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...

Elle me tourna le dos et avança vers la grande vitre qui lui permettait d'observer le centre ville.
Le filet de fumée de sa cigarette dansant dans l'air.

"-Je peux savoir pourquoi tu es monté à Tokyo ?"

Elle ne s'est même pas retournée.
Son ton était dur et glacial.

J'étais nerveux, il y a un instant je criais mon amour pour elle aux gardes du corps de l'entrée et maintenant qu'elle me demande ça je me sens pris de court.

"-Hé bien... Ça m'a fait très mal quand tu es partie à la fin du lycée pour suivre des études de stylisme à l'étranger... Alors je me suis promis de travailler dur pour te rejoindre à Paris..." étais-je en train d'avouer, tripotant la manche de mon gilet nerveusement.

Je leva les yeux vers elle, toujours de dos, son bureau était plongé dans l'obscurité et ses vêtements pourpres la rendait à peine distinguable, les lumières de l'extérieur créaient un contraste avec sa silhouette qui se découpait dans la pénombre.

Un nuage de fumée blanche sortit de sa bouche, je savais qu'elle m'écoutait, mais en avait-elle quelque chose à faire de moi ?

Je continuais :

"-Mais j'ai appris que tu étais revenue au Japon et que tu dirigeais une grande entreprise de stylisme ! J'étais tellement heureux que tu sois revenue que ma motivation de te retrouver décupla ! Et maintenant je suis là ! Azzura ! Je t'aime tu entends ! Je t'aime depuis le lycée ! Je vais bâtir un empire comme toi et devenir digne de toi ! Je t'aime ! Je t'aime !"

Je souriais inconsciemment.
Je m'étais levé sans même m'en rendre compte et mon coeur menaçait de s'enfuir, j'avais mal à la tête et mes jambes tremblaient, tandis que j'attendais une réponse.

Elle se retourna vers moi, écrasa sa cigarette dans un cendrier, sur son bureau et je vis un sourire se dessiner sur son visage, elle laissa échapper un petit rire.

"-Mon pauvre Akio."

À ce moment là, je sentis un frisson parcourir ma colonne vertébrale.
Son regard doré était semblable à celui d'un loup.
J'avais l'impression d'être face à une bête sauvage.

"-Et tu as cru que ça fonctionnait comme ça ? Nous ne sommes pas dans un vulgaire shojo où tout fonctionne à base d'amour et de fleurs rouges."

Elle ponctua sa phrase en sortant une cigarette de son paquet. Des "BlackStone" ? Comment une femme aussi délicate pouvait-elle fumer une saveur aussi amère ?

"-Vois-tu... Ce monde est phase terminale... Hmm... En putréfaction même au point où nous en somme..."

Elle cracha de la fumée en direction du globe terrestre posée sur son bureau. Comment pouvait-elle dire ça ? Le monde est magnifique ! Ne se rappelle-t-elle pas les après midi passées à la campagne en compagnie de nos amis ? Les fleurs, les animaux, les films, l'art... Comment peut-elle dire de telles choses ? Je sentais les larmes me monter aux yeux.

"-Ce monde est fou, et évite moi le baratin sur " l'amour peut sauver le monde". Le véritable amour ça n'existe pas, du moins ça n'existe plus depuis longtemps."

Mes joues me brûlaient. Ses paroles étaient tranchantes et son ton cynique n'arrangeait rien.

"-Tu m'aimes tu dis ? Mais... D'où est-ce qu'on se connaît ? Le lycée ? Laisse moi rire. Cet établissement n'était qu'un terrain de jeu avec une palette de jouets très diversifiée."

A z u r aOù les histoires vivent. Découvrez maintenant