Une rose dans l'océan.

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Une douce brise nocturne balayait les rues de Canterlot. Les poneys avaient sombré les uns après les autres dans ce sommeil bienheureux dont ils ont le secret, plus personne ne se préoccupait des allées et venues d'une alicorne bleue. Cette dernière survolait la capitale licorne en se demandant ce qu'elle était supposée faire. Après avoir aidé le conseil des astres en faisant s'élever la lune grâce à la seule force de sa magie, elle se retrouvait démunie. Elle n'était pas faite pour vivre le jour, son cycle naturel n'était pas le même que celui des autres poneys, mais elle ne pouvait pas croire qu'elle n'avait que pour seul but de faire s'élever la lune. Il devait forcément y avoir plus, elle n'avait juste pas encore trouvé quoi. Alors elle volait, elle galopait, elle attendait.

Lasse de tourner en rond, restreinte à cette unique ville, elle avait commencé à se déplacer chez les terrestres et même chez les pégases. Mais l'ennui la guettait partout, aucun autre poney n'était fait pour la nuit, sa si belle et très chère nuit. Il lui fallut des mois d'errance solitaire, mais elle finit par avoir exploré la totalité des terres attenantes, il ne lui restait alors plus rien à voir. Son attente venait de réellement débuter.

Il n'est jamais chose aisée que d'accepter une place qu'on nous a désignée d'office. Surtout lorsqu'elle celle-ci se base sur des faits supposés de notre personnalité. Luna ignorait pourquoi elle pouvait faire s'élever la lune, tout comme elle ignorait pourquoi sa sœur pouvait faire apparaître le soleil. Qui avait décidé qu'elles seraient les gardiennes de l'équilibre ? La cadette ignorait tout de cela, et elle n'était même pas sûre de vouloir le savoir. A quoi bon après tout ? Ainsi était faite la vie, de circonstances et d'incertitudes. Ce qu'elle souhaitait comprendre en revanche, c'était pourquoi Célestia avait trouvée sa voie facilement, tandis qu'elle était perdue dans un océan de questions sans réponses. Son aînée était occupée tout le jour durant à administrer, avec l'aide des autres dirigeants, les poneys et leurs royaumes diurnes. Luna de son côté n'avait que la lune à élever, personne n'attendait rien de plus d'elle, personne ne l'aidait à remplir les heures creuses et sombres de la nuit. Assise sur le bord d'une falaise, elle laissait le vent marin jouer avec sa crinière, contemplant la vaste étendue d'eau qui lui faisait face. Réfléchissant les rayons lunaires à l'infini, l'océan ressemblait à un champ de cristaux mouvants. La nuit recelait de multiples beautés pures et incroyables que tous ignorent. L'alicorne en est la seule témoin. Une larme perla au coin de ses yeux, défilant le long de son visage comme les heures avaient défilées devant son regard vide, puis elle tomba. Rien ne put la retenir, conservant sa forme parfaite elle chuta vers l'écume blanche qui venait se briser contre le flanc de la falaise. Se perdant dans cette immensité laiteuse elle se dispersa, apaisant l'espace d'une seconde le fracas incessant des vagues. Le silence fut soudain, et profond. Plus rien ne venait alourdir le paysage sonore. Plus rien n'avait l'air vivant. La jument avait relevée la tête, interpellée par ce manque de bruit. Elle n'aurait pu en comprendre la cause, mais son attention était fixée sur les flots immobiles, et pour la première fois elle avait l'impression de voir l'océan, de le voir réellement. Elle avait peut être percés tous les mystères du monde terrestre et aérien, mais le monde aquatique lui était totalement étranger. Et qui sait ce qu'elle trouverait en un tel lieu. L'espoir affluait de nouveau dans son cœur, la faisant déborder d'une énergie nouvelle, peut être trouverait-elle ce qu'elle cherchait si désespérément, la raison pour laquelle elle était la seule éveillée toutes les nuits. Mais quoi qu'il en soit elle voyait dans cet océan la promesse de nouvelles explorations, la promesse de nombreuses nuits peuplées d'aventures. Prenant son envol, la jument se laissa tomber en piqué, ouvrant ses ailes au dernier moment, rasant les flots au plus près possible, se délectant de l'humidité qu'elle sentait sur ses plumes. Ces nouvelles sensations la ravissaient, elle avait l'impression de redécouvrir ses capacités de voltigeuse. Pressée de se jeter à l'eau, elle se lança à l'aide d'un grand coup d'ailes dans un looping audacieux, avant de les replier et de se laisser filer à vive allure vers la masse liquide. Lorsque son corps déchira la matière elle eu l'impression de quitter un monde pour entrer dans un autre. Perdue au milieu de cette immensité inconnue elle aurait du ressentir de la crainte mais il n'en était rien, elle avait l'impression d'être à sa place. Un sourire sincère étirait ses lèvres tandis qu'elle se laissait porter par les courants, s'abandonnant aux caprices de l'océan.

Une rose dans l'océan.Where stories live. Discover now