Une journée comme les autres, enfermée dans ma chambre, je discutais avec un ami sur skype, par messages. Mes souvenirs sont un peu brouillés, mais je crois me souvenir lui avoir dit que je n'en pouvais plus de mentir. En effet, j'étais épuisée mentalement. Mes pensées sans cesse focalisées sur mes manches que je ne devais jamais, au grand jamais relever.Cet ami m'intima d'aller tout avouer à ma mère. Je refusai sa proposition en bloc. Pour moi, il était inconcevable d'aller dire à ma mère que je me scarifiais chaque soir depuis 5 mois. Je me voyais déjà dans la salle d'attente du psychologue, ou pire, dans un hôpital psychiatrique. J'avais peur qu'elle ne me prenne pas au sérieux, qu'elle me traité de folle, qu'elle se mette en colère. J'étais pétrifiée. Pourtant, je l'ai fait.
Sans rien dire à mon ami, je me suis levée et j'ai traversé le couloir. Ma mère était dans la salle de bain, se maquillait. Je suis restée cinq bonnes minutes devant la porte entrebâillée, tremblante. Puis ma mère remarqua ma présence : « Qu'est-ce qu'il y a, Maëlle?
- Rien, avais-je répondu en retournant dans ma chambre.»
J'ai ensuite dit à mon ami « J'ai pas réussi, je ne suis pas assez forte.»
Il a insisté longuement, lourdement, s'est mis en colère. Finalement, je suis retournée devant la salle de bain.
J'ai poussé la porte qui sembla soudainement peser une tonne, me suis faufilée dans la pièce et ai refermé la porte, tremblant comme une feuille. J'ai regardé ma mère, les larmes aux yeux, pendant quelques secondes. Elle ne comprenait pas ce qu'il se passait, j'ai vu la peur passer furtivement dans ses yeux bleus. Puis j'ai fait tomber mon gilet en laine rose au sol. Ce gilet en trop, qui servait seulement à me cacher, à mentir. L'air sur mes bras semblait nouveau. J'avais chaud et froid en même temps. J'ai reposé mon regard sur ma mère, toujours perplexe, puis je lui ai montré mes avant-bras, sanglotante. J'avais honte, si honte de montrer ma faiblesse à ma mère, de montrer que j'avais abîmé ce qu'elle avait passé neuf mois à construire, cellule par cellule. Je me sentais coupable, je me sentais malade, je voulais disparaître mille pieds sous terre, me vider de mes larmes et de mon sang pour ne plus jamais ouvrir les yeux.
Puis, lentement, ma mère a pris mes poignets dans ses mains douces et m'a attirée contre elle. Elle m'a chuchoté que c'était fini, que j'allais arrêter maintenant, que ce n'était pas grave. Elle a eu la meilleure réaction qu'une mère puisse avoir. Ensuite, à bout de forces, les jambes tremblantes, je me suis assise au sol et nous avons discuté. Non, ce n'était pas grave, si j'arrêtais. Je n'irai pas chez un psychologue si je n'en avais pas envie. J'irai mieux un jour. Elle me passa de l'huile de coco sur le bras en me conseillant de le faire chaque jour pour que les cicatrices partent.
Au fond, je n'avais pas envie qu'elles partent, elles faisaient partie de moi, je leur donnais une certaine affection, même si cela était parfaitement irrationnel. Parfois encore, je regarde mes bras. Ils portent les marques que je suis seule à reconnaître. Les fines zébrures, plus claires que le reste de ma peau. Elles font partie de mon histoire, et je pense à tatouer cette partie de mon corps avec un symbole, ou une phrase afin que je n'oublie pas par quoi je suis passée, cette souffrance que j'ai enduré, que se laisser aller vers le fond du gouffre n'est pas et ne sera jamais la bonne solution.
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NDA: J'avoue avoir senti les larmes me monter aux yeux pendant l'écriture de ce chapitre. Cette partie de mon histoire, même si elle est passée, reste très vive et un peu douloureuse. Ma cicatrice se refermera un jour, je le sais, mais pour cela, il ne faut pas la maintenir ouverte, laisser la cicatrisation mentale faire son travail. Mon cœur fissuré se recolle peu à peu. Tout les cœurs se réparent, si la volonté y est.
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T'es gouine?
Narrativa generaleGouine (n.f.): Homosexuelle (injurieux). Ou quand la violence n'est plus que normalité.