Illiana soupire en attrapant un nouveau sac de grains. Un nouveau convoi de ravitaillement est arrivé, au grand soulagement des habitants de la forteresse qui voyaient d'un œil inquiet les réserves s'amenuiser, pour cause de surpopulation. La troupe de soldats blessés se remet doucement d'aplomb et nécessite des efforts constants de la part des esclaves. Mais l'elfe ne soupire pas à cause du surplus de travail. Elle s'inquiète pour la Dame du Fort, partie en tête d'un détachement pour chasser une bande d'elfes localisée à une dizaine de kilomètres de là.
Illiana lâche un grognement en réceptionnant une caisse de bougies. Le piège est beaucoup trop évident. Son peuple aurait pu aisément déjouer les guetteurs si leur but avait été de s'infiltrer dans l'empire comme le soupçonnait l'officier en charge du détachement. Elle avait tenté d'en avertir la magicienne, mais celle-ci l'ignore consciencieusement depuis l'autre soir où elle lui avait transmis son énergie.
L'elfe aurait du s'en douter, les humais sont perfides et inconstants. L'intérêt qu'elle a feint de lui manifester n'avait pour but que de lui soutirer cette information sur les siens. Elle a écouté sa compassion et le regrette amèrement. Maintenant que la noble sait qu'elle peut lui soutirer un surplus d'énergie de cette manière, elle lui ordonnera de recommencer, c'est certain.
Malgré tout, elle ne peut empêcher une partie d'elle-même de s'inquiéter pour la jeune femme. Si ses compatriotes l'attrapent, ils sont capables de choses horribles pour lui faire payer cette guerre dont elle n'est pas responsable. La sagesse légendaire des elfes n'est rien face à leur colère et leur envie de destruction quand on s'en prend aux leurs.
Voilà donc pourquoi, une fois l'extinction des feux sifflée, elle n'arrive pas à trouver le sommeil. Un mauvais pressentiment la fait se tourner et retourner sur sa couche, observant les étoiles à travers la mince fente de la fenêtre. Ce n'est que tard dans la nuit qu'elle parvient à s'endormir d'un sommeil agité.
Le lendemain, une tempête s'abat sur Fort Qualir. Le vent et la pluie frappent sans pitié les pierres grises, confinant tout le monde à l'intérieur. Même absorbée par ses tâches quotidienne, Illiana sent une angoisse sourde grandir au creux de son ventre. Cette tempête n'est pas naturelle, elle le sent dans ses tripes. Si son peuple a décidé de répliquer à l'agression des humains, cette tempête pourrait être une première manœuvre d'intimidation ou une manière d'affaiblir les soldats cherchant à se replier.
Trois jours durant, des trombes d'eau s'abattent sur le Fort, si bien qu'on ne distingue plus le jour de la nuit. Les cours se transforment en marre de boue, les guetteurs dans les tours n'ont aucune visibilité et la tension monte entre les soldats forcés à l'inactivité. L'elfe s'inquiète de ne pas voir revenir le détachement conduit par la Dame du Fort, mais aucun renseignement ne franchit les lèvres des officiers qui tentent tant bien que mal d'occuper les troupes.
C'est finalement en début de soirée qu'un des guetteurs distingue une troupe qui gravit le sentier menant au Fort. Il faut néanmoins attendre que les soldats aient franchit les murs pour avoir confirmation qu'il s'agit bien de ceux menés par Gwendoline de Rimath. Au dîner, les esclaves chargés d'aider aux écuries confirme les craintes d'Illiana, il semblerait que la magicienne ait essayé de tenir tête aux jeteurs de sorts des elfes et ait été blessée. Personne n'a le droit de l'approcher à part Oriane et les guérisseurs.
L'elfe expire bruyamment par le nez, contrariée. Les guérisseurs sont des incompétents pour la plupart, à peine capable de soigner une écorchure. Elle a eu l'occasion de les observer pendant qu'ils soignaient les blessés. Ils risquent surtout d'aggraver la situation. Mais les contremaîtres veillent à ce que chacun regagne sa chambre sous les toits une fois le repas terminé, impossible de s'éclipser, surtout avec le collier actif.
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Destinées
FantastikElle est seule dans le noir, avec le bruit de ses sanglots et l'odeur de son propre sang. Elle est seule dans la lumière, avec le goût amer de son impuissance et le sol froid sous ses pieds. À l'heure où les épées et la magie écrivent une page de l'...