Chapitre 2

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Mon ventre gargouillait tandis que je regardais ce qu'il y avait autour de moi. Mes yeux passèrent des légumes aux fruits, pour se stopper sur un panier de biscuits. D'une main timide, je m'emparais de quelques-uns de ces délices.

- Je n'en reviens pas que je fasse ça. Si ma mère m'y prenait...

- Mais votre mère n'est pas ici mademoiselle White, m'encouragea-t-il.

Je fermais les yeux de plaisir en mâchant l'un des biscuits.

- C'est délicieux !

L'homme me regardait, amusé. Je ne sais pourquoi, mais cet amusement dans son regard me semblait quelque peu faux.

Chassant cette idée de ma tête, je lui tendis un biscuit.

- En voulez-vous ?

Il hocha la tête et allait saisir le biscuit lorsque du bruit se fit entendre derrière la porte. J'écarquillai les yeux.

- Oh mon dieu, nous allons être repérés !

D'une mine toujours faussement amusée, l'homme mis une main dans le bas de mon dos et me poussa vers un recoin sombre de la pièce. Tandis que la poignée de la porte se mit à bouger, il posa son indexe sur mes lèvres pour que je me taise.

Un homme de grande corpulence s'immisça dans la pièce et se dirigea vers le fond à la recherche de quelque chose. À ce moment, l'homme aux yeux verts prit ma main et se mit à courir à l'extérieur de la pièce. Je le suivais tant bien que mal en essayant de faire le moins de bruit possible.

Il se mit étonnement à rire et je ne pus me retenir de rire aussi. Peut-être était-il vraiment amusé finalement. On courra ainsi pendant un long moment jusqu'à ce que nous trouvions un banc pour nous asseoir. Hilare, je peinais à reprendre mon souffle.

Lui, avait arrêté de rire depuis un moment, me contemplant. Quand je m'en rendis compte, je rougis et baissai les yeux. Comme le silence prit place entre nous, je décidais de le briser.

- Comment vous appelez-vous ?

- Isaac Beaufais.

- Vous êtes français ?

Il haussa les épaules.

- J'ai certaines origines.

Je dévorais un biscuit que j'avais gardé précieusement.

- Vous ne me demandez pas comment je m'appelle ?

- Je sais qui vous êtes.

J'arquais un sourcil.

- Et qui suis-je ?

- Vous êtes Ana White de Westminster. Vous êtes la fille je John White, gouverneur de la colonie.

Il avait dit cela sur un ton assez froid et j'allais lui demander pourquoi lorsque des voix se firent entendre. Je reconnu celle de mon père et il semblait énervé.

Curieuse, je me dirigeai vers les voix qui me menèrent au bureau du capitaine, Isaac sur mes pas. La porte était entre-ouverte et ils semblaient se disputer.

- Ce sont les ordres de la reine capitaine ! lança mon père, des éclairs dans les yeux.

- La reine, celle que vous chérissez tant, n'a aucune autorité sur mon bateau monsieur White.

Je n'avais jamais vu le capitaine auparavant. Assis à son bureau, il faisait face à mon père. Une barbe de trois jours parsemait son visage et ses cheveux ébène et légèrement bouclés retombaient sur son front. Il devait être plus âgé que moi mais cela n'enleva rien à son charme.

- Si nous allons récupérer ces soldats, nous allons faire un détour de plusieurs jours. Nous manquons déjà de vivres, je ne veux pas que mon équipage souffre pour vos simples désirs, continua-t-il.

Je perçu un léger accent français dans sa voix et je compris alors pourquoi il avait dit que la reine n'avait pas autorité ici.

- Et ces soldats qui attendent là depuis des mois, doivent-t-ils souffrir de vos caprices ? s'énerva mon père qui serrait les poings.

Visiblement énervé, le capitaine se passa une main sur le visage.

- Très bien. Mais alors, je vous débarquerai auprès d'eux et repartirait ensuite pour la France.

- Mais enfin, vous savez très bien que la colonie se situe à des semaines de marches de ce lieu par la terre ! Par l'eau, cela ne nous prendrait que quelques jours !

- Je suis désolé monsieur White, mais vous ne me ferez pas changer d'avis, répliqua le capitaine avec un ton sans appel.

Tandis que mon père faisait les cents pas dans la pièce, les yeux du capitaine se fixèrent sur moi et il arqua un sourcil. Aussitôt, je me retournais et me mit à courir dans la direction opposée.

- Tu as entendu ? demandais-je quand Isaac et moi furent assis.

Il hocha la tête, pensif.

- Ton père est égoïste.

Prise au dépourvu, j'avalais ma salive de travers.

- Que voulez-vous dire ?

- Il veut aller chercher ces soldats pour que la reine l'ait dans son estime. Si, comme il l'a dit, la colonie se trouve à plusieurs semaines de marches, alors nous allons manquer de vivres et les plus pauvres d'entre nous mourrons rapidement.

- Vous dites n'importe quoi. Si nous manquons de vivres, alors les plus fortunés mourront également.

Il eut un rire amer qui me fit frissonner.

- Mademoiselle White, vous êtes bien innocente.

Il plissa le front, me lançant un regard sérieux. C'est à cet instant que je me rendis compte qu'il avait l'air d'être bien plus vieux que moi.

Il se leva d'un bond et me demanda de le suivre. Ce que je fis, non sans hésiter.

LA COLONIE PERDUEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant