Chapitre 12

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Tranquillement installé sur le canapé, Luc me regarde tourner autour de lui, sans se laisser atteindre.

L'incompréhension. La colère. La soif de vengeance. Toutes ces émotions, qui se bousculent en moi et ne demandent qu'à sortir, sont totalement étrangères à mon meilleur ami.

Et en un sens, ce n'est pas plus mal. Si nous nourrissions les mêmes rancoeurs et la même hargne, le cocktail serait détonnant. Par chance, nous nous complétons de ce point de vue. Là où je m'emporte et cherche à tout révolutionner, il reste stoïque et réfléchi. En revanche, quand il se laisse happer par la colère sourde qui bouillonne en lui, c'est moi qui deviens la voix de la raison. Nos déclencheurs divergent, mais le soutien que nous nous apportons nous permet de traverser la crise sans trop de dégâts.

Bien qu'il existe des dynamiques plus saines que notre "Relai de fureur", elle nous convient très bien. Je suis son Ying, il est mon Yang, et vice-versa.

Même si, pour une fois, je doute du fait qu'il parvienne à me calmer.

- Cette fois, il faut frapper fort, marmonné-je

- Jamiroquai, tu t'emballes pour rien, souffle-t-il en se laissant tomber contre le dossier du sofa.

Mais, il se moque de moi ? Furieuse, je fonds sur lui, arrache le coussin contre lequel il est appuyé et le frappe au visage avec.

- Je m'emballes ? Et ça, je l'ai inventé peut-être ? 

Sous son nez, j'agite le message que Cooper m'a envoyé : [ Un conseil, arrête de faire chier Madison...]

- Là, regarde, dis-je en désignant les points de suspension. Tu sais ce que ça veut dire ? Parce que sinon je t'explique, moi. ARRÊTE DE FAIRE CHIER MA COPINE OU...

- Ou quoi ? m'interrompt-il, visiblement lassé.

- Ou je te casse la gueule, voilà !

Luc me toise, le sourcil arqué et les bras croisés. Il n'a pas besoin de parler pour que je comprenne ce qu'il insinue, c'est écrit en gras sur son front, tant le regard qu'il me lance est expressif. Ses lèvres sont peut-être scellées, mais toute son attitude me hurle " Tu te fais des films, ma vieille".

- Sérieusement, Jamie, tu crois vraiment que Cooper te menacerait physiquement ? Si tu veux mon avis, ses mots sont à prendre au pied de la lettre. C'est un conseil.

Il appuie volontairement sur ce dernier mot, comme s'il essayait de le faire entrer de force dans mon esprit, mais je balaye sa remarque d'un revers de main.

- Arrête un peu. Cooper Sanders ne donne pas de conseil. Il se fout de tout et de tout le monde. Il n'y a que sa petite personne qui l'intéresse.

- Justement. Tu le connais un peu, quand même, et tu trouves que ça lui ressemble de défendre Madison ? C'est le dernier à entrer dans son jeu, d'habitude.

Il n'a pas tord. Cooper a déjà fait des crasses à d'autres élèves. Souvent. Mais je ne me souviens pas l'avoir vu s'en prendre à quelqu'un. Physiquement. Des blagues de mauvais goûts, des remarques déplacées et des surnoms obscènes, ça, oui. 

- C'est vrai, mais essayer de me raisonner, ça ne colle pas vraiment avec le personnage non plus. Donc, quitte à sortir des sentiers battus, il me semble logique qu'il cherche à se ranger du côté de sa petite-amie.

- Ça a l'air de te mettre plus en colère que le message en lui-même...

Je ne sais pas ce qu'il insinue, mais je n'aime pas la tournure que prend la conversation et je compte bien lui faire savoir. Bras croisés, je le fixe avec défiance et crache presque:

F*ck it ListOù les histoires vivent. Découvrez maintenant