Mardi 22 novembre 2011, à 15h34 :
Rien. Absolument rien. Pas une seule parole en plus de dix minutes. Ça représentait quoi ? Six cents secondes, à peu près, pendant lesquelles le silence s'était fait triomphant. Certes, on pouvait entendre des bribes de conversations par-ci, par là, mais rien qui ne suffisent à réchauffer l'atmosphère. Quelques rires tantôt enjoués, tantôt amusés. Trop lointains pour être contagieux.Il y avait eux, entre lesquels une vitre invisible s'était installée. Non distinguable et pourtant, on la sentait sans difficultés. On aurait pu frapper dedans pour la sentir. Sur la table qui les séparait se trouvant deux journaux et trois magasines, tous disposés à la va vite, abîmés, pliés, détestés.
Il était arrivé avec ses dix minutes de retard habituelles, avait tout étaler devant elle avec un regard accusateur et s'était assis sans piper un mot ou sans qu'elle ne manifeste le moindre geste d'affection à son égard. Elle savait déjà ce que c'était, elle ne voulait simplement pas y faire face à nouveau.
Elle s'était réveillée à l'agonie sur le carrelage de la salle de bains. Il lui avait fallu plus de cinq minutes pour réaliser où elle se trouvait et quelques autres pour trouver la force de se lever malgré ses muscles tout engourdis et tendus. Le reflet que lui avait offert le miroir l'avait effrayée comme jamais. Elle s'était douchée, était descendue, avait raté une marche, était tombée sur les fesses, avait crier un juron dans toute la maison.
Sur ses lèvres à un moment, elle avait ressenti celles du bouclé puis elle s'était presque pincé pour oublier cette agréable sensation.
En entrant dans la cuisine, elle avait trouvé son beau-père lisant comme à son habitude les nouvelles, et en y voyant son prénom associé à celui 'd'Harry Styles des One Direction', elle aurait aimé se cacher sous terre quitte à ne pouvoir respirer qu'à l'aide d'une paille. Elle avait avalé un jus d'orange d'une traite en pensant que son estomac le supporterait. En revenant des toilettes la trachée en feu, elle avait du rassurer Charly en évitant les explications même si cela lui avait valu un regard qu'elle n'oublierait pas, mélange de 'fais attention à toi', 'ne le laisse pas refoutre le bordel dans ta vie s'il te plait', 'remercie le', "t'as de la chance que je ne dise rien pour ta gueule de bois' ou 'je suis content qu'il soit de retour'. Le gratifiant d'un hochement de tête reconnaissant, elle avait trouvé le message de son petit-ami qui lui donnait un rendez-vous dans l'après-midi parce qu'ils devaient 'absolument parler'. Là, elle avait compris, toujours avec cette sensation piquante au bout des lèvres, que les ennuis commençaient.
Jake tournait maintenant impartialement sa cuillère dans sa tasse de café pendant qu'elle regardait le monde extérieurtourner derrière la vitre. Elle aurait aimé en faire partie, mais elle était spectatrice de la vie.
Peut-être avait-elle rater le train, même si elle savait que sa seule erreur était d'avoir laisser partir le bon wagon pour en prendre un de substitut en pensant qu'il serait tout aussi bien, l'espérant même mieux. Défaillant, créateur d'illusions qui l'avait quand même aider à se séparer de l'image destructrice d'un dernière baiser douloureux à l'aéroport.
Il y avait encore des goûtes de pluie accrochées sur la surface translucide à côté d'elle, lui rappelant toutes celles qu'elle avait versées la veille. Puis elle se risqua à regarder l'un des papiers sulfurisés à côté d'elle, se heurtant à la réalité. Ses yeux se levèrent vers le blond, qui ne la regardait même pas. Même pas un « Tu peux m'expliquer ? » ou « C'est quoi, ça ? » Rien du tout. Peut-être était-ce le plus troublant..
Les nouvelles se propageaient vite, et même si elle avait utilisé plus de maquillage que d'habitude, les marques sur son visage parlaient toujours pour elle, lui confirmant les scénarios décris en quelques lignes.