ai appuyé sur le bouton envoyer. S'il refuse, je pourrais toujours prétendre avoir agis par bonté d'âme. Oui voilà, cette demande, c'était juste pour l'aider à s'intégrer à son nouveau lycée...

Je me laisse tomber sur mon lit en soupirant, la tête entre les mains.

De qui je me moque ?

Dans ma tête, ça n'avait rien d'une formalité. A peine rentrée du lycée, je me suis précipitée sur sa page Facebook, et dès que je m'en suis sentie le courage, j'ai sauté le pas. Je dois me rendre à l'évidence, pour la première fois depuis que j'ai atteint la puberté, un garçon me plaît VRAIMENT et je ne sais pas gérer.

Mais alors, pas du tout.

Je suis censée faire quoi, maintenant ? Attendre sagement qu'il veuille bien me répondre, ou forcer le destin et lui envoyer un message privé ?

Non, non, non. Je passerais pour une cinglée portée sur le harcèlement. Je veux le séduire, pas le faire fuir.

Je sais que je dois me montrer patiente, mais j'ai envoyé ma demande il y a plusieurs heures maintenant et j'ai déjà fait tout ce qui était à ma portée pour me maintenir occupée. J'ai préparé le repas, répondu aux nouveaux commentaires arrivés dans la journée, mangé, continué à retoucher mes photos de vacances, grignoté un petit encas sucré devant ma série. Rien de tout ça ne m'a permis de me changer les idées. Me voilà donc, aux portes de la nuit, l'estomac au bord de l'explosion et les nerfs en pelotes.

Il n'y a pas que mon attraction naissante pour un membre du sexe opposé que je ne sache pas gérer, le stress, en règle générale, non plus. Alors que certains ont l'appétit coupé par ce dernier, chez moi, la tendance est inversée et à la moindre angoisse j'entre dans une phase boulimique qui me pousse à ingurgiter tout ce qui me passe sous la main, pour peu qu'il contienne du sucre.

Les yeux clos, j'adresse une prière silencieuse à celui qui me mets la tête sens dessus dessous.

Shawn, je t'en supplie... pour mon bien-être mental et l'intégrité physique de mes jeans, réponds-moi, avant que je n'enduise les rideaux de confiture et que j'en fasse mon goûter.