5

6.9K 859 39
                                        

Les battements de mon cœur s'accélérèrent puis résonnaient dans ma cage thoracique au rythme des pas de la reine qui approchait.

Comme figée, mon regard resta rivé sur la porte d'entrée, jusqu'à ce que, quelques secondes plus tard, elle apparaisse dans l'embrasure avec son regard sévère et impénétrable.

Elle: Jeune homme !

Sa voix claqua dans l'air.

Puis, comme si elle venait de prendre conscience de ma présence, ses yeux se posèrent sur moi.

Ses sourcils se froncent légèrement avant de glisser vers son fils et enfin, vers la poêle qu'il tenait encore en main.

J'avalai difficilement ma salive lorsqu'elle reporta de nouveau son regard sur moi, aussi froid que celui de son fils.

Mon Dieu... allait-elle me réprimander pour cette scène qu'elle venait de surprendre ?

Assurément.

Intérieurement, je priais pour qu'elle me laisse le temps d'expliquer que son fils avait catégoriquement refusé mon aide avant qu'elle ne me blâme.

Mais, contre toute attente, elle se contenta d'ordonner d'un ton tranchant :

Elle: Laisse nous seuls!

Surprise qu'elle ne m'ait pas réprimandée comme je l'attendais, mon regard resta fixé sur elle, abasourdie, avant que je ne retrouve finalement mes esprits.

Un instant, mes yeux glissèrent vers le prince, qui poursuivait ses gestes comme si la présence de sa mère n'avait aucune importance.

Doucement, je me retirai de la cuisine, abandonnant derrière moi cette tension glaciale qui flottait entre la reine et son fils.

Alors que je me dirigeais vers les escaliers, la voix de la souveraine résonna.

Elle: Jeune homme, puis-je savoir où tu étais ?

Un silence précéda la réponse du prince, dont la voix s'éleva, empreinte d'une ironie mordante.

Lui: Me poses-tu la question dans l'espoir d'entendre un mensonge qui te conviendrait ? Parce que j'ai bien du mal à croire que tu ignores où j'étais, mère.

Elle: Dois-je te rappeler que tu n'es plus a l'etranger et qu'ici tu te dois de respecter les règles et respecter ton statut.

Lui: Tu le dis pour toi ou pour moi, Maman?

Elle: Cesse cela jeune homme je ne...

Le reste de sa phrase se perdit à mesure que je m'éloignais, ne laissant derrière moi que l'écho d'une confrontation que je n'avais pas à entendre.

Perdue dans mes pensées, je rejoignis ma chambre. Sans m'y attarder, je me hâtai de prendre un bain.

L'heure était déjà avancée et l'aube ne tarderait pas à poindre à l'horizon.

Sous la douche, tandis que l'eau chaude ruisselait le long de ma peau, mon esprit s'égara dans les méandres de mes réflexions.

L'attitude du jeune prince et de sa mère ne cessait de me troubler.

Quelle était la véritable nature de leur relation ?

Serait-il aveugle d'affirmer qu'ils partageaient un lien maternel sain, alors que tout, dans leurs échanges, trahissait une distance glaciale ?

Le prince semblait porter une réserve farouche à l'égard de la reine, comme s'il s'interdisait toute démonstration d'affection.

Mais ce détachement qu'il affichait envers sa mère était-il le même que celui qu'il nourrissait à mon égard ?

La froideur qu'il me témoignait n'était-elle qu'une émanation de son caractère distant, ou étais-je réellement une source d'irritation particulière pour lui ?

Peut-être, après tout, n'était-ce pas moi qui réveillais un souvenir amer en lui, mais simplement sa nature qui le poussait à garder tout le monde à distance.

Je laissai échapper un long soupir.

Que le divin puisse m'éclairer dans tout ce tumulte, s'il le désire, car je me sens égarée face aux circonstances qui m'entourent.

Le lendemain, je pris soin d'éviter de raconter aux filles ce qui s'était passé la veille avec le prince.

De toute façon, il n'y avait rien à dire que personne ne sache déjà.

Après l'altercation entre le prince et la reine la veille, dans la journée, il semblait évident pour chacun d'entre nous que leur relation était bien plus complexe qu'elle ne le laissait paraître.

D'ailleurs, cette dispute était devenue le sujet principal des conversations parmi certains employés ce matin.

J'avais tenté, en vain, d'effacer le doute et de convaincre les plus curieux qu'une querelle entre une mère et son fils n'avait rien d'exceptionnel.

Après tout, qui n'avait jamais eu un différend avec un parent ? Mais au fond de moi, je savais que cette situation dépassait une simple altercation familiale.

Et pourtant , l' expression sévère de la reine ce matin ne faisait que renforcer les spéculations.

Si certains pouvaient encore douter de la froideur de leur lien, son regard glacial et sa posture rigide suffisaient à dissiper toute illusion.

Perchée sur ses hauts talons, elle était vêtue d'une élégante robe émeraude qui épousait parfaitement sa silhouette et faisait écho à ses yeux perçants.

La grâce naturelle qu'elle dégageait était indéniable, mais aujourd'hui, une tension latente émanait d'elle.

Je m'avançai avec précaution et déposait délicatement la carafe de thé sur la longue table qui regroupait plusieurs figures éminentes de la monarchie.

La pièce respirait l'opulence et le pouvoir.

D'un œil discret, j'observai ses gestes.

Elle semblait nerveuse, un détail que peu auraient remarqué tant elle maîtrisait l'art de masquer ses émotions.

Son regard alternait entre sa montre et l'entrée de la salle, comme si elle attendait quelqu'un avec impatience.

Puis, après un bref soupir, elle s'approcha et prit place au centre de la table en réaffirmant son autorité sur l'assemblée.

Après avoir servi plusieurs représentants à leur demande, je me préparai à me retirer discrètement. Mais avant que je n'atteigne la sortie, la reine m'adressa un signe de tête et m'intima de m'approcher.

Je m'exécutai aussitôt et, à sa demande, m'inclinai légèrement pour être à son niveau.

Elle: Demande à mon fils de nous rejoindre immédiatement.

Souffla-t-elle d'un ton contenu, maîtrisé, mais sans appel.

Je hochai simplement la tête en guise d'acquiescement avant de m'éloigner aussi rapidement que possible.

Ce ne fut qu'une fois sortie de la pièce de réception que je réalisai pleinement la tâche qui venait de m'être confiée.

Un frisson d'appréhension parcourut mon échine à l'idée de devoir retrouver le prince, et d' affronter à nouveau son regard glacial et son attitude distante.

Seigneur tout-puissant, que cette rencontre se déroule sans encombre.

Prenant une profonde inspiration, je montai les escaliers, mon cœur battant à tout rompre sous l'effet du stress.

Une fois devant sa porte, j'hésitai un instant tout en retenant mon souffle.

La nervosité m'envahit et m'empêcha d'oser toquer immédiatement.

Pourtant, alors que je levais la main pour frapper, la porte s'ouvrit d'elle-même.

Lui: Ma mère n'apprendra rien si c'est ce qui...

Sa voix s'éteignit brusquement lorsque son regard croisa le mien.

______________________________

A suivre !

LE PRINCE ET LA CHRÉTIENNEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant