Abigaelle
-Où on va madame Neveu ?
-Ne m'appelle pas comme ça Abigaelle. Quand nous sommes dehors, ne dis pas un mot. Compris ?
Je baissais la tête, intimidée. Je ne comprenais pas ce qu'il se passait mais j'étais contente d'avoir le droit de sortir. Cela faisait longtemps que je n'avais pas mis le nez dehors, depuis qu'on dormait chez les Neveu, Joseph et moi. Je crois que ça faisait un mois, je n'étais pas sûre. En tout cas, ça faisait assez longtemps pour que Gabriel et moi ayont épuisé nos idées de jeux. Madame Neveu accéléra ses pas et serra ma main plus fort. Ça commençait à faire mal, mais je ne disais rien. Elle était gentille madame Neveu, et si elle avait dit que je ne devais pas parler, c'est qu'elle avait ses raisons. Joseph ne disait pas un mot non plus, il avait toujours raison donc je devais faire pareil.
Gabriel était resté à la maison et je lui avais promis de lui raconter en détails notre sortie. Je m'étais imaginée beaucoup de choses quand on m'avait demandé de mettre mes chaussures. Peut être qu'on allait voir nos parents, dont on n'avait plus de nouvelles depuis deux semaines. Peut être qu'on allait dans un parc pour jouer, ou à l'école. Peut être qu'on allait combattre des dragons ! En levant la tête vers la mairie, je ne sais pas si je fus étonnée ou déçue, un mélange des deux certainement. Madame Neveu nous fixa un long moment, Joseph et moi.
-Je ne vais pas vous expliquer maintenant pourquoi on est ici. Mais promettez moi de ne pas dire un seul mot, même si quelqu'un vous le demande. Pas un mot, pas un bruit. Compris ?
Nous murmurèrent un oui puis nous entrames tous les trois dans la mairie. On nous fit assoire puis, après une demie heure d'attente, on nous fit entrer dans un grand bureau. J'étais très impressionnée, mais j'avais promis de ne rien dire, donc je ne dis rien.
-Bonjour madame Neveu.
-Bonjour monsieur le maire. Merci de nous recevoir.
Ils parlèrent longtemps, madame Neveu racontait qu'elle avait une cousine espagnole et qu'elle s'occupait de ses enfants. Je ne le savais pas, mais j'étais contente, j'allais avoir des nouveaux amis. Elle parla longtemps de la guerre et des enfants qu'il fallait protéger, le monsieur avait l'air de comprendre. Moi aussi je comprenais, la guerre c'était un truc d'adultes, je me souvenais que papa et maman me l'avait dit.
-Je viens donc vers vous en espérant que vous comprendrez que c'est la meilleure solution. Je souhaite les adopter, devenir officiellement leur tutrice. Ils pourront aller plus facilement chez le médecin s'il y a un problème et j'aurai moins de difficulté à les inscrire à l'école.
-Vous avez leur papier d'identité ?
Elle fit oui de la tête et sortit des papiers de son sac. J'eus le temps de lire les prénoms. C'était une fille et un garçon, Anna et Charles. S'ils étaient de la même famille que Gabriel, ils allaient forcément être gentils. J'essayai de voir leur photo mais je n'eus pas le temps. Joseph me donna un coup de pied pour que j'arrête de faire des bétises.
-Ça ne sonne pas très espagnols comme prénom.
-Ma cousine s'est mariée avec un espagnol, mais elle était française. Ça lui tenait à cœur de donner des prénoms français à ses enfants. Répondit Mme Neveu, sans perdre la face
-Ils parlent français ?
-Non, ils sont en train d'apprendre avec mes enfants.
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Minuit moins vingt
RandomHelen a 17 ans, une mère silencieuse, un père incconu et une colère contenue contre le monde, contre celui qui s'est barré quand elle n'avait que 4 ans, contre celle qui depuis reste a fixer la grande pendule. Et puis la voilà au milieu d'une manif...