Chapitre 1

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Dès qu'elle lui a ouvert la porte, elle a senti quelque chose de bizarre, de changé en elle. Le regard peut être, sa démarche. Elle ne sait plus. Mais ce qui est sûr, c'est que jamais elle n'aurait pu imaginer l'issue funeste qui allait succéder.

« Salut tu vas bien ?

- Oui très bien, entre donc ! Et merci pour le bouquet, il est magnifique !

Elles s'installent sur le canapé du salon et à ce moment-là, son amie a pensé que, l'appartement cossu de la rue Notre Dame de Lorette dans le 9ème arrondissement de Paris sciait parfaitement à ce couple bien sous tous rapports. La décoration à la fois moderne et chaleureuse, était le reflet de tout ce qu'on pouvait trouver dans les magazines de décoration en vogue dans la capitale.

Sur la table basse disposés des petits biscuits, une élégante boîte remplie de divers thés de la Marque Mariage Frères, ainsi qu'un gâteau fait maison dont l'odeur embaumait tout l'appartement.

Décidément, son hôte avait vraiment tout prévu. Celle-ci s'enquiert :

« Alors, quoi de nouveau ? Ton procès contre les maquereaux du XVIIIème ?

- Ben pas mal, j'ai réussi à faire condamner le leader du groupe à 8 ans de prison, ce qui est inespéré vu les peines généralement appliquées ».

S'est ensuivie une discussion autour de la grossesse de chacune avec le partage des petits maux qui jalonnent cette étape ci particulière de la vie d'une femme : rétention d'eau, aigreur d'estomac, envie fréquente d'uriner, tout y est passé. Elles étaient ravies l'une et l'autre de pouvoir se confier sur ces sujets intimes, à cela près que l'une d'entre elle n'était plus enceinte. Mais cela, son amie ne le savait pas.

« Je vais mettre les fleurs dans un vase, ce sera mieux pour elles vu la chaleur qu'il fait » !

Elle se rend dans la cuisine pour chercher ledit vase et l'invitée se presse derrière elle : dès que l'hôte a saisi ce dernier, l'agresseuse s'en empare et, plus rapide qu'un félin, frappe à la tête de toute ses forces son amie enceinte de 8 mois, qui, sous le coup de la surprise, n'a opposé aucune résistance. Elle s'écroule au pied du frigo dans un bruit sourd et fait tomber par la même occasion la panière à fruits qui jouxte ce dernier.

Une douleur incendiaire irradie le côté gauche de son crâne. Elle n'a pas le temps de réaliser ce qui vient de lui arriver, qu'aussitôt elle sent une vive déchirure dans le bas ventre, et perd immédiatement connaissance.

Penchée au-dessus d'elle, son couteau dans la main droite, l'agresseuse s'applique à reproduire méthodiquement les gestes observés dans les vidéos de césariennes sur internet ainsi que dans les récits d'éminents chirurgiens : d'abord sectionner l'abdomen, écarter les muscles, ensuite inciser l'utérus, élargir l'entaille avec les doigts et rompre la . Une détermination sans faille s'est emparée d'elle : elle ne voit plus le visage livide de son amie qui se vide petit à petit de son sang. Plongée dans un état de concentration extrême, elle n'entend plus non plus les bruits de la rue qui annoncent les festivités de cette journée de célébration nationale, elle ne sent plus la moiteur de cet après-midi d'été caniculaire.

Elle est soulagée que sa proie ne soit pas en état de voir ce qu'elle lui inflige : elle aurait du mal à soutenir son regard ; de plus, elle avait besoin de toute son attention pour achever l'œuvre macabre auquel elle se livrait.

Au bout de quelques minutes, elle parvient à extraire de la cavité utérine de la victime le nouveau-né, qui se met instantanément à hurler. Il lui reste peu de temps pour couper le cordon, l'envelopper dans un linge propre et quitter l'appartement, avant que quelqu'un ne soit alerté par les cris du nourrisson.

Une fois ces derniers gestes accomplis, sans un regard pour l'agressée qui git toujours inconsciente au pied du frigo, elle s'engouffre dans le hall d'entrée sans croiser personne, heureusement, pense-t-elle.

Moins d'un quart-heure plus tard, la concierge, frappe à la porte de l'appartement de la victime afin de lui livrer un colis. Pas de réponse. Elle insiste, elle lui avait dit qu'elle serait chez elle cet après-midi-là ; ce n'est pas dans ses habitudes de se soustraire à sa parole. Et puis, elle avait cru entendre des voix provenant de l'appartement ; elle a du se tromper.

Disposant du double des clés de tous les appartements, elle fait comme à son habitude lorsque les occupants ne sont pas dans les lieux : elle ouvre discrètement la porte et dépose le colis à droite de l'entrée. Ce jour-ci, son regard a été immédiatement attiré par les jambes de la victime qui dépassent de l'embrasure de la cuisine. Elle se précipite vers elle et n'a pu retenir un cri d'effroi en découvrant la scène macabre qui s'offre devant elle : baignant dans une mare de sang, la jeune femme gisait inconsciente les bras en croix. Mais surtout, elle n'a pu s'empêcher de vomir lorsqu'elle vit l'énorme entaille qui traversait de part et d'autre son ventre.

Elle appelle immédiatement les secours et suit leurs indications par téléphone : par je ne sais quel miracle, le poult de la jeune femme battait encore. Elle presse son l'abdomen pour éviter qu'elle ne perde plus de sang encore et lui parle tout doucement en essayant de faire abstraction de son visage pâle, sans expression, elle qui est d'habitude très enjouée.

Quelques minutes s'écoulent ainsi ; les secours parviennent très rapidement sur les lieux et s'engouffrent dans l'appartement. A la vitesse de l'éclair, la jeune victime est prise en charge par les médecins urgentistes et transportée sur une civière : grâce aux apports en oxygène et aux soins prodigués pour stopper l'hémorragie, elle revient peu à peu à elle.

Très faible, elle fixe les lumières de l'ambulance au-dessus d'elle, et pense à son mari, sa famille, sa fille dont elle ne sait pas si elle était encore vivante. C'est ce qui la rendit le plus triste, l'idée que, peut-être, elle ne verrait jamais le jour.

En cette fin d'après-midi de Juillet, la chaleur est suffocante et le thermomètre affiche des températures supérieures à 30°. Pourtant, elle grelotte.

Une brise glaciale l'enveloppe brusquement, tandis que résonnent les bips bips des appareils de l'ambulance et que s'agitent au-dessus d'elle les médecins urgentistes.

Et dans un souffle léger, elle se sent partir. Pour de bon.


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⏰ Last updated: Aug 02, 2018 ⏰

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