31

4.5K 621 23
                                    

             Point de vue du prince

Pourquoi avais-je cette étrange sensation de déjà connaître ce jeune homme ? Son visage semblait porter les traces d'anciens souvenirs, bien que son image demeurât floue dans les méandres de ma mémoire.

Était-il donc l'époux désigné, celui qui allait unir sa destinée de force à celle de la jeune fille ? Bien que je n'aie point de connaissances approfondies de la demoiselle, il me choquait profondément de constater qu'elle acceptait un mariage imposé, elle qui semblait si sage et éclairée. Est-il donc possible d'être sage et pourtant d'une naïveté déconcertante ? En ce temps moderne, je demeure persuadé qu'une jeune femme a le droit absolu de refuser tout engagement matrimonial allant à l'encontre de sa volonté.

Mais en quoi cela me concernait-il donc, les choix de vie de cette jeune fille ?

Voilà une question des plus légitimes. En vérité, ses décisions ne me regardaient point, mais au plus profond de moi-même, je ne pouvais m'empêcher de penser qu'elle s'égarerait en acceptant ce mariage forcé. Elle risquait ainsi de compromettre son existence, elle qui démontrait tant de détermination pour poursuivre ses études.

Cependant, une fois de plus, cela ne relevait point de mon ressort. L'essentiel, à présent, résidait dans le fait que cette jeune fille ne résidât plus au palais, ravivant les souvenirs douloureux de mon passé.

Mais, hélas, il fallait encore débattre de cette question, car nos chemins se croisaient à maintes reprises à l'extérieur.

Garde : Monsieur, je me dois de suivre les directives qui m'ont été confiées.

Moi : Laisse tomber, nous partirons de toute manière.

Merveille : Je vous prie de m'excuser pour ce moment. J'ai jugé opportun de m'approcher, apercevant votre présence... J'espère de tout cœur que vous vous portez bien.

Le bien-être est une notion des plus subjuguantes à mes oreilles. Puis-je réellement prétendre me porter bien ? En réalité, qu'est-ce qui pourrait bien faire que je me porte bien ? Il est si longtemps que je ne suis plus en paix, si longtemps que j'ai fini par oublier les sensations que procure le fait d'être bien dans sa peau.

J'aurais tant aimé lui renvoyer cette question. Elle, qui a enduré mes sombres sentiments à son égard lorsqu'elle servait au palais, elle mériterait que je lui pose cette interrogation. Sans doute mène-t-elle à présent une vie épanouie, loin de la haine que j'ai pu nourrir envers elle...

Mais pourquoi, par-delà tout, avais-je cette sensation de ne point croire en cette affirmation ? Depuis notre dernière confrontation, voire depuis cette nuit dramatique qui marqua nos existences, ma perception de cette jeune femme avait radicalement changé. Je réalisais à présent avec quelle force j'avais été impitoyable à son égard, alors qu'elle n'avait point cherché querelle depuis le commencement.

Ce sentiment que j'avais qualifié de haine envers elle avait peu à peu évolué en un sentiment de remords, en quelque sorte.

Car, quoi que je fasse, elle resterait l'une des rares personnes à m'avoir sauvé la vie. Je ne saisis toujours pas comment elle s'y était prise pour accomplir cet exploit, mais je lui étais redevable d'une existence depuis ce jour-là, prenant conscience que ma haine envers elle était démesurée.

Moi : Je vais bien.

Une affirmation si fausse. Elle acquiesça d'un signe de tête.

Elle : Je suis ravie de l'apprendre. Prenez soin de vous, monsieur.

Moi : Il n'y a pas de souci.

Je fis signe à mon garde qu'il était temps de quitter ce parc. Cependant, avant de monter dans ma voiture, mes yeux évaluèrent une dernière fois l'individu qui avait suscité mes soupçons tout au long de notre rencontre.

Une fois installé dans mon véhicule, je tentai de me remémorer où j'avais bien pu le rencontrer auparavant.

Mes pensées s'éclaircissaient peu à peu, et lorsque l'endroit où je l'avais croisé me revint en mémoire, un frisson glacé parcourut mon être l'espace d'un instant.

Jetant un regard par la fenêtre, je constatai qu'il avait disparu. Face à ma propre conscience, je ne savais pas si je devais ignorer cette situation ou la prendre à cœur.

Après tout, il était possible que j'attribue l'image d'une personne à une autre. Afin de ne pas commettre d'erreur, je demandai alors à mon garde de mener une enquête sur le jeune homme que je venais de croiser. Si mes doutes étaient confirmés, je saurais alors quelle démarche entreprendre.

       Point de vue de Merveille

Mimi: Je n'arrive pas à croire que j'étais en face du prince il y a seulement quelques minutes. Pourquoi ne m'as-tu pas dit la vérité, Merveille ?

Moi: Que aurais-tu fait, Miriam ? Lui sauter dessus ? Tu te serais attirée des ennuis, c'est strictement interdit, le sais-tu ?

Mimi: Au moins, j'aurais pu toucher le grand prince.

Un rire glacial m'échappa à sa dernière remarque. Ce n'était pas à cause de sa phrase en elle-même, mais plutôt à cause de la présence d'Alex qui me dérangeait profondément. En venant ici, je cherchais à retrouver une certaine paix intérieure, mais je me retrouve face à lui. Lui, qui est la source de mes angoisses.

Moi: Que fais-tu ici, Alex ?

Lui: Comme je te l'ai dit.

Moi: À ma connaissance, je ne t'ai jamais parlé de mon projet de venir au parc.

Lui: Je devais rencontrer un ami pour une réunion chrétienne, et par une étrange coïncidence, je t'ai trouvé ici.

Seigneur, serait-ce toi ?

Ma meilleure amie me lance un regard désolé, impuissante face à la situation. Je pousse un soupir qui en dit long.

Dans la vie, nous avons toujours le choix entre persévérer dans ce qui nous détruit ou nous en détourner. Certaines personnes ne réalisent pas ce qui les détruit, tandis que les plus chanceuses prennent conscience de ces éléments destructeurs. C'est à ces dernières que le libre arbitre s'offre.

À cette pensée, un frisson me parcourt l'échine.

________________________________

A suivre !

le prince et la chrétienne [TERMINÉ] ( RÉÉCRITURE )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant