Mon mal de fesses carabiné m'indiquait que le temps passé sur ma selle suffisait pour moi et qu'il fallait que je m'arrête. Elle était assez confortable et faîte pour les longs voyages, mais mon derrière était moins habitué que je ne l'aurais voulu. Je n'ai jamais monté plus de quatre heures d'affilée, ce qui est le cas actuellement à mon plus grand désespoir. Par un coup d'œil vers le haut, j'aperçus le soleil à travers les branchages qui m'indiqua par sa position la mi-journée. Le temps étant clément aujourd'hui, je choisis donc de me reposer dans une clairière adjacente. Sûrement lui aussi fatigué par ce long trajet, mon destrier m'y conduisit au petit trot. Les arbres s'espaçaient au fur et à mesure que nous nous rapprochions du but, laissant la lumière passer de plus en plus. Je me dirigeais vers l'étendue de verdure, quittant la pénombre du sous-bois, mes yeux plissés par la luminosité. Je mis du temps à m'y accoutumer, les sourcils froncés et les pupilles réduites à deux minces fentes verticales.
La clairière formait un large espace herbeux illuminé, comme si une force avait interdit tout arbre d'y pousser. Un immense tapis bleu-mauve en recouvrait élégamment le sol. Les multiples fleurs s'amassaient les unes contre les autres, si denses que l'on ne pouvait marcher entre. Les plants, recourbés en forme de cloche, semblaient comme regarder vers le bas. Sur chaque tige, regroupés en grappe, les pétales colorés arrondis au niveau de la corolle formaient une trompette. Je les touchais du regard un instant avant de continuer ma route. N'étant maintenant plus à l'abri des ramures, le soleil nous caressait de ces rayons chaleureux. J'en profitais, les paupières fermées, le visage en direction du ciel, me laissant guider. La légère brise de la forêt n'était plus qu'un simple souvenir, je cherchais un coin à l'orée du bois et trouva un grand chêne.
L'enivrante odeur des jacinthes sauvages au nez, je descendis de ma monture d'un bond. Je la laissais paître tranquillement avant de me hisser sur la branche basse du feuillu. Celle-ci ploya sous mon poids le temps que je m'installe confortablement - si cela pouvait être possible. La branche entre les cuisses, je sortis de ma sacoche de cuir une pomme et un bout de pain afin de me rassasier après cette longue route. Je mangeais avec lenteur pour d'apprécier au mieux les saveurs du fruit jutant sur mon menton, que j'essuyais d'un revers de manche. La nourriture calant maintenant mon estomac, je m'adossais au tronc épais, les pieds relevés sur la branche, afin de contempler la vie de la forêt. Le vent faisait bruisser les feuilles et onduler mes longs cheveux châtains devant mes yeux. Je les attachais rapidement d'une lanière de cuir récupérée sur mon poignet avant de me réadosser. Bercée par le gazouillis des oiseaux et le chant du vent, je me laissais endormir tout en admirant la canopée au-dessus de ma tête.
Un sursaut me tira de mes rêves de façon un peu trop brutale à mon goût, me faisant presque tomber de mon perchoir. Je me rattrapais in extremis évitant ainsi une chute douloureuse puis me laissa atterrir avec souplesse sur la terre meuble. Déjà que mon fessier n'avait pas apprécié la balade, il n'affectionnerait sûrement pas d'échouer sur le sol aussi brusquement. Mon cheval hennit de mécontentement d'avoir été dérangé de la sorte. Je grognais donc dans sa direction en tirant la langue. Ce n'est pas de ma faute si dans mes songes je tombais lamentablement dans le vide pour je ne sais quelle raison. Je récupérais mon paquetage et la bride de ma jument pour aller à la recherche d'un ruisseau afin de me désaltérer. Seules mes oreilles à l'ouïe surdéveloppée me permirent de le trouver facilement. Penchée au-dessus de l'eau, les genoux plantés dans le sol mou de la berge et les mains en coupe, je bus goulûment avant de m'asperger le visage. Lua, ma monture, fit de même. L'eau fraîche dégoulinait encore sur ma peau lorsque je repris mon trajet.
Le matin même, un au revoir déchirant s'était passé entre Elanor et moi. Comme elle allait dans une autre école que moi, nous ne nous verrions qu'après le premier trimestre. Elle avait mis les boucles d'oreilles que je lui avais offertes contrastant la couleur de ces cheveux et rappelant la couleur de ses yeux. Un petit paquet m'attendait dans ses mains. À l'intérieur, un nécessaire à lettre parfumée afin de lui donner des nouvelles et un bracelet jonc d'argent. Un regard en sa direction me confirma sa provenance : il s'agit du bijou que nous nous étions échangé à notre rencontre, au début de notre amitié. Un câlin familial avec mon père, ma mère et mon frère avaient fait rouler une larme sur ma joue, et procurer un fou rire à tout le monde. Je montais sur Lua, et, faisait un dernier signe de main à mes proches, j'avais pressé mes genoux autour de son flanc pour me diriger vers l'est.
Plusieurs heures se succédèrent avant de me rapprocher du but. Les deux tiers du parcours étaient réalisés, mais la nuit approchait. Je décidais donc de me trouver un abri pour dormir un peu avant de reprendre mon périple. Un cours d'eau d'un côté, un gros rocher creusé derrière, position stratégique parfaite pour cette soirée. Un feu vif réchauffait mes membres endoloris tandis que je grignotais du bout des lèvres mon repas, mon esprit virevoltant dans mes pensées solitaires. Lua s'était rapproché pour profiter de la chaleur, ajoutant une présence rassurante à la nuit. C'est les paupières tombantes que je me glissais dans mes couvertures, dos au rocher, le feu contre le ventre à l'affût du moindre bruit. Mon hamac me manquait à ce moment-là, dommage que je n'ai pu l'emmener avec moi. Le sol froid n'était pas vraiment ce que l'on pourrait appeler confortable. Mon sommeil fut donc de courte durée.
Au début, seulement dessiné par le passage récurrent des animaux de la forêt, le sentier devint chemin. Rapidement pavée, signe distinctif d'une civilisation plus florissante, la route sinuait toujours entre les grands arbres de la forêt centenaire. Quelques personnes m'avaient rejoint lors de mon périple et de plus en plus au fur et à mesure que la destination se rapprochait. Je laissais mes pensées vagabonder dans l'espoir de deviner pourquoi tel ou tel voyageur allait dans la même direction que moi. Je ne connaissais pas cette région et les pancartes et les imbrications se succédaient sans que je puisse m'y retrouver. Je demandais donc un nombre incalculable de fois mon chemin. La capitale, centre du royaume, était ce que l'on peut appeler la croisée des chemins. D'après ma carte, du côté nord-ouest se trouvent d'immenses montagnes, au sud, l'océan Eowill, à l'est du sable à perte de vue et orientée ouest ma maison, Esméra. Revenons à nos moutons, Istya devait se situer pas loin de Tëmyskiàra donc je serais dans le bon sens. Mon cheval se mit dans cette direction pour arriver juste devant une allée de bouleau.
Au moment de passer l'immense portail en fer forgé entouré de murs de granite blanc, mon destrier renâcla brièvement avant d'avancer au pas en zigzaguant entre les étudiants. Je ne compris pourquoi qu'en entrant en contact avec un film invisible, comme un voile à peine perceptible, qui, une fois passé, me révéla l'étendue de l'imposante propriété. Le bâtiment devant moi m'impressionnait tant par ses dimensions que par sa prestance. Mais le plus surprenant était l'espace de verdure grouillant de vie et surtout d'étudiants profitant du soleil, haut dans le ciel à ce moment de la journée. Un jeune garçon prit ma monture par les rênes et je descendis avant qu'il ne l'emmène sans un mot dans ce qui semble être l'écurie. Je ne pus que me focaliser sur ce qui était devant moi. L'entrée principale me faisant face, une porte en bois de hêtre gravée du même symbole que mon carnet. Entourée de glycines couleur lilas ouverte sur le hall, je montais les quelques marches et entrai.
————————————————————————
Bonjour à vous les Istyien(nes),
J'ai beaucoup aimé écrire ce chapitre ! L'ambiance feutrée, la découverte de l'école, etc ...
Et vous ? Que pensez-vous qu'elle va trouver à l'intérieur de la bâtisse ?
A vos stylos, euh plutôt, à vos claviers :)
Kiss,
Meira.
VOUS LISEZ
Olympe d'Esméra
FantasiJe ne suis pas dangereuse. Mon cœur est pur, mes intentions sont bonnes. Je ne suis qu'une elfe d'Alantya à la recherche de la vérité. Celle-là même qui lors de mon périple confirma le doute à propos de mes origines. Au commencement, je ne connais...