Tic, TacTic, Tac
Trois heures vingt-quatre du matin.
Tu es réveillée,
encore.
Toujours.Allongée sur le dos, tes mains derrière la tête, tu fixes le plafond blanc, te concentrant sur la peinture qui s'écaille par endroit.
Tes volets sont à moitié ouverts, comme d'habitude, et des rayons de lumière lunaire s'infiltrent dans ta chambre et viennent peindre les murs.
Tu n'aimes pas être dans le noir.
Tes paupières sont lourdes de fatigue et tes bâillements fréquents, mais tu n'arrives pas à dormir.
Tu n'y penses même plus, à présent.Alors, dans ces moments de silence où tu es livrée à toi-même, les pensées sombres viennent fleurir dans ton esprit. Ce sont elles qui te tiennent compagnie pendant la nuit, qui te bercent jusqu'au matin, sans pour autant te laisser tomber dans les bras de Morphée.
C'est un beau jardin de roses noires aux épines pointues.Ta poitrine se soulève doucement, ton regard est toujours fixe.
Et tu réfléchis.
À toutes les personnes qui ne sont plus là,
À tout ce que tu aurais pu mieux faire,
À tout ce qui ne va pas chez toi.Des ombres surgissent des coins les plus obscures de la pièce, des masses noires et grises, sans visages, sans corps. Et elles dansent autour de toi, et elles chantent à l'unisson.
Mauvaise, mauvaise, mauvaise.
Tu te relèves, bascules la tête en arrière, fermes les yeux. Tu sers les draps entre tes doigts, ils se froissent. La bouche entrouverte, tu inspires profondément.
Tu poses un pied à terre. Le carrelage est froid contre ton pied, et tu frissonnes.
Tu poses le deuxième.La porte de ta chambre s'ouvre sans bruit, sans un grincement désagréable. Le couloir est noir, et tu sais qu'ils s'y cachent. Ils t'observent, ils ricanent, ils se moquent de ta faiblesse.
Tu déglutis, n'allumes pas la lumière. Tu ne veux pas réveiller les autres.
Ignorant les voix dans ta tête, tu avances dans le couloir que tu connais si bien. Ta main frôle le mur avec appréhension, redoutant de tomber sur l'un d'entre eux. Tes jambes tremblent un peu, tu les ignores.
Tu arrives dans la cuisine, et respires à nouveau normalement. Une grande fenêtre baigne la pièce de la lumière de la lune alors tu ne cherches pas l'interrupteur.
Tu te diriges vers le placard, prends un verre, te sers de l'eau.
Le liquide froid coule dans ta gorge et tu fermes les yeux pour mieux en profiter.
Tu déposes le récipient dans l'évier, passes une main dans tes cheveux. Ton regard se perd dans le paysage nocturne que t'offre la vitre.
Et tu distingues, derrière un lampadaire, et une maison, et un arbre, les formes noires onduler.
Elles n'ont pas de visages, mais tu sais qu'elles te regardent.Tu détournes les yeux.
Tu quittes la cuisine, te diriges vers le salon.
Un courant d'air fait voler délicatement tes mèches, et ta peau frémit lorsque la fraîcheur vient la caresser.
La baie-vitrée est ouverte, et tes pieds nus continuent leur chemin sur le bois de la terrasse.
Et là, assis à la table, un garçon se tient la tête, en silence.