Prologue

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Lith ferma les yeux. Elle sentait le vent lui fouetter violemment le visage, faisant grincer les plantes de métal qui couvraient le sol. La chaleur du soleil parvenait péniblement jusqu'à elle, bloquée par le nuage de pollution constant. La petite lanterne agrippée à sa main trembla. Elle souleva une paupière. Et, sa voix calme et un peu monotone retentit, s'adressant à la lanterne :

_Ça va Esryal?

Alors, une petite fente s'ouvrit dans la flamme de la lanterne. Une voix indéfinissable en sortit.

_Oui oui... Ça va... C'est juste que... Ce paysage est le dernier que j'emporte de ce monde.
_C'est ton premier changement de monde ?

Et la flamme se pencha légèrement, comme pour hocher la tête.

_D'ailleurs dans quelle sorte de monde allons-nous?
_Tu croyais vraiment que j'en avais la moindre idée ? Tu sais, je ne voyagerai pas s'il n'y avait plus rien à découvrir.

La petite lanterne eu un air mortifié. Lith la prit dans son manteau.
_Ça ira tu verras.

Et ils recommencèrent à marcher. Et plus ils marchaient, plus l'air devenait dense, plus le sol devenait dur, et plus l'atmosphère était étouffante. Esryal avait l'impression qu'une force inconnue, monumentale voulait l'enfoncer dans le sol. Il trembla de plus belle. Puis il regarda Lith. Il regarda cette gamine de huit ans qui avait sûrement bien plus vécu qu'un adulte, et qui semblait se balader sans pression dans cet endroit écrasant. Mine de rien il s'y était attaché à cette gamine. Une terreur glaciale l'envahit soudain. Et s'il échouait ? Et s'il n'était pas à la hauteur ? Il ne voulait pas la perdre ! Son tremblement recommença. Il était mort de trouille quand il sentit la voix de Lith l'effleurer, comme une caresse :

_Je sais que tu as peur Esryal. Et je sais aussi que tu as tes raisons. Mais je trouve quand même ça risible. Pourquoi les portes vous effraient-elles tant vous, les coupés? Ce ne sont que deux mondes qui se frôlent l'espace d'un temps, qui nous permettent de voyager, de découvrir et de comprendre. En somme, ce ne sont rien de plus que des poignées à tourner.

Un souffle de vent passa, dévoilant le ventre de la fillette. Esryal détourna vivement le regard. Il ne voulait pas revoir ça, il ne voulait pas !

_Regardes-moi, Esryal.

Il l'ignora.
Alors elle le sortit violemment de son manteau et le planta devant elle.

_Regardes-moi Esryal ! Regardes ce ventre, regardes l'horreur en face afin de la craindre et de la fuir pour toujours !

Alors la petite lanterne planta son regard sur le ventre de la fillette avec courage et s'efforça de les fixer, ces dizaines de trous noirs qui le parsemaient, de toutes tailles et toutes formes, sans constance. Du vide. Son ventre était troué de vide.
Lith considéra Esryal un instant, puis reprit:

_Tu connais aussi les dangers des portes, et ce qu'elles peuvent prendre à ceux qui ne restent pas sur le sentier. Mais, sais-tu au moins ce que signifie "Esryal" dans ma langue ? Ça veut dire allumette. Tu es ma petite allumette, qui me permet d'éclairer tous les coins sombre pour ne pas me perdre.

Sur cette tirade, ils marchèrent encore un peu, puis elle s'arrêta. Ils étaient arrivés. Esryal le sentait dans toutes les fibres de son être. Ils sentaient cette force monumentale, cette électricité dans l'air. Il leva lentement son ragard vers la porte. Il ne vit qu'une seule chose. Du vide. Le même que celui dans le ventre de Lith. Cette dernière considérait tranquillement la porte.

_C'est une vieille porte, du vide a eu le temps de se former. Constata-t-elle

Elle reporta son regard vers Esryal.

_Maintenant Esryal, petite allumette, imprègnes-toi ce monde une dernière fois, et abandonne-le.

Elle planta son regard en lui.

_Prépares-toi, la seule chose que tu as à faire, c'est de regarder devant toi.

Et il se fondirent dans le vide.

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⏰ Dernière mise à jour : Jan 05, 2020 ⏰

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