Sabrina SAVIN
LA RADIOTHERAPIE
VUE PAR LE SECRETARIAT
Février deux mille quinze. De retour dans ma ville, Angoulême, après dix ans passés dans un autre monde, sur une ile, de l'autre côté de la planète. Je pose les pieds dans le service de radiothérapie de l'hôpital d'Angoulême, quatre jours après être descendue de l'avion.
Avant de commencer, je ne pensais pas que j'y arriverai. Etre confrontée à des personnes atteintes d'une maladie grave, cela me paraissait compliqué à gérer émotionnellement.
Puis j'ai découvert que le peu que je pouvais apporter aux patients représentait bien plus que ma propre peine. Un sourire, une attention, un regard qui en dit long, tant de petites choses si importantes qu'il est possible d'apporter à ces personnes qui parfois apprennent tout juste qu'elles vont devoir se battre contre le mal, tout cela m'a convaincu de continuer et de ne pas me diriger vers un service moins « lourd ».
Tout de suite, une sensation familière en pénétrant ces lieux s'est posée sur moi, comme s'ils ne m'étaient pas inconnus. L'accueil que l'on m'a offert fut maternel, on m'a entouré, expliqué avec patience chaque tache à effectuer, toutes les habitudes à prendre, jour après jour.
La seule chose qu'on ne peut enseigner, c'est le ressenti, l'appréhension de ses propres sentiments lorsque l'on se trouve là, assis en face d'un être humain, accompagné parfois de sa famille. Et ce qu'il ne nous est pas non plus inculqué, c'est la façon de réagir face à des questions, comment se comporter, comment poser cette barrière virtuelle qui nous permet de nous protéger contre cette souffrance morale qui peut être également physique ?
Notre bureau se trouve au fond du couloir, à gauche des portes de l'entrée principale de la radiothérapie. Une petite salle d'attente est occupée par sept chaises ainsi qu'une petite table recouverte de magasines.
Notre cadre de santé occupe le bureau situé juste en face du notre, ce qui facilite les échanges avec les médecins et nous permet, en tant que secrétaire, d'obtenir des réponses rapides à certaines de nos questions et nous vient en aide lorsque par exemple un rendez-vous de scanner de repérage doit être placé en urgence.
A l'écoute, accessible et compréhensif, il contribue au maintien d'une atmosphère sereine et saine. Sa mission est d'organiser l'activité para- médicale, d'animer l'équipe, et je rappelle qu'elle est composée de nombreuses jeunes femmes...
Il doit aussi coordonner les moyens du service en veillant à l'efficacité et à la qualité des prestations, gérer le temps et l'organisation de travail, les absentéismes. Et dans notre service, les manipulatrices sont jeunes et pas encore toutes maman.... Il doit également évaluer la charge de travail de chacun, leurs besoins, s'occuper des évaluations annuelles du personnel, s'assurer du respect des normes de qualités, évaluer les besoins en formation, s'impliquer dans les réunions. Il est le responsable de la répartition des tâches, doit être pédagogue et bien plus encore. Il est appelé à tout moment pour gérer les petits soucis informatiques, parfois même de plomberie, ce que j'ai pu constater très récemment et qui m'a bien fait sourire... Depuis cette année et demi passée ici, je ne l'ai jamais encore vu perdre patience devant toutes les demandes répétées diverses et variées de l'équipe.
Nos deux médecins, quant à eux, ont des personnalités très différentes, mais tous deux ont d'indéniables qualités importantes à apporter aux patients. Pour nous, pas de lassitude, nous passons la matinée avec un médecin aux quelques excentricités et à l'humour bienveillant, et l'après-midi avec un médecin plus classiquement professionnel, et inversement.
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LA RADIOTHERAPIE VUE PAR LE SECRETARIAT
Short StoryJ'ai découvert que le peu que je pouvais apporter aux patients représentait bien plus que ma propre peine.