J'y crois pas, elle vient de me réveiller ! Vous savez, cette sonnerie au bruit strident qui émane de votre réveil. Lui, qui est tranquillement posé sur ma table de chevet pendant que je pousse un grognement plaintif, freinant psychologiquement mes quatre membres à l'idée de se lever. Je l'éteins, me lève et m'habille. Une chemise grise, un pantalon bordeaux et une paire de Vans feront l'affaire pour un lundi matin.
Je suis dans les vapes, j'avale rapidement mon chocolat chaud et manque de m'étouffer en avalant de travers. C'est bon je suis en retard.
- Et merde !
Je suis à la bourre, je vais me brosser les dents en vitesse. J'essaie de me faire une coiffure à peu près potable mais c'est comme si vous essayez de coiffer un paillasson. Voyant que c'est une cause perdue, j'abandonne, je prends mon sac, j'attrape ma tartine et je file à l'arrêt de bus.
Il était temps, ce con de bus arrive déjà. J'avale ce qu'il reste de ma tartine au goût de dentifrice et je me jette dans ce dernier comme-ci une bombe allait exploser.
Le bus est bondé de gens. Des regards hostiles se posent sur moi mais je n'y prête aucune attention, c'est devenu une habitude de. Je traverse le bus, les gens s'écartent délibérément. Je me demande l'espace d'un instant si je ne suis pas Moïse, lorsqu'il ouvrit la mer rouge en deux.
« Et maintenant referme-toi sur le peuple d'Égypte »
La magie opère, ils se rapprochent derrière moi comme pour m'encercler. Quelqu'un me pousse. Je trébuche sur le sol, je sers les dents, pas le choix de toute façon. La société n'est pas assez ouverte d'esprit pour comprendre un amour qui sort de l'ordinaire. L'amour ne se résulte pas à un homme et une femme.
Si cette scène était mise dans un film, on croirait que je suis une pestiférée atteinte de la lèpre ou de la peste. Une maladie grave et contagieuse en tout cas.
- Elle est toujours la celle-là ! marmonne une bécasse dans le bus.
- Ne t'approche pas d'elle si tu veux garder ta pureté ! Rigole une autre.
- Beurk !
En effet, « beurk » quand je vois cette dinde au visage trempé dans un pot de peinture. Il ne faut pas qu'elle s'inquiète, je ne m'intéresse pas à la volaille puis je ne suis pas zoophile.
Le bus s'arrête en même temps que mon cauchemar, leurs mots forment une prison imaginaire dont on ne peut s'enfuir. Heureusement que je connais quelques personnes assez ouvertes d'esprit pour accepter ma différence et même m'encourager. Un peu de tolérance, de nos jours c'est trop demander visiblement.
Ma journée se poursuit par des regards plus ou moins obliques, des remarques quelques peu insultantes. Même certains professeurs me regardent de travers à croire que je dois venir d'une autre planète. Heureusement, la plupart d'entre eux me gratifient d'un sourire aimable sinon je serai mal en permanence. J'obtiens un vingt à ma rédaction sur le racisme, meilleure note de la classe. Il paraît que j'avais bien su me mettre à la place de mon personnage, ça me fait bien rire soit dit en passant. J'apprécie l'humour ironique.
Enfin tout se termine, je ne descends pas à mon arrêt puisque je ne rentre pas chez moi, du moins pas de suite. Je devais lui rendre visite, plus je m'approche de sa maison et plus je deviens nerveuse. Mes mains deviennent moites, pourtant il n'y a pas de quoi. C'est une personne que j'aime de tout mon cœur.
L'ennui, c'est qu'elle est très fragile et j'essaie d'être auprès d'elle à chaque fois qu'elle en a besoin. Mais entre les cours et la distance à parcourir ce n'est pas toujours évident.
Je suis incapable de me relaxer, ma jambe droite tremble comme à son habitude. Je me cale dans un siège et mets mes écouteurs pour me distraire et me changer les idées. C'est juste une façon d'oublier le brouhaha qui m'entoure. Un moyen de ne pas percevoir mon nom dans la bouche de ces commères aux langues de serpent.
Quand le bus arrive, je saute les marches plus vite que ce que je les descends et je marche d'un pas vif vers sa maison. Pourvu qu'elle aille bien...
J'arrive devant sa maison, toujours accueillante avec ces innombrables fleurs au mille couleurs. Je m'apprête à frapper à la porte lorsque celle-ci s'ouvre. J'adresse un sourire crispé à sa mère et mon estomac se noue.
- Bonjour...Excusez-moi de vous déranger mais je...
- Tu tombes bien j'allais t'appeler !
Quelques phrases pour m'informer, qu'il y avait eu un problème.
Deux semaines auparavant :
Sa mère courue dans sa chambre mais ne la vis pas. Elle avait fouillé l'étage puis finit par la trouver, elle trouva Alison, là assise dans la salle de bain, contre sa baignoire, inconsciente. Deux boîtes de médicaments étaient descendues dans son estomac.
Après deux semaines d'hospitalisation, elle était de retour chez elle. Je monte les escaliers quatre à quatre, jetant un bref regard aux tableaux qui décorent le couloir. La gorge serrée, je frappe à sa porte et j'entre, elle était là, assise sur son lit entrain de lire. Je m'assois à ses côtés et je vois son regard se poser sur moi, toujours aussi intense, et je murmure d'une voix douce :
- Ta mère m'a raconté, pourquoi as-tu fait ça ?
A ces mots, elle se mit à pleurer.
- J'en ai marre ! Marre d'être toujours seule au collège ! Marre que les gens me regardent de travers ! J'en ai assez, tu comprends ?!
Je comprends, je la prend doucement dans mes bras et l'a berce en lui murmurant des paroles réconfortantes à l'oreille. « Je t'aime et je ne t'abandonnerai pas. Les autres ne sont que des cons, tu ne dois pas leur prêter attention. » A travers mes propres larmes, je l'embrasse tendrement. La soirée nous consume et nous nous endormons dans les bras l'une de l'autre.
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Une journée dans ma peau : 24 heures 2 280 minutes 86 400 secondes
RomanceJe vous laisse découvrir par vous-même. Bonne lecture :)