Incipit réaliste du XIXe siècle

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    On entendit les cloches de l'église Saint -Augustin au loin, Puis retentit sur la place de Dubin "Le temps des cerises" accompagné des cliquetis réguliers provenant de l'orgue de barbarie d'Aimone Fausto, un vieillard Italien d'une cinquantaine d'années ayant un haut-de-forme, rapiécé, défraîchi, déchiré, tordu, posé sur une chevelure grisonnante et ébouriffée. Son visage laissait apparaître un fin sourire en partie dissimulé par une barbe doublée d'une moustache n'ayant pas été rasée depuis deux ou trois semaines. Le vent fit voler ses cheveux découvrant deux yeux palis par le temps ainsi qu'un nez robuste tombant tel un falaise sur un visage de mont et de vallées. Aimone revêtait une redingote héritée de son père, verdâtre, elle avait perdue toute sa couleur, enfin il chaussait des souliers bruns surmontés de guetres sales.
    La partition venait de juste de tomber lorsque la seconde salve de onze coups retentit. Il regarda la place autour de lui, il la connaissait par coeur, c'était une place pavée avec des carreaux irréguliers, gris, des reflets tirant vers le vert étaient visibles les jours de pluie, les trottoirs eux étaient polis par le passage répétés des usagers, "souvent les mêmes" avait remarqué l'Italien, des hommes et femmes sans doute trop occupés à penser pour s'arrêter et écouter le vieux musicien.
     Ce jour là, c'était une nuée de parapluie qui traversait la place de part en part, des grandes toiles quasi-circulaires, identiques, le tailleur avait dû faire fortune.
     Il remit une partition, cette fois il chantait "La semaine sanglante", un couple s'arrêta et lui donna une pièce de cinq francs.La pluie s'intensifiait, alors il s'arrêta de jouer et se dirigea vers le nord ouest dans la Rue de Moscou pour s'abriter, il compta ce qu'il avait gagné, il avait en poche soixante cinq francs qu'il avait obtenu en deux semaines.

Devoirs et imaginationWhere stories live. Discover now