Vie de famille

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"Monte dans ta chambre!" lança Mary. 

Elle avait perdu toutes traces de sympathie depuis que la secrétaire (stupide) lui avait gâché ce qui s'annonçait être une belle journée. L'ambiance de la maison en avait d'ailleurs pris un coup remarqua son mari, Peter Hollins. Il était dans le grand salon au papier peint rouge situé au rez-de-chaussée, assis dans le canapé familial (qui était au fil du temps devenu le sien). Il fixait la cheminée par moments, comme si un miracle allait en sortir, mais à son grand désespoir, la suie monopolisait son espace. C'était l'une des choses qui l'agaçait le plus, de savoir que la routine abattait au fur et à mesure sa vie.

Ce dernier alla se servir une tasse de thé tandis que Mary apportait le sucre de la cuisine. Il avait, à sa manière, décidé de montrer son agacement quant à la mauvaise humeur de Mary (bien qu'il était assez calme par habitude) en jetant deux sucres au lieu d'un demi dans sa tasse. Geste volontaire mais inefficace.

"Alors chéri, comment était cette journée?" se décida Mary.

Peter Hollins était un homme d'affaires qui travaillait à la City de Londres, à près de deux heures de route donc, dans une célèbre firme multinationale en lien avec l'énergie nucléaire.

"Comme d'habitude" rétorqua-t-il. "Longue journée, beaucoup de travail, beaucoup de dossiers, beaucoup de cons mais toujours au final un ridicule salaire."

En effet, la paye de Peter était telle que Mary gagnait plus en travaillant dans une garderie de la banlieue londonienne. Mais malgré les apparences, ils étaient heureux. Cela faisait maintenant une bonne dizaine d'années qu'ils partageaient le même foyer et qu'ils conservaient le même amour.

Des "Mais maman!"  gémissaient dans la maison frénétiquement par une petite voix pleureuse.

Mary et Peter partageaient un foyer, un nom renvoyant à Spiderman, des fous rires, un mariage, mais surtout une fille. Elle venait justement d'avoir ses cinq ans, et quand on a cinq ans on se sent fier de le répéter tout le temps. Mais je m'égare.

Jessy était assez grande pour âge, mais rien n'empêchait son entourage de la surnommer "la petite Jess". Nom affectif mais quelque peu irritant pour elle. Elle avait hérité des magnifiques yeux bleus de sa mère et des fossettes prononcées de son père. Elle était assez mignonne, mais comme la plupart des filles de son jeune âge, les garçons ne l'intéressaient pas.

"Non, toi tu montes dans ta chambre. Sérieusement t'as vu l'heure? Il est déjà tard et il y a école demain!" ordonna Mary à travers les escaliers en bois.

Mais Jessy voulait une histoire avant de sombrer dans un profond sommeil. Mary, déjà énervée, fit un geste d'humeur et Peter comprit qu'il ne boirait pas son thé avant d'avoir lu une histoire à sa fille.

Le bruit du bois craquant sous les pas de Peter servait de repère à la petite qui courut se jeter sur son lit. Quel soulagement ce fut pour elle! Son visage s'éclairait au moment où son père prit le livre placé intelligemment au-dessus de la table de chevet et commença à lire.

Le visage éclairé de Jessy commençait à montrer des signes de fatigue, ses paupières étaient de plus en plus lourdes et elle ne sut de quelles manières rester éveillée pour connaître la fin de l'histoire.

Finalement, elle n'aura pas su ce soir si le Chaperon Rouge était bel et bien englouti par le Grand Méchant Loup. Peter caressa doucement sa tête, posa le livre dans le plus grand des silences et remonta la couette sur les épaules de sa fille. Il resta là un moment, à profiter de ce merveilleux spectacle, les mains dans les poches, la tête légèrement penchée. Mary le rejoint sur la pointe des pieds, plaça ses mains autour de sa taille et en sortant de la chambre, nous parvenions à entendre à léger souffle chaud provenant des lèvres de Peter qui devait signifier "Bonne nuit mon ange".

Ah, notre histoire aurait été magnifique si elle s'était arrêtée ici. Mais ce n'est pas le cas, loin de là.

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