Tueur d'un soir.

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« Peu de gens naissent sous une bonne étoile Liam, la vie attend toujours que nous fassions les bons choix aux bons moments pour être meilleure. » Assis sur une chaise en métal, Liam fixe les menottes qui lui serrent les poignets, en pensant qu'il aurait dû écouter sa professeure, madame Line. Peut-être que s'il avait fuit ou s'il avait été voir la police, tout serait différent. Quand il y réfléchit mieux, cette prof de lycée est la seule à avoir vu qu'il était mal. Ou plutôt la première à lui avoir tendu la main. Son enfance n'a pas été un model de réussite et il a sérieusement cru qu'il n'allait jamais connaitre sa majorité. Mais aujourd'hui son enfer est passé, enfin. En plus il a eu dix-huit ans il y a vingt-quatre heures, alors inconsciemment, il sourit fier de son geste malgré tout.

Tout à coup quelqu'un lui tapote doucement le bras afin que Liam sorte de sa rêverie. Le jeune homme lève la tête vers maitre Counsel, son avocate. C'est une femme d'une quarantaine d'années, mère de deux enfants s'il se fie aux photos qui ornent le fond d'écran de son téléphone. Counsel est une mère fière de sa progéniture, Liam l'a deviné au moment où son ainée lui a téléphoné tout à l'heure. Elle a sourit en posant ses yeux remplit d'amour maternel, sur l'écran affichant le prénom de son enfant. Liam se demande d'ailleurs comment peut-il savoir à quoi ressemble un regard remplit d'amour maternel. Il ne s'en rappelle pas. En ce sens, il était persuadé de ne pas savoir ce que c'était. Mais peut-être est-ce à cause du sentiment de jalousie qui l'a soudainement traversé qu'il en est aussi sûr. En particulier quand Counsel a dit d'une voix mielleuse : « Je suis au travail chérie, demandes à papa de t'emmener, il finit dans une petite demi-heure. Oui à ce soir chérie. Moi aussi je t'aime. » Liam est persuadé que ni son père ni sa mère ne lui avait un jour adressé ses mots plein de tendresses. Cela est paradoxal sachant qu'il est, à l'origine, un enfant de l'amour.

« Liam, tu m'écoutes ? » appelle Counsel en posant l'une de ses mains pales sur son bras gauche.

Il lève vers elle un regard vide. Elle sourit doucement. Non, il ne l'a pas écouté ces dix dernières minutes. Il a du mal à lutter contre la fatigue qui s'est posé sur ses épaules au moment où la police lui a passé les menottes. Liam sait qu'il peut désormais enlacer le marchant de sables sans craindre de perdre la vie, autant dire qu'il ne montre aucune motivation pour chasser sa fatigue. Il est bien et c'est tout ce qui compte à présent. Il se fiche que la justice le mette en prison pour ce qu'il a fait, ou bien le libéré par un heureux hasard.

« Je suis là pour t'aider, continu Counsel en s'approchant légèrement de lui. Mais pour cela il faut que tu me racontes en détail ce qu'il s'est passé. »

Liam reste silencieux. A quoi bon l'aider à présent, c'était avant qu'il fallait agir. Il pose ses yeux sur le grand miroir du mur d'en face. Es-ce que les policiers sont derrière, dans une pièce noire comme dans les films, à épier ses faits et gestes ? Sont-ils entrain d'insultés l'assassin qu'il est devenu ? Peut-être que Liam est un peu injuste en pensant que personne est venu l'aider quand il en avait vraiment besoin. Après tout il a passé son existence à cacher le côté sombre de sa vie. Depuis le collège, il s'était forgé une réputation de mauvais garçon qui faisait fuir ses camarades de classes, et ses professeurs ne cherchaient pas à savoir d'où venait ses hématomes qui colorés régulièrement ses bras. Il était en quelque sorte l'élément perturbateur de la classe, même si ses notes n'ont jamais été catastrophiques. Pour ce qui est de ses relations sociales, elles n'ont jamais été aussi fortes que celles qu'il a vues tout au long de sa scolarité. « Julien sort peut-être du lot, » pense alors Liam. Le jeune homme le connait depuis toujours, ils vivent dans la même rue. Leurs maisons sont séparées par trois habitations et le parc de jeu de leur quartier, aussi se connaissent-ils très bien. Cependant, Liam a toujours posé des barrières virtuelles afin que Julien ne franchisse jamais le portillon de son jardin. Etonnement, le bond n'a pas insisté, respectant probablement sa vie privé. Ou alors avait-il peur de s'aventurer en terre hostile. Liam ne saurait dire. En tout cas, si on lui demande de dire le nom d'un ami, le jeune homme dirait celui de Julien.

Le visage de nos souffrances.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant