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La lumière mordorée du matin perça à travers la vitre ternie et m'arracha aux limbes d'un sommeil profond. Éblouie par l'éclat trop vif du jour, je plissai les paupières avant de lever lentement une main pour tamiser l'assaut du soleil sur mon visage.

Au-dehors, une symphonie trop dissonante d'oiseaux matinaux s'élevait et exacerbait la lourdeur cotonneuse de mon réveil.

Je laisse échapper un soupir, las, et tourne la tête vers l'horloge trônant sur la table de chevet. 09h31.

Je m'enfonçai de nouveau dans les draps, les paupières lourdes. Pourtant, après quelques instants, je me redresse difficilement avant d'esquisser une prière matinale et de me lever enfin.

Dès que mes pieds touchent le sol glacé, une grimace tord mes traits. Une raideur s'insinue dans mes muscles encore meurtri par la veille.

D'un geste distrait, je passe une main dans mes cheveux en bataille, puis me dirige vers la fenêtre.

Cela faisait des mois que je ne m'étais pas autorisé un réveil si tardif. La sensation était curieusement agréable.

Je me poste devant la vitre et laisse mon regard errer sur l'horizon. À perte de vue, seule une mer d'arbres s'étendait devant moi.

J'ouvre les rideaux et dévoile l'étendue du paysage sous mes yeux. Un océan végétal s'étendait à perte de vue, nimbé d'une brume qui s'effilochait paresseusement sous les assauts du soleil.

En contrebas, un mouvement attira mon regard.

Le vieil homme de la réception d'hier s'affairait auprès d'un parterre de fleurs agonisantes. Un tuyau d'arrosage fatigué pendait entre ses doigts noueux et libérait un filet d'eau chiche et tremblotant.

Un bruit étouffé, en provenance de la pièce voisine, me fit détourner la tête.

Des voix.

Celle du prince, reconnaissable entre mille par sa tonalité austère, contrastait avec une autre plus sèche, plus directe. Celui de Rolito, son garde personnel.

Je ne cherchai pas à capter leurs échanges.

D'un pas traînant, j'abandonne la fenêtre et me dirige vers la salle de bain attenante.

À peine eus-je franchi le seuil qu'un profond dégoût m'assaillit.

L'endroit suintait la négligence. La baignoire était cerclée d'auréoles jaunâtres et striée de veines de calcaire qui s'accrochaient à l'émail craquelé.

Je me demande encore comment ce motel pouvait être géré d'une manière aussi désastreuse. La gestion était défaillante.

De sorte, qu'hier encore, l'état repoussant de la salle de bain m'avait dissuadée de prendre une douche.

Un soupir m'échappa tandis que je me dirigeais vers le petit lavabo mural qui était le seul élément du décor qui conservait un semblant de clarté.

Là, sur le meuble reposait une brosse à dents encore scellée dans son plastique.

Je l'attrapai avec un sentiment mitigé. En fouillant dans le tiroir inférieur, je mis la main sur un tube de dentifrice légèrement cabossé.

Je me brossai les dents avec application en savourant la fraîcheur mentholée qui chassait l'amertume du sommeil.

Je me passe un peu d'eau sur le visage et fixe mon reflet dans la glace. Mais alors que mes doigts effleuraient ma peau livide, une réalité plus cruelle me frappa.

Les assaillants n'avaient pas seulement volé nos affaires.

Ils avaient aussi pris mes comprimés.

LE PRINCE ET LA CHRÉTIENNEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant