Chapitre 42 - Le Sceptre

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— Impossible.

Céleste répétait ce seul mot en boucle, tentant de s'en convaincre elle-même.

— Bien sûr que si ! la contredit Amælie ! Wonder ! Wonderline ! Et cela explique beaucoup de choses, notamment tes
capacités extraordinaires !

— Et le fait que Maître Fowl t'ait qualifiée d' "inhumaine", compléta Roméo.

La jeune fille devait bien admettre que ses amis avaient raison. Du moins, en partie. Mais certains détails la titillaient.

— C'est écrit noir sur blanc, Céleste, intervint à son tour Amælie. Les Archanges étaient des Sans-Frontière. Et tu es une Sans-Frontière.

Soudain, une image bien nette émergea des profondeurs de sa mémoire. Elle revit Filæ et les grandes ailes noires qui s'étendaient à la naissance de sa clavicule. Mais non non non ! Elle refusait d'y croire. Elle s'obstinait à se répéter que ses camarades avaient tort, que cet ouvrage était stupide, qu'il ne pouvait de toute manière pas être réaliste.

— Écoute, tenta la blonde avec hésitation, je ne vois pas ce qu'il y a de mal à ça...

Évidemment qu'elle ne voyait pas ! Mais pour Céleste, c'était aussi clair que de l'eau de roche. Encore une fois, encore une pénultième fois, elle était différente. Encore une fois, on la reléguait la case des bizarreries et des bêtes de foire, à la catégorie à part. Encore une fois, on s'obstinait à souligner sa dissemblance. Ça n'en finirait donc jamais. Elle était destinée à passer le restant de ses jours avec cette étiquette fixée à son front.

— Et qu'est-ce que peut bien faire ce satané bouquin ici, hein ?! interrogea-t-elle avec brusquerie comme si cela pouvait excuser la brutale vérité à laquelle elle était confrontée.

— Probablement une sorte... d'avertissement, répondit Roméo en haussant les épaules, faisant mine de ne pas avoir remarqué le ton de son amie.

— Un avertissement ? Quant à l'Oiseau tu veux dire ? fit Amælie.

Un hurlement à glacer le sang mit un terme à leur échange. Échangeant un regard, ils s'éloignèrent du pupitre et s'approchèrent à pas de loups de la porte close. Des bruits de lutte leur parvenaient de l'autre côté de la cloison. Lætitia leva sa main droite et compta silencieusement jusqu'à trois.

Et ils poussèrent le battant. La pièce dans laquelle ils émergèrent était d'une telle luminosité qu'ils durent fermer les yeux pour ne pas être éblouis. S'accoutumant à la lumière, Céleste parvint à entrouvrir les paupières. La puissante lueur émanait d'un sceptre d'or surmonté d'un colibri dont les serres étaient repliées sur le pommeau. À sa vue, la jeune pupille laissa soudain tomber tous ses sens. Elle ne ressentait plus rien d'autre qu'une irrésistible attirance. Hypnotisée, elle avança d'un pas. Il lui suffisait de s'en emparer, de le saisir, et enfin sa soif serait assouvie. Plus de maux, plus de chagrin, plus rien d'autre qu'elle et lui.

Mais alors qu'elle tendait la main pour l'attraper, un nouveau hurlement la sortit de sa transe. Tournant la tête vers la gauche, elle aperçut Hugot, au sol, se battant au corps à corps avec un homme qui leur tournait le dos. Ce dernier parvint finalement à immobiliser le garçon en lui décochant un violent uppercut dans la mâchoire. Il lui ligota fermement les mains et les pieds. Céleste s'avança dans la direction de son ami dans le but de lui prêter main forte, mais son agresseur se dirigeait déjà vers l'Oiseau. Déviant sa trajectoire, la jeune pupille se jeta sur le dos de l'individu sans réfléchir, qui chancela sous son poids mais finit par l'envoyer à terre. Elle se releva péniblement et lui envoya son poing dans l'estomac, dans l'espoir de le ralentir. Mais son coup était trop faible, et son adversaire lui asséna une telle frappe sur le crâne qu'elle sentit ses jambes se dérober sous elle. Un liquide chaud et poisseux s'écoulait de son front, tandis que le goût métallique du sang se répandait dans sa gorge. Hugot voulut lui mordre les chevilles, mais l'homme avait anticipé son coup et lui écrasa le nez d'un violent coup de chaussure. L'adolescent gémit, le visage en sang, et Céleste se dirigea à quatre pattes dans sa direction, sonnée par le choc du à sa chute, des étoiles dansant devant sa vision obscurcie. À tâtons, elle chercha les liens qui retenaient les membres de son camarade, mais celui-ci écarquilla les yeux de terreur.

Le syndrome des cœurs de pierre I - PupilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant