➿Chapitre 4➿

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Tétanisée, il me faut plusieurs secondes avant de prendre pleine conscience de la signification de ses propos.
Moi, Dahlia Vidor, je me trouve actuellement dans le palais royal de Thalésia.
Moi, Dahlia Vidor, je viens, contre mon gré, de découvrir l'identité secrète du prince héritier.
Moi, Dahlia Vidor, je risque la peine de mort.

A cette pensée, je manque de défaillir. Je n'arrive pas à accepter que cela puisse m'arriver.
Il y a quelques minutes encore, je pensais avoir touché le fond avec Ayden. Mais en fait, je n'étais qu'au bord du précipice. Et Erwan vient de m'y enfoncer.

Alors que de nombreux frissons me parcourent l'échine, je m'appuie sur le bureau de peur que mes jambes ne cessent soudainement de me supporter.

— Vous... vous ne dites rien ? me demande le prince.

S'il me connaissait, il saurait que ce n'est pas mon genre. D'ailleurs, je décide qu'il est temps de le lui faire comprendre. Ma phase d'inertie maintenant terminée, je lève vers lui des yeux remplis de rage.

— Vous voulez quoi ? craché-je. Que je vous félicite peut-être ? Ou alors que je vous demande de m'expliquer comment une personne, qui aura bientôt la responsabilité d'un pays tout entier, a pu faire preuve d'une telle inconscience ?

— Je vous interdis de me parler de la sorte !

Le ton de sa voix me surprend. Alors qu'il s'était montré aimable jusque là, Erwan semble tout à coup menaçant. Ses yeux me lancent des éclairs et je me sens maintenant ridiculement petite à ses côtés. Malgré tout, je suis dans un tel état de fureur qu'il lui en faudra plus pour m'arrêter dans ma lancée.

— Je vous parle comme je veux ! je hurle. Vous n'auriez jamais dû me ramener avec vous et vous le savez très bien.

— Vous oubliez que vous avez fait exprès de vous mettre en danger et ce dans l'unique but que je vous prenne avec moi. Et ça c'était après m'avoir supplié à plusieurs reprises. Vous ne m'avez pas laissé le choix.

J'ai beau ne me souvenir que très vaguement des événements de la veille, j'ai l'intime conviction qu'il me dit la vérité. Après tout, je ne vois pas pourquoi il me mentirait, cette situation ne doit pas beaucoup l'arranger non plus. Bien que mon coté rationnel reconnaisse que je n'ai pas dû lui faciliter la tâche, il n'en oublie pas pour autant que de nous deux, je suis celle qui court un grand danger. Et c'est pour cela qu'il est hors de question que je le laisse s'en tirer de la sorte.

— On a toujours le choix, je déclare, sûre de moi.

Je vois difficilement ce qu'il pourrait me répondre. Dans n'importe quelle situation, et surtout celle de la veille, nous sommes les seuls maitres de nos actes. A nous de prendre des décisions, de parfois faire des sacrifices et d'en assumer ensuite les conséquences. Cette vision des choses peut sembler maussade voire pessimiste, mais qui a dit que la vie n'était qu'une succession de rires et de joies ? 

— Vous pensez qu'on m'a laissé le choix lorsqu'on m'a annoncé petit, que j'allais devoir vivre dans l'ombre et dissimuler mon identité pendant des années ?

Alors que je pensais lui avoir retiré les mots de la bouche, voilà que je ne sais plus quoi dire. Il a raison : il n'a probablement jamais désiré devoir mentir et se cacher. Mais au fond, il doit tout de même vivre en fonction des choix que l'on a fait à sa place. Cela implique qu'il n'avait pas à me mettre en danger de la sorte.

— Ça n'a rien à voir, marmonné-je. De toute façon, vous avez eu tort.

— Tort de quoi ? s'exclame-t-il d'une voix rauque. D'avoir fait preuve d'un minimum de compassion à votre égard ? Voyons, vous ne pouvez pas rejeter l'entièreté de la faute sur moi.

L'éclat de l'HéliodoreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant