À ma poursuite
Chapitre 1 : Sans piste
C'était une pratique devenue très fréquente, des hommes, des femmes se faisaient kidnapper. Parfois même des enfants. Personne ne sait ce qu'il advient de ces pauvres gens. On ne les a jamais revu. La pauvre police du village tentait tant bien que mal de retrouver les disparus. Même s'il fallait se l'avouer, les flics étaient bien trop occupés avec des tonnes d'autres affaires similaires.
La mélodie du violon de Lora Keir berçait ses parents, vautrés dans leur fauteuil en train de s'endormir.
Certains la qualifieraient de très douée, d'autres de maestro. Lorsque la mélodie s'accélérait, les bras de Lora s'agitaient, tout son corps se mit sous une forme de frénésie inexplicable. Elle était ailleurs, son regard clair s'était évadé dans un monde imaginaire aux mille couleurs toutes plus éclatantes les unes que les autres. Enfin, elle imagine deux danseuses en jolies robes courtes, colorées bien-sûr. Mais son cerveau doté d'une imagination bien fertile transforma le visage de l'une des danseuses en monstre. Une créature affreuse avec des dents acérées et de toute évidence, une créature néfaste pour l'être humain.
Quelqu'un frappa.
Lora fût soudain propulsée violemment de son monde en parallèle avec la réalité. Elle s'arrêta net de jouer, presque vexée d'avoir été interrompue dans son art de jouer et de rêver.
Elle posa brusquement son violon contre le mur du joli salon dans lequel elle se trouvait et se regarda dans le miroir avant d'ouvrir. Ses cheveux d'un roux proche du orange étaient toujours aussi lumineux et soyeux. Ils étaient attachés en chignon relevé mais en s'excitant à jouer aussi vite, elle s'était décoiffée. Sa frange sauvage faisait ressortir ses jolis yeux bleus maquillés d'ombres noires. Elle portait une jolie robe noire en soie avec des fleurs de toutes les couleurs. Après avoir constaté qu'elle était présentable, elle se décida enfin à ouvrir.
- Oui ? Demandait-elle avec peu d'hospitalité.
- Bonjour Madame, lieutenant Drew. J'enquête sur la disparition de Kate Richard... disait le policier en laissant en suspens ces quelques mots.
Il s'arrêta, voyant le regard perdu de la jeune femme.
Il fallait savoir que Lora était une jeune femme de 24 ans assez particulière. Elle ne comportait pas réellement que les jeunes femmes de son époque. Il faut dire qu'en 1935, les femmes avaient des obligations. Elle, elle se les interdisait. Grande rêveuse et artiste dans l'âme, Lora avait besoin de vivre à travers ce qui la faisait vibrer. Et autant dire que ce n'était ni la popote ni la couture qui la faisait se sentir femme, se sentir elle. NON.
Le lieutenant Drew demanda du tac au tac :
- Attendez, ne me dites pas que vous n'étiez pas au courant de sa disparition ? Cette femme de 53 ans habite à 3 maisons de la vôtre. Et j'ai interrogé les maisons voisines, tous sont au courant. Dans un village aussi petit, les nouvelles vont v...
- Venez-en aux faits s'il vous plaît. Que voulez-vous me demander ? J'ai des choses à faire monsieur.
Le lieutenant était toujours au pas de la porte et se sentait mal à l'aise d'avoir été coupé aussi brutalement. Normalement les femmes le respectaient, il était intimidant, d'une quarantaine d'années. Un peu bourru.
- Déjà, puis-je entrer ? Ce n'est pas le genre de discussion qu'on a sur le pas de la porte, voyez-vous.
Lora jeta un coup d'oeil par dessus son épaule et vit ses deux parents en train de dormir. Cela la mit mal à l'aise, mais elle était contrainte de le faire entrer.
Le lieutenant ne put s'empêcher de faire la grimace en voyant le bazar dans le salon, surpris de voir les parents en train de dormir, et un violon qui traîne.
- Vous jouez du violon ?
Lora se retourna violemment face à lui, le regard dur, sachant que la question n'avait aucun rapport avec les questions sur la disparition de Madame Richard.
- Vous voulez boire quelque chose ?
Décidément, elle n'était vraiment pas commode cette jeune femme. Il fit un bref non de la tête et Lora s'installa face à lui.
- Donc, vous étiez au courant de la disparition de Kate Richard ?
- Non. Je ne la connaissais presque pas, je l'ai croisée quelques fois à l'épicerie.
Le lieutenant Drew se gratta le menton, chiffonné d'entendre ça. Car ce genre de réponse pourrait la mettre sur la liste des suspects.
- Elle a disparu depuis 2 jours et nous sommes bien évidemment à sa recherche. Vous voyez, madame... madame comment ?
- Lora Keir.
- Madame Keir. Sachez que pour la retrouver, il faudrait que je sache qui aurait pu la voir la toute dernière fois.
- Je ne l'ai pas vue depuis... oh, je dirais bien une dizaine de jours.
Le lieutenant notait.
- Que faisiez-vous le 9 mars ?
Lora réfléchissait en regardant le plafond. Je suppose que je jouais.
Il la regarda peu convaincu, en plissant les yeux.
- Vous jouiez ? Du violon ?
- Tout à fait. Je joue quasiment toute la journée. Et si je ne joue pas, je lis, dit-elle en montrant d'un geste gracieux sa gigantesque bibliothèque.
- Vous ne sortez jamais ? Demandait-il, d'un ton inquisiteur.
- Mhh, pas beaucoup. Je sors lorsque c'est nécessaire. Pour acheter à manger ou m'acheter un nouvel archet (baguette de bois utilisée pour jouer du violon).
- Très bien madame. J'aurais bien aimé m'entretenir avec vos parents mais visiblement... une autre fois ?
Lora regarda d'un air désespéré ses parents en lâchant un gros soupir.
- Oui...
Le lieutenant et Lora se levèrent en direction de la porte lorsqu'il apporta une toute dernière chose.
- Une dernière chose Madame Keir. Soyez prudente. Il semblerait que toutes les personnes ayant disparu avaient un point commun. Ou presque.
- Lequel ?
- Il s'agissait presque chaque fois de disparition de femmes, entre 20 et 35 ans. Restez prudente.
Ils se serrèrent la main. La relation entre ces deux là semblait s'être adoucie.
Lora ferma la porte à clef et éteint toutes les lumières avant de s'endormir.
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A ma poursuite
General Fiction" Ils cherchent des inconnus, mais pour quoi faire ? Pour qui se prennent-ils ? Pourquoi une certaine catégorie de personnes ? Julian fait partie de ceux qui les "choisissent". Toutes les personnes enchaînées les unes à coté des autres sont effray...