Chapitre 34 : Tchaïkovski

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     Assis contre l'un des rares arbres de la cours, Unster regarda ses amis en face de lui. Pour la première fois depuis longtemps, il ne se sentait plus seul. Et malgré ce qu'il avait imaginé, le fait que Siph décide de prendre les choses en mains le rassurait. Il était enfin entouré, et n'était plus seul face à ses décisions. Soudain, son téléphone vibra dans la poche de son jean.

[NT] Tu devrais venir en cours. Si tu rates ton bac, on devra se voir un an de plus.

     Unster releva la tête vers ses amis qui devinèrent immédiatement de qui venait le message.

     -Qu'est-ce qu'il veut ? lança Blondie, agressive.

     -Que je retourne en cours, dit Unster plus calmement qu'il ne l'aurait pensé.

     -Ah il s'intéresse à toi ? s'enquit Arm d'un ton méfiant.

     -Non, répondit Sébastien à contrecoeur. Il ne veut pas me voir un an de plus...

     -Quel petit... gronda Grim entre ses dents.

     -On doit trouver une solution, décida Siph.

     -Il doit payer, ajouta Brioche.

     -Mais comment de simples élèves peuvent-ils détruire un professeur ? s'inquiéta Blondie.

     -Tout le problème est là, Clem... chuchota Julien. Déjà, on va lui faire regretter de nous prendre en cours.

     -J'aime bien cette idée ! s'écria Brioche.

     La sonnerie retentit et le petit groupe mit fin à la discussion avant de rejoindre leur salle de mathématiques. Les cours de la journée passèrent très vite pour Unster. Le jeune homme se sentait mieux. Beaucoup mieux depuis qu'il avait parlé avec ses amis. L'après-midi, entre une heure d'anglais et une heure d'histoire, Pauline Games vint lui demander encore 5€. Unster les lui donna sans rechigner. Il avait confiance en elle. Comme tous les jours, elle alla déposer l'argent dans son casier avant de rejoindre sa classe, comme si de rien n'était. Personne n'avait remarqué leurs échanges et Unster préférait ne pas en parler. C'était à Games de le faire.

     La journée s'achevait par le cours de musique. Le petit groupe avait attendu ce moment avec impatience. Pour la première fois depuis leur dispute, Unster se rangea avec ses amis devant la porte de la salle. Avec quelques minutes de retard, NT fit rentrer ses élèves, en prenant soin de n'adresser aucun regard à Unster.

     -Bonjour monsieur Newtiteuf ! s'écria Blondie en lui offrant son plus beau sourire.

     Comme prévu, chacun prit place à un endroit différent de la salle, ce qui parut perturber leur professeur, qui fronça les sourcils mais commenta pas.

     -Bonjour à tous, aujourd'hui nous allons étudier un des mythes de la musique. J'ai nommé Piotr Ilitch Tchaïkovski.

-À vos souhaits, chuchota Siph.

     -Wahou, laissa échapper Brioche.

     NT lui jeta un regard étonné.

     -Oui, « wahou », Grégoire. Tu sembles être un adepte. Que peux-tu nous dire sur lui ?

     -Euh.. bredouilla l'adolescent. C'était un musicien ?

     NT soupira avant de reprendre son cours.

    -Tchaïkovski était donc un compositeur du XIX eme siècle. Il appartient au mouvement romantique et est notamment connu pour ses opéras.

     -Formidable... chuchota Siph à l'oreille d'Unster.

      -Il est également connu pour son homosexualité.

     Tout le petit groupe releva soudain la tête, intrigué.

     -Le 30 juillet 1877, il épouse Antonina Miliukova pour cacher son orientation sexuelle.

     -C'est débile, Monsieur.

     -Qu'est-ce qui est débile Clémence ?s'enquit le professeur qui commençait à s'agacer.

-D'épouser une fille alors qu'on est gay, répondit Brioche.

Le professeur se tourna vivement vers lui.

-Chacun à ses raisons et sa vie, Grégoire, lança-t-il les sourcils froncés.

-C'est stupide de cacher son homosexualité monsieur, ajouta Grim, à l'autre bout de la salle.

-Nous ne sommes pas là pour juger, Michael.

-Mais ça n'existe pas dans notre siècle, Grim, ajouta Arm.

-Les mentalités ont évoluées depuis, renchérit Siph.

-Plus personne ne fait ça, lança Blondie.

Les commentaires fusaient dans toute la salle, si bien que monsieur Newtiteuf ne savait plus où donner de la tête. Il avait totalement perdu le contrôle de ses élèves.

-Vous savez, certaines personnes n'ont pas évoluées depuis le XIX eme, remarqua Sébastien.

Soudain, NT braqua son regard sur Unster. Il savait parfaitement que cette remarque lui était adressée. Sébastien se tue, soutenant son regard. Les yeux plongés dans ceux de son professeur, il se souvint de tout. Les câlins, les bisous, les mots doux... Il secoua la tête pour rassembler ses idées et ravala ses larmes. Sa gorge se serra et il eut l'impression qu'une pierre venait de tomber dans son estomac. Pendant les quelques secondes que dura ce regard, ce fut comme si le temps c'était arrêté. Au fond de lui, Unster savait qu'il était encore amoureux, malgré tout le mal que le musicien lui avait fait. Enfin, après un effort monstrueux, il parvint à reprendre la parole :

-Mais cela veut dire qu'il n'aimait pas vraiment sa femme, monsieur.

-Personne ne pourra jamais le savoir, Sébastien. On peut aimer de tellement de manières différentes, répondit le professeur, les yeux dans le vague.

Tout à coup, ce fut comme si le musicien venait de se réveiller d'un long et profond sommeil. Il cligna plusieurs fois des yeux avant de retrouver contenance. Il reprit son cours, sérieux mais toujours l'air pensif qu'Unster se refusait d'interpréter. Il ne voulait pas se donner de faux espoirs. Pourtant, il avait la nette impression que Julien Newtiteuf s'en voulait. La fin de l'heure passa lentement, si bien que Sébastien cru qu'elle avait duré plus longtemps que tous les autres cours de la journée réunis. Et Unster n'était pas attentif. Il regardait par la fenêtre, le regard vide et le visage impassible. Le bleu du ciel lui rappelait que l'été venait de commencer et que, bientôt, il se retrouverait seule face à une copie d'examen. Il se dit alors qu'il était plus que temps de commencer sérieusement ses révisions, car il lui restait encore beaucoup de travail.

-Sébastien !

La voix sèche et agressive de son professeur le tira de ses pensées.

-Tu veux bien arrêter de rêvasser et prendre des notes ? Ce n'est pas en observant les oiseaux que tu vas avoir ton bac ! Tu viendras me voir à la fin du cours.

Cette dernière phrase fut perçue comme un coup de couteau par l'élève. Tous les regards affolés de ses amis se tournèrent vers lui. Encore une fois, il serait seul face à son professeur.

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Hey ! Et voilà enfin le nouveau chapitre ! Les épreuves de fin d'année sont terminées pour moi, j'espère donc arriver à reprendre un rythme normal de publication.
Et vous ? Comment se sont passées vos épreuves ?
J'espère que ce chapitre vous aura plu ! Et à bientôt pour un nouveau :p

[Unstiteuf] Ça reste entre nousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant