20

129 30 125
                                    

Énormément, répondis-je finalement avec aplomb.

         Elle gloussa, ses yeux brillaient, comme parés de paillettes dorées. C'est alors que Ekko fit son entrée, ses griffes produisaient un doux cliquetis sur le carrelage. Il s'approcha d'America en reniflant, pressé de savoir si elle lui donnerait à manger.

Bonjour toi ! s'écria-t-elle. Tu es si chou !

         Il frétilla, ses yeux marron s'agrandirent et elle fondit avec joie, ne se retenant plus pour le caresser. Je sursautai, jaloux de mon chien qui profitait des papouilles prodigués par ses douces mains. America finit par se redresser en entendant Pyper descendre, aussi bougon qu'elle pouvait l'être dès le matin.

Salut, Pyps ! En forme ?

Ahah, super drôle, railla ma sœur.

        Ses cheveux ressemblaient à un nid d'écureuil, son blond semblait s'être terni durant la nuit, et ses yeux étaient encore gonflés de sommeil. America s'empressa de l'enlacer, mais Pyper la stoppa dans son mouvement, et la tint à bout de bras pour observer ce qu'elle portait. Puis son regard se fit métallique en se posant sur mon propre torse nu.

Je rêve ! hurla-t-elle. Nan mais les gars, vous êtes sérieux, là ? Putain.

         America m'adressa un regard interloqué, puis dévia elle aussi sur mon absence de t-shirt, et éclata de rire. Son corps était secoué de profonds soubresauts, j'étais totalement perdu entre leurs réactions contradictoires.

T'as cru qu'on avait couché ensemble ? Mais tu me prends pour qui ?

          Je croisai mes bras, vexé par ses paroles. Quel était son problème, au juste ? N'étais-je pas assez sexy ? Insensible à ma susceptibilité, America continua allègrement :

T'inquiète pas pour moi, je sais me défendre et je suis assez grande pour savoir ce que je fais, puis, se tournant vers moi, ton p'tit cul est trop craquant pour qu'on n'ait pas envie de coucher avec toi !

         Son aplomb, son détachement, le naturel avec lequel elle avait prononcé ces paroles me firent frissonner. Mon cœur en rata un battement, je pris une inspiration sèche pour me remettre de l'effet provoqué par ce qu'elle venait de lancer. Des émotions tourbillonnantes m'assaillirent, mon esprit vibra sous l'assaut de cette turbulente euphorie. Pyper rougit, plus de colère que de gêne, puis sortit par la terrasse en tapant des pieds. Nous soupirâmes de concert en réponse à sa gaminerie.

America reprit sa cuisine et je restai à l'observer, perché sur mon tabouret. Ses courts cheveux méchés virevoltaient en suivant chacun de ses mouvement, ponctuaient ses gestes précis de leurs ondulations. Ainsi concentrée, je la trouvai belle, avec ses pommettes parsemées de tâches de rousseur, ses grands yeux prolongés de cils très foncés, ses traits fins... Je la désirais du plus profond de mes tripes, au point d'en frissonner comme un putain de gars trop sensible.

Mais je connaissais les dangers d'une trop grande passion. Je savais que j'allais être grignoté de l'intérieur, que cette flamme me dévorerait vivant, si bien que je ne vivrais plus que pour elle. Et puis je finirais consumé, ne resteraient plus les cendres de celui que j'avais un jour été.

Je ne le savais que trop bien.

Mais, comme d'habitude, je fonçais tête baissée.

À un souffle de toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant