Chapitre 11

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    Vous savez ce sentiment d'être prisonnier? Ce sentiment qui vous consume tout entier, qui s'empare de votre esprit nuit et jour. Ce sentiment d'être dans une spirale infernale. Celui d'être dépendant de quelque chose, ou plutôt quelqu'un, mais que cette relation est toxique. Non, vous ne savez pas, vous ne vivez pas ce que je vis depuis un mois. Vous ne le cotoyez pas 24h/24, en le détestant et en ayant besoin, quelque part, de cette haine car ce n'est plus que le seul lien qui vous uni à lui.

   7 ans. 7 longues années à me morfondre, à sans cesse me remémorer notre enfance, à lui en vouloir de tout mon être. Depuis que je suis ici, ça va mieux. Je ris, j'ai des amis: Paul, mon meilleur ami, surtout pour les conneries. Olivier, c'est comme un grand frère, un confident. Kingsley compte beaucoup pour moi aussi, ainsi que Dimitri, Blaise, Hugo...
  Antoine, c'est particulier. Je le connais mieux que personne, mais je le déteste. Je croyais l'avoir oublié, mais comme on dit, un premier amour ça ne s'oublie pas. Je ne crois pas que j'ai des sentiments amoureux envers lui. Je crois que je le compare toujours à celui qu'il était avant.
Il n'y a pas eu d'autre baiser depuis la dernière fois dans le couloir. Nous n'avons dormi ensemble que 2 fois, mais nous ne le faisons pas par envie: nous le faisons uniquement par besoin. C'est comme manger des légumes. Nous ne le faisons pas par envie, mais par besoin. Je vous l'avoue, c'est un peu bizarre de le comparer à un légume mais bon.

  Bref, nous sommes le 10 juin et et ce soir a lieu le premier match de l'euro. J'ai vraiment hâte mais je suis anxieuse: j'ai vraiment envie que les garçons réussissent leur compétition. Déjà au déjeuner, l'ambiance n'est pas au rendez vous. Personne ne parle, certains se triturent les doigts sans arrêt, d'autres tremblent, se rongent les ongles, bougent leurs jambes... Même Paul qui d'habitude met l'ambiance dès le matin est silencieux et fixe son bol.

   Je finit de manger avant d'aller dans mon cabinet, car c'est un jour de match donc les séances commencent le matin.
La première séance est avec Paul. Il s'allonge, sans parler, presque machinalement. Alors que je commence à le masser, je sens qu'il n'arrive pas à se détendre. Je lui demande donc de s'assoir. Je le regarde dans les yeux:

-Bon Paul je sais que t'es stressé, comme tout le monde. Tu vas y arriver, vous allez y arriver. T'es un joueur exceptionnel alors te prend pas la tête, d'accord? Détend toi, souffle parce que d'une, ça te fera du bien, et de deux je pourrais travailler convenablement.

  Il sourit, me prend dans ses bras et me remercie. Je peux alors terminer ma séance dans de bonnes conditions.

  C'est maintenant au tour d'Olivier, qui lui aussi est stressé. Il s'installe et je le rassure aussi.

-Oli stresse pas ça va aller. C'est le premier match c'est normal.

-Mais tout le monde compte sur moi pour marquer, attaquant c'est vraiment stressant.

-Je suis sûre que tu vas marquer. Et celui qui a le poste le plus stressant c'est bien Hugo, il est le dernier rempart. Pourtant c'est celui qui stresse le moins. L'expèrience je suppose.

  Olivier acquiesce et nous finissons tranquillement la séance.
L'opération se répète avec les suivants. Enfin, il en reste un...

  Antoine rentre sans frapper. Il a son jogging et un tee-shirt. Il est impeccablement coiffé et a les yeux gonflés. Je le connais par coeur, je sais donc qu'il s'est coiffé pour essayer de s'occuper l'esprit ou encore qu'il n'a pratiquement pas dormi cette nuit, comme avant tous ses matchs.
Alors que je commence à le masser, il n'arrête pas de bouger.

-Tu vas arrêter de bouger?!

-Excuse moi de stresser, madame la kiné.

  Je soupire. Il a raison, je dois le traiter comme les autres. Mais pour moi, il ne sera jamais comme les autres.

-J'arrive pas à croire que je vais te dire ça alors sois indulgent s'il-te-plaît.
Il tourne sa tête vers moi et me regarde en fronçant les sourcils.

-Je dois te traiter comme les autres alors je vais le faire... je soupire. C'est votre premier match alors c'est normal de stresser, je te connais par coeur et je sais que t'as pas dormi de la nuit mais je sais aussi que t'es un putain de joueur et que tu vas mener ton équipe en finale. Sur le terrain joue comme t'as l'habitude de le faire, je m'arrête un instant, comme quand on était petits...

  Je baisse la tête après ma dernière phrase. Je le sens bouger et ses doigts viennent se poser en dessous de mon menton pour me relever doucement la tête. Ses yeux sont plongés dans les miens et il me sourit. Ce n'est pas un sourire mesquin, ou faux. C'est sincère, je le sais. Il m'encercle de ses bras musclés et je pose ma tête sur son épaule. Mes bras sont autour de son cou et le calme reigne. Ca fait du bien de ne plus se battre avec lui, de passer un moment sincère et sans "haine". Il déplace une de ses mains pour replacer une mèche derrière mon oreille.

-Merci ma Lina... il me chuchote doucement à l'oreille.

  MA Lina, c'était comme ça qu'il m'appelait avant... J'enfonce un peu plus ma tête dans son cou et une larme s'échappe de mon oeil. Tellement de souvenirs remontent à la surface. C'est dingue l'effet qu'il a sur moi. Il m'éloigne de lui et ne regards se connectent encore une fois. Il essuie doucement la larme qui coule sur ma joue à l'aide de son pouce et je remarque qu'il a également les larmes aux yeux. On ne dois pas se laisser aller, pas maintenant. Il y a le match ce soir et je ne veux pas le déconcentrer. Je rompt notre connexion visuelle en baissant les yeux. Je respire un bon coup.

-Allez, réinstalle toi, on a pas fini la séance. dis-je en évitant son regard.

-Je vois. Finissons la séance alors. répond-t-il sèchement.

La séance se finit dans un silence pesant, autant que mon regard sur son postèrieur si vous voyez ce que je veux dire...



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Souviens-toi *| AG |* Où les histoires vivent. Découvrez maintenant