Chapitre 1 : Mémoire

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La violente averse venait de frapper toute la ville sans prévenir. Plus personne ne se trouvait à l'extérieur, tout le monde s'était réfugié dans un magasin ou chez soi. Ce climat n'était pas anormal. Depuis que les monstres étaient remontés à la surface et étaient tolérés par l'humanité – on ne parlera pas d'acceptation puisque rien n'est unanime –, le temps s'était fait beaucoup plus changeant. Certains disent qu'il s'agit là d'une coïncidence, d'autres prônent que la magie que les monstres utilisent est le facteur déclencheur. De nombreuses théories avaient fusé, mais rien n'était fondé. Il n'y avait aucune preuve de quoi que ce soit.


Cela faisait donc une dizaine d'années que ces changements météorologiques aussi brusques qu'habituels se produisaient. Cependant, une petite poignée de ces monstres connaissait la raison de ceux-ci, et ils n'avaient pas l'intention de la révéler. Ils étaient aussi ceux qui avaient conscience de leur condition : n'être que de pâles copies d'un original, pour résumer brièvement et ne pas parler des exceptions.Suite aux – vains – efforts de l'un d'entre eux pour les détruire, les copies avaient soit trouvé refuge dans la timeline originelle, soit elles avaient attendu le moment opportun pour y accéder. Quoi qu'il en soit, le destructeur avait réussi son but premier de détruire les mondes alternatifs, mais en conséquence et ironiquement, tous ceux-ci avaient convergé en un seul pour ne pas être détruits. Ce qui amenait au résultat actuel : d'innombrables copies à la surface.


Bien sûr, les humains n'avaient aucune connaissance de tout ça. Ils ignoraient l'existence des mondes parallèles, et, pour eux, tous les monstres ci présents étaient les habitants qui s'étaient libérés. Après constat, durant ces années, cette poignée de monstres avait réalisé que, étrangement, peu des autres copies avaient gardé le souvenir d'être une copie – et ils pensaient tous être un original, ce qui eut le don d'énerver le destructeur. Mais cette convergence qui n'était pas censée avoir lieu, et qui était encore moins censée se produire à la surface, provoqua une distorsion dans l'espace-temps, et le climat s'en retrouva affecté par la même occasion.


Entouré de marbre, un assistant funéraire soupira. Cette pluie ne lui avait jamais inspiré rien de bon, bien au contraire. Il était persuadé qu'elle était de mauvaise augure. Même son métier l'était. Il ne savait pas vraiment pourquoi il se retrouvait à conseiller des familles sur leurs funérailles. Son supérieur lui avait déjà dit une fois qu'un squelette dans l'établissement ne serait pas trop ironique, et qu'il avait l'étrange sensation que la mort ne lui était pas inconnue. Lui aussi, le sentait comme ça. Il savait que les humains n'avaient pas de relation au LOVE comme les monstres, donc son chef ne pouvait pas avoir remarqué que le sien était particulièrement élevé, signe qu'il avait bien côtoyé la mort plus d'une fois, mais il en avait presque eu peur quand la phrase était sortie. Peur que sa véritable et inconnue nature soit révélée au grand jour. Alors qu'il n'était qu'un squelette parmi d'autres, il ne se démarquait pas spécialement.


Enfin... C'était ce qu'il pensait. Il y a quelques mois, un autre squelette – du moins c'est ce qu'il avait supposé – était venu le voir. Cette matière noire émanant de lui infiniment l'avait fait douté sur sa nature, mais il l'avait catégorisé comme ça, pour ne pas s'embrouiller mentalement.


« Tu as l'intention de revenir avec moi, Dust ? »


L'expression qu'il avait eue à ce moment là dut faire comprendre à l'autre qu'il n'avait pas la moindre idée de ce dont il parlait. Son interlocuteur n'avait pas insisté plus que ça, et était simplement parti après la non-réponse du concerné. Dust s'était dit que l'étrange personnage n'attendait pas une quelconque affirmative. Ou du moins,il ne l'espérait même pas. Il n'avait vu en lui qu'une personne ayant déjà abandonné, ce qui contrastait avec son attitude sûre, presque hautaine.

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